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«Murs blancs, toit de bardeaux…»

Les tavillons à l'honneur - détail de la couverture du livre. Ed. Favre

«Tavillons et bardeaux»… des mots qui sentent bon le passé, et que le présent néanmoins redécouvre. Olivier Veuve et Pierre Grandjean ont consacré un ouvrage à ces toits de bois, en Suisse et ailleurs.

Quelquefois les miracles arrivent par la poste. En déballant cet album intitulé «Tavillons et bardeaux» paru dernièrement aux Éditions Favre à Lausanne, et en découvrant la photo de couverture, immédiatement les paroles du «Vieux Chalet», de l’abbé Bovet, naguère apprises à l’école, me sont revenues en mémoire.

Cette chanson que je croyais oubliée depuis mon enfance, me fit penser à l’effarante distraction qui imprègne nos existences. Nous passons quotidiennement à côté de chefs-d’œuvre, de spectacles époustouflants de petits bonheurs ordinaires, sans les remarquer. Aveugles stupéfiants que nous sommes!… C’est ce que j’ai réalisé en feuilletant cet album co-signé par Olivier Veuve et Pierre Grandjean sur l’art des tavillons, appelés aussi bardeaux, ou tuiles de bois.

La beauté et la tradition

La marque ancestrale de toute l’histoire de l’humanité, c’est la beauté des gestes, des tours-de-main, nécessaires pour créer un décor. Ce qui m’a frappé de prime abord, c’est la splendeur de ces toits recouverts de tavillons.

Vagues souples de planchettes de bois que les années et les intempéries teintent en gris océan, irrésistiblement, je pense au ressac d’une houle infinie. Je suis touché, presque ému, par la magnificence des ces couverts à nuls autres pareils. Et c’est grâce à la survivance de ces artisans «tavillonneurs» que nous pouvons admirer l’habileté qui anime les humains depuis des siècles.

Les photographies des ces constructions singulières montrent tout l’art de ces hommes pratiquant un métier ancestral. Je mesure soudain le temps et la succession des générations qu’il a fallu pour que ces artisans acquièrent cet ancien savoir-faire.

Un grand bonhomme

Comme le dit si bien Norman Foster, le célèbre architecte et préfacier de l’ouvrage en question: «Le tavillon, tuile de bois ou bardeau, comme nous l’appelons en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, est probablement le matériau de construction le plus renouvelable au monde. Il est culturellement sympathique, il reflète les traditions architecturales locales et il contribue à l’équilibre écologique en favorisant le remplacement des vieux arbres de la forêt.»

Ce grand architecte, mondialement connu et conséquent avec lui-même, a fait construire la célèbre Chesa Futura de Saint-Moritz en bois en la faisant recouvrir de tavillons. Il n’est pas le seul, à notre époque, à vouloir réutiliser cette technique ancienne. On voit, un peu partout dans le monde, des construction nouvelles coiffées, habillées, avec ces planchettes de bois et ceci malgré les contraintes que mettent les autorités ou les assurances, sans doute par peur des risques d’incendies.

Une technique universelle

Naïf que j’étais! Presque nationaliste par paresse, je croyais que l’art de façonner et d’utiliser les tavillons était une technique qui se situait dans l’arc alpin européen. Je pensais que cet art se pratiquait dans les quelques pays qui sont nos voisins tels l’Allemagne, l’Autriche, l’Italie et leurs environs. La vérité que j’ai découverte en lisant l’ouvrage en question, c’est que des bardeaux existent dans de nombreuses contrées exotiques. Le Japon ou l’Amérique du Nord, par exemple!

Ce qui me frappe, en regardant les vues de ce temple japonais nommé Terunobu Fujimori (Tokyo), c’est la même sensation d’art achevé, de maîtrise d’une technique, d’un savoir-faire reposant sur des générations d’artisan, qui me saisit et m’enthousiasme. Il en va de même pour cette maison de thé construite au fond d’un jardin. Un vrai bijou! Cabane de poupée construire pour boire le thé du soir! Quand je vous dis que ces japonais sont fous!

Plus surprenantes encore sont ces habitations ou ces moulins à eau, à vent, qui se situent, respectivement, au Bhoutan, à la Réunion ou en Vendée. Et à chaque fois le même émerveillement m’atteint et me fait jubiler. Et que dire de cette église norvégienne en bois debout qui me rappelle les drakkars des Vikings, avec ses figures sculptées arrimées aux pointes faîtières de ces toits multiples. Il en va de même pour l’église roumaine que je découvre sur la page suivante. Et toujours je ressens cette impression de beauté maîtrisée par des hommes habiles, des artisans consommés, bref, de véritables artistes porteurs d’une très vieille tradition.

Un voyage au pays des merveilles

Avec l’ouvrage d’Olivier Veuve et de son complice Pierre Grandjean, j’ai fait un magnifique voyage; un périple vers des endroits inattendus ou l’extraordinaire le disputait au merveilleux. J’ai frissonné devant la Tour des Sorciers, à Sion, passé le Pont-qui-branle à Épagny en Gruyère, sans parler du Grand Chalet de Rossinière dans le Canton de Vaud. Je suis allé en quelques photos de la Norvège au Japon en passant par les Balkans et le piémont de l’Himalaya. Sous toutes ces latitudes je n’ai vu que des chefs-d’œuvre couverts de bardeaux.

J’ai constaté que des architectes modernes – et pas des moindres! – redécouvraient la technique ancienne des couvertures en tuiles de bois et la remettaient, avec talent, au goût du jour. En refermant cet album, j’ai eu envie d’aller voir ces constructions de plus près, pour rien, pour le plaisir… pour simplement admirer de quoi les humains sont capables dans le registre de la beauté, avec dans la tête ce vieux refrain: «Murs blancs, toits de bardeaux…»

‘Tavillons et bardeaux’ par Olivier Veuve et Pierre Grandjean, Editions Favre, Lausanne, 168 pages.

Un bardeau est un petit élément de revêtement permettant de protéger des intempéries les toitures et les façades.

En Suisse, en Franche-Comté, dans les Pays de Savoie et à la Réunion, les bardeaux sont de petites plaques en bois, découpées en différents formats, appelées tavaillons en France et tavillons en Suisse Romande lorsque celui-ci est découpés en un petit format.

En France et en Amérique du Nord, le bardeau est aussi une plaque en composite bitumé, aussi appelée shingle, bardeau canadien ou bardeau d’asphalte.

Tiré de Wikipédia

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