A 80 ans, Claude Nicollier reste fidèle à l’espace
(Keystone-ATS) Premier astronaute suisse, Claude Nicollier fête ce lundi ses 80 ans. Il n’est toutefois pas encore prêt pour la retraite. Il essaie plutôt de transmettre sa passion pour l’espace aux jeunes générations.
« Les expériences que j’ai vécues en tant qu’astronaute ont été incroyablement profondes. Quand on a vécu quelque chose d’aussi extraordinaire, on ne peut pas le garder pour soi », a indiqué Claude Nicollier lors d’un entretien avec Keystone-ATS.
Aujourd’hui encore, le Vaudois donne quelques cours aux étudiants des écoles polytechniques fédérales de Lausanne et de Zurich, et également aux nouveaux astronautes de l’Agence spatiale européenne (ESA). Parmi eux figure le Biennois Marco Sieber, qui suivra ses traces dans les années à venir et sera le deuxième Suisse à aller dans l’espace.
Des images claires dans la tête
Claude Nicollier jette un regard nostalgique sur son temps passé dans l’espace. Il repartirait immédiatement s’il en avait la possibilité, mais pas en tant que touriste de l’espace: « J’aime faire des choses qui ont un sens, pas seulement pour m’amuser. Je veux faire une différence ». C’est ce qu’il a fait lors de ses vols spatiaux. « En explorant l’espace, nous élargissons les connaissances de l’humanité », dit-il.
Au total, Claude Nicollier a passé environ 1000 heures dans l’espace lors de différentes missions. « J’en ai encore des images très nettes dans la tête », déclare l’astronaute: « On peut certes regarder des photos ou des vidéos, mais ce n’est pas la même chose que de le vivre soi-même ».
Le Suisse se souvient particulièrement de sa rencontre avec le télescope spatial Hubble: « Quand j’ai touché le télescope pour la première fois avec ma main, c’était une sensation très spéciale ». Pour réparer Hubble, il a été le premier astronaute européen à entreprendre une sortie extravéhiculaire – avec succès. A la fin de la mission, le télescope fonctionnait à nouveau. Aujourd’hui encore, il fournit des données importantes à la science.
« On voit les cicatrices »
Voir la Terre de l’espace l’a profondément marqué et a changé sa vision du monde. « Depuis l’espace, on voit à quel point la Terre est fragile. On voit les cicatrices que l’homme laisse sur la planète. Les incendies de forêt et la déforestation, notamment, sont très visibles », souligne l’astronaute.
« En voyant cela, j’ai eu le sentiment profond que nous devions protéger cette planète très particulière, car nous savons que c’est le seul endroit où nous pouvons vivre pour le moment dans notre système solaire », ajoute-t-il.
Il est certes possible que des hommes puissent vivre à l’avenir pendant un certain temps sur Mars ou sur d’autres planètes, mais il ne croit pas qu’il y aura un jour de grandes colonies en dehors de la Terre. Du moins pas dans les prochaines décennies.
Il se dit « modérément optimiste » pour l’avenir de la Terre: « Au moins, nous avons maintenant conscience qu’il faut faire quelque chose. Cela n’était pas encore le cas il y a 50 ans ».
« J’aurais aimé aller sur la lune »
Depuis l’engagement de Claude Nicollier dans l’espace, les missions spatiales sont devenues nettement plus longues. « Mes missions ont toujours été courtes. En général, dix à douze jours. Et ceux-ci étaient remplis de dur labeur », précise-t-il.
Sur la Station spatiale internationale (ISS), où les missions durent en général six mois, il en va autrement: « J’aurais aimé rester plus longtemps dans l’espace, non seulement pour profiter de la vue, mais aussi pour découvrir ce que c’est que de vivre dans cet environnement pendant une longue période ». Son successeur aura cette possibilité.
Il aurait également aimé vivre une autre expérience que les astronautes auront bientôt à nouveau l’occasion de faire. « J’aurais aimé aller sur la Lune. Mais il n’y a pas eu de mission lunaire lorsque j’étais astronaute actif », regrette le Veveysan.
Un rêve inaccessible
Pendant longtemps, le rêve de devenir astronaute lui a semblé irréaliste. « A l’époque, l’espace était partagé entre les Soviétiques et les Américains », explique-t-il. Au lieu de cela, Claude Nicollier a étudié l’astronomie et la physique, a suivi une formation de pilote militaire et civil et a fini par occuper un poste au centre de recherche et de technologie de l’ESA aux Pays-Bas.
Lorsque la possibilité de devenir astronaute a été ouverte aux Suisses pour la première fois, il a saisi sa chance et déposé sa candidature à l’ESA. C’est ainsi qu’il a fait partie du premier groupe d’entraînement et est parti aux Etats-Unis en 1980 pour suivre sa formation de spécialiste de mission sur la navette spatiale. Entre 1992 et 1999, il effectuera quatre vols avec quatre navettes spatiales différentes.