A Hong Kong, fuite spectaculaire de manifestants assiégés par la police
(Keystone-ATS) Des dizaines de manifestants hongkongais assiégés par la police dans un campus ont réussi lundi soir à s’enfuir. Pékin a de son côté de nouveau menacé d’intervenir pour régler la crise politique dans le territoire autonome du sud de la Chine.
Retranchés dans l’Université polytechnique (PolyU), actuel bastion de la contestation, ces protestataires sont descendus en rappel d’une passerelle. Ils ont ensuite été récupérés sur une route en contrebas par des personnes à moto.
Les heurts se sont poursuivis dans la nuit de lundi à mardi, alors que la police menace désormais d’utiliser des « balles réelles » face aux « armes létales » des manifestants radicaux, qui ont jeté briques et cocktails Molotov contre les forces de l’ordre. Dans une tactique apparemment coordonnée, des dizaines de milliers de personnes ont afflué vers le campus universitaire pour tenter d’en rompre le siège. Des affrontements avaient lieu aux alentours.
Des dizaines de personnes restaient sur le campus dans la nuit, a déclaré un des protestataires. Des manifestants mineurs ont cependant été autorisés à partir.
Plus tôt lundi, la police avait arrêté des dizaines de manifestants aux abords du campus – frappant certains d’entre eux avec des matraques alors qu’ils étaient au sol. La police a qualifié le campus de « zone d’émeute ». Or la participation à une émeute est passible de 10 ans de prison.
Violence « inacceptable »
Jugeant la violence « inacceptable d’où qu’elle vienne », le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo a estimé lundi qu’il incombait au gouvernement de Hong Kong de « rétablir le calme » dans le territoire, en prenant notamment « des mesures claires pour répondre aux demandes de l’opinion ».
L’Union européenne a de son côté souligné, par la voix de la cheffe de la diplomatie Federica Mogherini, que les actions des forces de l’ordre « doivent rester strictement proportionnées et les libertés fondamentales, y compris le droit de réunion pacifique des Hongkongais, doivent être respectées ».
Soldats chinois dans les rues
La mobilisation en cours dans l’ex-colonie britannique depuis plus de cinq mois a basculé la semaine dernière dans une phase beaucoup plus radicale et violente. L’exécutif hongkongais, qui est aligné sur Pékin, s’est refusé à accéder aux revendications des manifestants. Ceux-ci demandent notamment l’avènement du suffrage universel dans la mégapole de 7,5 millions d’habitants et une enquête sur ce qu’ils présentent comme des violences policières.
La Chine a maintes fois averti qu’elle ne tolérerait pas la dissidence. Et l’inquiétude monte face à l’éventualité d’une intervention pour mettre fin à la crise.
Des soldats de l’armée chinoise, présents à Hong Kong depuis la rétrocession de l’ex-colonie en 1997, sont sortis ce weekend de leur caserne pour déblayer certaines rues de leurs barricades. Une apparition rarissime qui a encore alimenté l’hypothèse d’une opération militaire.
Et l’ambassadeur de Chine au Royaume-Uni a donné lundi du crédit supplémentaire à cette option. Si la situation « devenait incontrôlable, le gouvernement central ne restera certainement pas les bras croisés. Nous avons la résolution et le pouvoir suffisants pour mettre fin aux troubles », a-t-il menacé.
Flèche et balles réelles
La contestation était montée d’un cran lundi dernier à Hong Kong avec une nouvelle stratégie baptisée « Eclore partout », qui consiste à multiplier les actions – blocages, affrontements, vandalisme. Conséquence: un blocage quasi-général des transports en commun la semaine dernière. Cette stratégie a eu pour effet d’ancrer la contestation dans plusieurs lieux comme les campus.
Cette nouvelle phase a été marquée par une aggravation de la violence des deux camps. Un policier a été blessé à la jambe dimanche par une flèche tirée par un manifestant. La police dit quant à elle avoir tiré lundi trois balles près du campus, en précisant que personne n’avait été blessé.
Les protestataires entendent poursuivre les blocages pour « étrangler l’économie » d’un des principaux centres financiers de la planète, désormais en récession. Victoire très symbolique pour les manifestants, la Haute cour a jugé lundi anticonstitutionnelle l’interdiction du port du masque qui avait été décidée par le gouvernement pour désamorcer la contestation.