Quelle direction la politique économique suisse doit-elle prendre?
Après l'investiture de Donald Trump aux États-Unis, le monde entier redoute des guerres commerciales et des droits de douane protectionnistes. Interview du conseiller fédéral Guy Parmelin sur la place de la Suisse dans cette situation économique incertaine.
Aucune décision n’a encore été prise dans ce sens au cours des premiers jours de la seconde présidence de Donald Trump, mais l’incertitude est palpable – même au Forum économique mondial de Davos.
SRF News: Monsieur le Conseiller fédéral, la Suisse signe deux accords de libre-échange au WEF de Davos – avec le Kosovo et avec la Thaïlande. Quelle importance ont-ils pour la Suisse?
Guy Parmelin: Ils sont importants, ils nous permettent de nous diversifier.
On oublie à chaque fois que les accords de libre-échange n’apportent pas seulement des avantages douaniers, mais aussi une certaine sécurité juridique pour les entreprises. Si tout est stable, c’est positif.
Le 22 janvier, le ministre de l’Économie Guy Parmelin et le Premier ministre kosovar Albin Kurti ont conclu un accord de libre-échange entre le Kosovo et les Etats de l’AELE. En font partie, outre la Suisse, l’Islande, le Liechtenstein et la Norvège.
La Suisse est l’un des principaux partenaires commerciaux du Kosovo. Albin Kurti qualifie cet accord de bonne nouvelle et rappelle que son pays a une balance commerciale positive avec la Suisse – c’est-à-dire qu’il exporte plus qu’il n’importe. Cela est surtout lié aux services dans les domaines de l’informatique et de la communication. Ainsi, des entreprises suisses ont délocalisé leurs centres d’appels au Kosovo, ou des entreprises kosovares se chargent du développement de logiciels. Albin Kurti se réjouit donc que le secteur des services fasse également partie de l’accord de libre-échange.
Il espère que les entreprises suisses investiront davantage au Kosovo grâce à l’accord. Le Kosovo a beaucoup à offrir: «Les coûts de l’électricité et de la main-d’œuvre sont bas. Il n’y a pas de taxes sur les exportations, les machines ou les matières premières». De plus, de nombreuses et nombreux Kosovars sont bien formés et parlent souvent plusieurs langues. A cela s’ajoutent les liens personnels au sein de la grande diaspora. Tout cela rend le Kosovo économiquement intéressant pour la Suisse.
L’investiture du président Donald Trump plane comme une ombre sur le WEF de cette année. On sent la peur du protectionnisme et de la hausse des droits de douane. Considérez-vous le président Trump plutôt comme un risque ou comme une chance pour l’économie suisse?
Il est encore trop tôt pour le dire. Nous voulons d’abord voir concrètement quelles décisions le président Trump va prendre. Nous voulons bien sûr prendre contact le plus rapidement possible avec les nouveaux ministres qu’il a nommés. Après, nous ferons le bilan pour voir si nous constatons des effets directs ou secondaires.
Les États-Unis sont le principal partenaire commercial de la Suisse, qui est un pays exportateur. Pourtant, il n’existe pas d’accord de libre-échange avec les Etats-Unis. Allez-vous entamer des discussions avec la nouvelle administration Trump?
Nous avons déjà essayé deux fois. Mais cette fois encore, il faut d’abord voir quelles sont leurs intentions. L’administration Biden ne voulait pas d’accord et a clairement dit que nous pouvions avoir des discussions sectorielles. Dans certains secteurs, nous avons trouvé une situation gagnant-gagnant. Maintenant, nous devons voir avec le nouveau ministre du commerce si c’est possible ou non pour la Suisse.
La dernière fois, un accord de libre-échange a également échoué à cause de l’agriculture. Vous avez une formation d’agriculteur. Quel est votre avis sur la question? Les protestations des agricultrices et agriculteurs suisses seraient-elles trop importantes cette fois encore?
Il est beaucoup trop tôt pour le dire. Il faut d’abord mener des discussions exploratoires. Nous voulons absolument sentir en détail les intentions des Etats-Unis. Et après, nous déciderons si c’est une chance ou non. L’agriculture est un point central pour nous, mais dans un accord de libre-échange, il y a aussi d’autres points, par exemple la propriété intellectuelle. C’est important, pour notre secteur pharmaceutique par exemple.
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Le monde menace de se diviser en blocs. L’Europe cherche sa place entre les États-Unis et la Chine. Mais la Suisse a également réussi à conclure un accord de libre-échange avec l’Inde. Le libre-échange est-il votre moyen de renforcer l’économie suisse?
C’est un moyen de nous diversifier. Vous avez parlé de l’Inde. C’est très important. Il y a là-bas 1,4 milliard de personnes, dont beaucoup de jeunes. Ce sont de nouvelles opportunités et de nouveaux marchés qui s’ouvrent à notre économie. Maintenant, nous voulons aussi discuter avec d’autres pays et avec nos partenaires de l’AELE.
Comment la Suisse doit-elle se positionner économiquement dans cette situation mondiale instable?
Nous sommes un pays neutre. Nous n’appartenons à aucun bloc. Cette politique de bloc et le blocage au sein de l’Organisation mondiale du commerce sont des problèmes pour la Suisse. C’est la raison pour laquelle nous devons mettre en avant nos atouts. En faisant preuve d’agilité et en nous diversifiant. Ce n’est pas facile, mais c’est la seule possibilité pour la Suisse d’avancer positivement vers l’avenir.
Traduit de l’allemand à l’aide de DeepL par Emilie Ridard
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