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Pour 2019, la «douloureuse» le sera un peu moins

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Depuis une vingtaine d’années, personne n’a été capable de proposer un remède efficace pour contenir l’explosion des coûts de la santé en Suisse. © KEYSTONE / ALESSANDRO CRINARI

C’est une tradition à chaque fin septembre: le ministre en charge de la Santé annonce la hausse des primes d’assurance maladie pour l’année suivante. Cette fois, Alain Berset a fait quelques heureux.

La hausse sera moindre que celles des années précédentes: 1,2%Lien externe en moyenne nationale, et même des baisses selon les cantons puisque la fourchette va de -1,5 à +3,6%.​​​​​​​ Concrètement, mieux vaut habiter en Appenzell Rhodes-Intérieures ou à Uri (les deux cantons où les primes vont baisser) qu’en Valais, à Neuchâtel ou dans le Jura , où la hausse sera la plus forte. 

Ce chiffre de 1,2% est dû en partie à un nouveau mode de calcul, qui prend en compte la croissance moyenne de toutes les primes. Si l’on réfère à l’ancien système, qui se basait sur les seuls tarifs standard, la hausse 2019 serait de 2,7%. La bonne nouvelle est pour les jeunes de 18 à 26 ans, 650’000 personnes qui en vertu d’une décision du parlement payeront en moyenne 15,6% de moins que cette année, soit des réductions individuelles de 50 à 70 francs par mois, décidées afin d’alléger les budgets des familles.

Les coûts ont doublé en vingt ans

Même si elle est plus modérée que celle des trois dernières années, cette nouvelle augmentation va encore alourdir le fardeau des primes maladie pour la majorité des assurés. Depuis l’introduction de l’assurance obligatoireLien externe pour les soins de santé, les primes ont augmenté de 4% par année en moyenne. En 1996, le tarif standard – avec une franchise ordinaire et la couverture accidents – était en moyenne de 170 francs par année pour un assuré de plus de 26 ans, alors qu’il dépasse aujourd’hui les 450 francs. Plus d’un quart des assurés sont contraints de demander des subventions étatiques pour payer leurs primes.

Cette croissance galopante des primes de maladie reflète clairement l’explosion des coûts de la santé en Suisse. En vingt ans, les dépenses globales ont plus que doublé, passant de 37,5 milliards de francs en 1996 à plus de 80 milliards en 2016. Une augmentation nettement disproportionnée par rapport à celles du Produit intérieur brut (PIB) et des salaires sur la même période, comme le montre le graphique ci-dessous.

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Cette explosion des coûts de la santé est liée en bonne partie à l’évolution démographique. Il y a seulement 20 ans, l’espérance de vie était de 82 ans pour les femmes et de 75 ans pour les hommes, alors qu’elle aujourd’hui passée à plus de 85 ans pour les femmes et 81 ans pour les hommes. Le vieillissement de la population a un impact majeur sur les coûts, vu que les assurés âgés ont davantage recours aux prestations médico-sanitaires.

Toutefois, la forte croissance des dépenses de santé est également due à un certain nombre d’autres facteurs. Parmi eux, le haut niveau des soins médicaux, qui comptent parmi les meilleurs au monde. Il y a également le niveau de vie élevé, qui pousse les entreprises pharmaceutiques et les autres fournisseurs de biens de santé à imposer sur le marché suisse des prix plus élevés que ceux pratiqués dans presque tous les autres pays. Selon les données de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la Suisse figure ainsi au second rang des pays où les dépenses de santé sont les plus fortes par rapport au PIB, derrière les Etats-Unis. 

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Les augmentations n’épargnent pratiquement aucun secteur. Par exemple, le coût des visites médicales a fait un bond de 31,6% entre 2010 et 2015, bien que le nombre de consultations soit resté pratiquement constant durant cette période. Les traitements en hôpital coûtent 23% de plus, principalement en raison de l’augmentation du nombre de patients de plus de 70 ans. Et l’augmentation des coûts des traitements ambulatoires des hôpitaux est de 30%. En 2016 (dernières données disponibles), les coûts de la santé se répartissaient comme suit. 

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La hausse des coûts est également due à l’incapacité du monde politique à lancer une réforme du système sanitaire capable de réunir une majorité de consensus au parlement ou devant le peuple. La recherche d’un compromis est entravée par la multiplicité des groupes d’intérêt et la forte influence des différents lobbies au Parlement. Il n’y a pas un autre secteur que celui de la santé où autant de parlementaires ont des liens avec des entreprises, des assurances, des associations, etc.

Depuis des années, et on l’a encore vu au cours de la présente session d’automne des Chambres fédérales, les parlementaires se limitent à faire des propositions marginales, qui ne permettent pas d’attaquer les maux du système sanitaire à la racine. Par contre, les initiatives populaires dans ce domaine se multiplient. Deux ont été lancées l’année dernière, dont une demande «un parlement indépendant des caisses maladieLien externe». Et dans un proche avenir, on attend celles des démocrates-chrétiens et des socialistes.

De son côté, le gouvernement a mis en consultation il y a quelques jours un nouveau paquet de mesuresLien externe destiné à contenir les coûts de la santé. Le Conseil fédéral veut en particulier réduire le coût des médicaments, en introduisant des prix de référence pour les médicaments dont le brevet a expiré, et forcer les fournisseurs de prestations de santé à envoyer aux assurés une copie de chaque facture, afin d’améliorer le contrôle.

Reste à voir si ces propositions passeront l’obstacle parlementaire ou populaire. Au cours des 20 dernières années, les citoyens ont repoussé au moins cinq initiatives sur le système de santé, ainsi qu’un contre-projet et une modification de la loi sur l’assurance obligatoire.

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