Sauvetage de la Grèce: accueil prudent de la presse
Le plan de sauvetage des pays de la zone euro en faveur de la Grèce laisse les commentateurs de la presse suisse assez sceptiques. Ils constatent certes que la pression sur le pays a pu être un peu diminuée. Pour autant, ils considèrent que l’énorme problème de la dette n’est en rien réglé.
Après 7 heures de réunion, les 17 leaders de la zone euro se sont entendus à l’unanimité jeudi pour un nouveau paquet de 109 milliards d’euro d’aide à la Grèce. Ce plan est accompagné de nouvelles conditions, parmi lesquelles la participation des banques au sauvetage sur une base volontaire, une augmentation de la durée des prêts de 7 à 15 ans et une baisse de taux d’intérêt de 4,5% à 3,5%.
Le quotidien populaire alémanique Blick résume assez bien l’avis général de la presse suisse face à ce plan en titrant «Un signal positif, mais pas une libération».
Fonds monétaire européen
Les commentateurs sont en premier lieu satisfaits que les pays européens soient parvenus à se mettre d’accord pour empêcher le naufrage définitif de la Grèce, ce qui aurait eu des répercussions négatives pour l’ensemble de l’économie. La solidarité européenne pourrait même être porteuse d’avenir, avec la création d’une sorte de Fonds monétaire européen.
«Les chefs des pays de l’euro forment, pas après pas, le gouvernement économique voulu par Sarkozy, note le quotidien bernois Bund. En même temps, l’actuel plan de sauvetage de l’euro est transformé en une sorte de fonds monétaire européen. Même si cela intervient un peu tard, l’Euroland s’arme enfin contre les attaques des spéculateurs.»
Le journal romand Le Temps part sur le même constat. Selon lui, l’idée de Jean-Claude Trichet, directeur de la Banque centrale européenne, de créer un ministère des finances de l’UE «a fait son chemin».
La décision européenne est d’autant plus à saluer que pour la première fois, les responsables politiques ont réussi à briser un tabou: celui de l’implication du secteur privé dans le plan de sauvetage. «C’était une situation qui avait longtemps été considérée comme devant être absolument à éviter, rappelle la Neue Zürcher Zeitung.
Mais certains commentateurs restent sceptiques face à la politique européenne. C’est ainsi, par exemple, que La Liberté s’émeut du rôle joué par la France et l’Allemagne. «La France et l’Allemagne méritent-elles de s’arroger le rôle d’arbitres de la zone euro alors que leurs taux de chômage sont parmi les plus élevés du continent?», se demande le quotidien fribourgeois.
Le risque reste élevé
En conclusion, les commentateurs constatent que si la décision de jeudi détend un peu la situation en Grèce, rien n’est réglé pour autant. A terme, le pays reste menacé de banqueroute. «Le résultat apparaît bien maigre en termes de tentative de ressoudage de la cohésion européenne car si le pacte franco-allemand sauve momentanément l’euro, il ne permettra pas à la Grèce d’éviter la banqueroute», note, pessimiste, La Liberté.
Par ailleurs, la Grèce ne représente pas le seul problème. L’Espagne, le Portugal et l’Irlande, et dans une certaine mesure aussi la France et l’Italie, sont également confrontés à des dettes colossales qu’il faudra bien un jour régler.
«L’insécurité sur le développement futur de l’euro reste élevée. Ce n’est qu’avec une intervention rapide et plus courageuse contre le surendettement de la Grèce que cette spirale négative aurait pu être évitée», conclut la Neue Luzerner Zeitung.
Le franc, valeur refuge
Les commentateurs n’abordent guère la question des conséquences du plan européen sur la Suisse. Un peu étonnant si l’on considère que la force du franc est devenue depuis quelques semaines un véritable thème politique qui est débattu presque chaque jour.
Le Blick fait partie des rares journaux commenter la situation du franc. Et selon lui, il ne faut pas s’attendre à de grand changement suite à la décision de jeudi. «La bourse a jubilé et l’euro repris quelques couleurs. Pourtant , la crise de la dette n’est pas terminée et le franc, en tant que valeur refuge, reste sous la pression de sa valorisation», conclut le grand quotidien populaire.
Les dirigeants de la zone euro ont annoncé un deuxième plan d’un montant de 158 milliards d’euros.
La répartition de la nouvelle aide à la Grèce comprend 109 milliards d’euros de prêts qui viendront de l’Europe et du Fonds monétaire international, le reste, environ 50 milliards d’euros, provenant d’une contribution du secteur privé créancier de la Grèce.
Sur ce dernier montant, 37 milliards viendront d’une «contribution volontaire» des banques créancières, tandis que 12,6 milliards consisteront en un rachat de dette sur le marché.
Sur plus long terme, les banques apporteront une contribution encore plus substantielle, chiffrée à 135 milliards par le président français Nicolas Sarkozy, un montant confirmé dans un communiqué distinct de l’Institut de la finance internationale, le lobby des grandes banques mondiales.
Il y aura quatre moyens de participer pour les détenteurs d’obligations grecques. Soit ils décident de garder la valeur faciale de leurs titres de dette, et dans ce cas ils peuvent les échanger contre un nouvel «instrument» avec une maturité de 30 ans, ou alors attendre qu’ils arrivent à maturité pour réinvestir dans cet instrument.
Source: ATS
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