La 5e Suisse se sent comme la 5e roue du char
Réuni vendredi à Lucerne, le Conseil des Suisses de l'étranger a dû faire cet amer constat: Berne tend à négliger de plus en plus ses citoyens expatriés. Ce manque de soutien engendre plusieurs problèmes, notamment les nouvelles menaces planant sur swissinfo.ch, le média consacré à la 5e Suisse.
Les problèmes évoqués à Lucerne ne sont pas franchement nouveaux, mais actuellement, ils semblent avoir une fâcheuse tendance à s’accumuler.
C’est ainsi que le Conseil de l’Organisation des Suisses de l’étranger (OSE) a une nouvelle fois déploré le démantèlement du service consulaire suisse. Mais en fait de démantèlement, il s’agit bien plus d’une réorganisation.
Depuis plusieurs années, le ministère suisse des Affaires étrangères (DFAE) tend à ouvrir de nouvelles représentations dans des pays émergents et au fort potentiel économique, comme la Chine et l’Inde. En contrepartie, il ferme des consulats dans les pays plus traditionnels.
Ambassadeurs mal-aimés?
Le problème, c’est que c’est justement dans ces pays que vivent de très nombreux Suisses de l’étranger. En Allemagne, par exemple, où le consulat de Hambourg fermera ses portes dans quelques semaines.
A Lucerne, l’OSE a rappelé à quel point ces consulats étaient importants pour les expatriés. «Il faut que l’on réalise l’importance des consulats jusqu’au plus haut niveau de la Confédération», a remarqué Jacques-Simon Eggly, président de l’OSE et ancien député. C’est la raison pour laquelle le Conseil a adopté une résolution en ce sens.
«Dans les discours du Premier Août, on dit souvent que les Suisses de l’étranger sont les meilleurs des ambassadeurs. Mais dans la réalité, les expatriés sont oubliés par la Confédération. Les Suisses de l’étranger sont-ils des ambassadeurs mal-aimés? Notre résolution a pour but de mettre un terme à cette contradiction entre le discours et la réalité», a déclaré la députée Thérèse Meyer-Kaelin.
Pour une information ciblée
Autre point qui chagrine les Suisses de l’étranger, le sort réservé aux médias qui leur sont consacrés.
Le premier problème concerne la Revue Suisse. Le DFAE a réduit d’un demi-million sa contribution à l’édition de ce périodique qui représente un pont entre les expatriés et leur mère-patrie. Résultat: la revue ne peut plus paraître que quatre fois par année au lieu de six jusqu’à présent.
Jugeant «irresponsable» la réduction du flux de l’information à destination de quelque 120’000 électeurs installés à l’étranger, le Conseil de l’OSE demande que le budget soit rétabli et que les parutions retrouvent leur rythme normal.
Le second problème concerne le site d’information swissinfo.ch. Là aussi, la menace provient de coupes budgétaires, principalement celles prévues par le diffuseur national SRG SSR idée suisse, dont fait partie swissinfo.ch.
Les participants au Conseil ont salué les deux fonctions clé de swissinfo.ch, à savoir l’information des expatriés, mais aussi des étrangers intéressés par la Suisse. C’est ainsi qu’un participant a remarqué que swissinfo.ch, seul média suisse à diffuser en arabe, pouvait apporter une contribution importante dans le cadre du débat sur l’initiative demandant l’interdiction de la construction de minarets.
Dans une résolution baptisée «pour une swissinfo forte et autonome», le Conseil de l’OSE demande donc que swissinfo.ch continue de recevoir les moyens nécessaires pour assurer sa mission. «L’OSE n’entend pas intervenir dans l’organisation interne de SRG SSR idée suisse, mais il est de première importance que les Suisses de l’étranger continuent de bénéficier d’une information ciblée», a précisé Jacques-Simon Eggly.
Le seul moyen de se faire entendre
Les représentants de la 5e Suisse ont encore déploré d’autres problèmes, comme le financement «aléatoire» des écoles suisses à l’étranger et la difficulté pour les jeunes expatriés d’obtenir des bourses pour venir étudier en Suisse. Là aussi, les doléances de la 5e Suisse ont fait l’objet de résolutions.
«Ces résolutions tapent toujours sur le même clou: montrer que la 5e Suisse est aussi importante pour la Suisse de l’intérieur, a expliqué Thérèse Meyer-Kaelin. Le Conseil de l’OSE n’a pas d’autre moyen pour faire entre sa voix. Mais c’est en tapant toujours sur le même clou que l’on obtient parfois le soutien du Parlement…»
Olivier Pauchard, Lucerne, swissinfo.ch
Près de 700’000 Suisses vivent à l’étranger.
Chaque année, 25’000 Suisses s’installent à l’étranger.
La majorité résident dans un pays européen.
Selon la Constitution fédérale, la Confédération a pour tâche de développer le lien entre la Suisse et ses citoyens à l’étranger.
Fondée en 1916, l’Organisation des Suisses de l’étranger (OSE) représente les intérêts de ce que l’on appelle la Cinquième Suisse.
Le Conseil de l’OSE s’est fixé six objectifs stratégiques pour la période 2009-2013.
Consolider le statut juridique et l’encadrement des Suisses vivant à l’étranger.
Développer et institutionnaliser leur participation politique.
Développer et étendre l’information des Suisses de l’étranger.
Créer sur Internet une Community des Suisses de l’étranger.
Renforcer et ancrer solidement les institutions suisses de l’étranger.
Positionner l’OSE en tant que centre de compétences pour toutes les questions les concernant.
En conformité avec les normes du JTI
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