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«Si on ne réforme pas le système de santé, on se dirige vers une médecine à deux vitesses»


À gauche comme à droite du spectre politique, les parlementaires estiment que le système de santé suisse doit être réformé. Les initiatives du Centre et du Parti socialiste, soumises au peuple le 9 juin, ne font toutefois pas l’unanimité. Nous en avons débattu dans notre émission Let’s Talk.

Face à la hausse constante des coûts de la santé, de plus en plus de personnes doivent se serrer la ceinture pour payer leurs primes d’assurance maladie. Sous la Coupole fédérale, les principaux partis politiques reconnaissent la nécessité d’agir, mais ne sont pas d’accord sur les solutions.

Les Suisses votent le 9 juin sur les propositions du Parti socialiste et du Centre visant respectivement à freiner l’augmentation des coûts de la santé et plafonner les primes maladie. L’initiative du Parti socialiste (PS) demande que les primes d’assurance maladie n’excèdent pas 10% du revenu des ménages.

La mesure coûterait entre 3,5 et 5 milliards de francs par année à la Confédération et aux cantons, selon les estimations de l’Office fédéral de la santé publique. «On demande à la Confédération de consacrer près de 10% de son budget aux subventions. Il faudra ainsi augmenter de 10% tous les impôts, ainsi que la taxe sur la valeur ajoutée (TVA)», met en garde Cyril Aellen, député du Parti libéral radical (PLR / droite), dans notre débat filmé Let’s Talk.

«Vous brandissez la menace de hausses d’impôts pour faire peur aux citoyens», rétorque le sénateur socialiste Baptiste Hurni. Il rappelle qu’un tel plafonnement des primes a déjà été mis en place dans le canton de Vaud, qui n’a pas dû procéder à des hausses d’impôts pour le financer. «La facture des coûts de la santé doit simplement être répartie différemment, car ce n’est plus supportable pour les ménages», affirme-t-il.  

Pour le député du Centre Benjamin Roduit, le texte du PS ne permet pas d’aider de manière assez ciblée les personnes qui parviennent difficilement à payer leurs primes. «Il y a 80% des personnes qui ont tout à fait les moyens de faire face à leurs dépenses de santé», affirme ce dernier.

L’initiative du Centre, «une coquille vide»

Le Centre a sa propre recette pour freiner les coûts de la santé: son initiative veut contraindre la Confédération à prendre des mesures dès que les dépenses de santé augmentent de 20% de plus que les salaires en une année.

>> Les coûts de l’assurance maladie augmentent plus vite que les salaires, comme le montre ce graphique:

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Baptiste Hurni considère que le texte du Centre manque de clarté, car il ne détaille pas les mesures concrètes à prendre pour faire baisser les coûts. «C’est le plus grand exercice de coquille vide politique de ces 20 dernières années», déclare-t-il. Le sénateur socialiste confie toutefois ne pas être farouchement opposé à l’initiative, mais il compte laisser son bulletin de vote blanc.

Cyril Aellen critique également la proposition du Centre. «Il s’agit d’une clause guillotine : on ne fait rien et, lorsque les coûts augmentent vraiment trop, on fait une coupe massive à la hache», dit-il.

Le député PLR soutient en revanche le contre-projet indirect à l’initiative du Centre, qui entrera en vigueur en cas de refus du texte. Celui-ci prévoit que le gouvernement et les cantons définissent des objectifs de maîtrise des coûts de l’assurance obligatoire des soins.

Benjamin Roduit balaie les critiques des autres partis. «Les mesures concrètes n’apparaissent pas dans le texte, car elles sont connues, mais il revient aux prestataires de soins de les mettre en œuvre», note-t-il. Il cite notamment l’augmentation de l’utilisation des médicaments génériques ou l’introduction du dossier électronique du patient.

Les ménages mis à rude contribution

L’une des particularités du système de santé suisse est qu’un quart des coûts repose sur les ménages. Cette proportion est supérieure à la moyenne des pays de l’Organisation de coopération et de développement (OCDE). Les coûts assumés par les individus sont trop importants, estime Baptiste Hurni : «Les primes d’assurance sont injustes, car elles ne sont pas adaptées au revenu des personnes assurées. En plus de cela, ces dernières doivent encore s’acquitter d’une franchise, payer de leur poche les soins dentaires ou encore l’ambulance.»

Cyril Aellen est, pour sa part, contre l’introduction de cotisations adaptées au revenu. «Une partie importante des coûts est déjà financée par l’impôt, ce qui est équitable. Il faut simplement venir en aide à celles et ceux qui ne peuvent pas payer leur part», considère-t-il.

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Maintenir la qualité des soins

En Angleterre, c’est le contraire: les gens ne paient pas de primes ou de frais médicaux, car le système est entièrement financé par des taxes. Jérémy Ramsden, un Suisse établi près de Londres, constate les failles de ce modèle: «Le système anglais engendre des problèmes de surconsommation de prestations médicales».

«À trop vouloir élaborer un système pour tout le monde, sans franchise ou quote-part, un système à plusieurs vitesses et engorgé a vu le jour en Angleterre», reconnaît Baptiste Hurni. Pour l’instant, il estime que la Suisse a réussi à maintenir une qualité des soins satisfaisante. «Le problème est que les gens n’ont plus les moyens de payer ce système», constate le sénateur.

«Il y a une part de responsabilité individuelle dans le système de santé», affirme Benjamin Roduit. À ses yeux, en Suisse aussi, il est essentiel de lutter contre les prestations superflues, ce qui permettrait de réduire les coûts de 20%. «Une chose est sûre: si on ne fait rien, on se dirige de plus en plus vers une médecine à deux vitesses», avertit-il.

Cyril Aellen se dit également attaché à la qualité des soins pour toutes et tous. «Cela ne doit toutefois pas être ‘open-bar’. Aujourd’hui, les personnes assurées peuvent consulter quand elles veulent et décider de faire deux ou trois fois le même examen. Il va falloir mettre fin à cela», dit-il.

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