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Unités spéciales de police: les «hommes de la première heure»

Un policier de l'unité spéciale Enzian participe à une simulation de crise en juillet 2009.
Un policier de l'unité spéciale Enzian participe à une simulation de crise en juillet 2009. Keystone/Marcel Bieri

Il y a 50 ans, les unités spéciales suisses de police voyaient le jour. Un commandant de police argovien a ouvert le bal.

Ils se font appeler «les hommes de la première heure». Il s’agit des participants aux premiers cours antiterroristes en Suisse, il y a 50 ans. Ces hommes ont ainsi posé la première pierre des unités spéciales comme Argus en Argovie, Barrakuda dans le canton de Bâle-Campagne ou Enzian dans le canton de Berne – les unités qui interviennent lorsque la situation devient critique.

«Auparavant, nous avions certes des policiers à de nombreux endroits, mais nous étions mal coordonnés entre nous», raconte Leon Borer, ancien commandant de police dans le canton d’Argovie. «Souvent, il s’agissait de postes individuels ou de postes à deux. Lorsque nous avions une intervention de grande envergure, nous devions rassembler des gens qui n’étaient pas du tout en phase les uns avec les autres. Cela représentait un grand risque pour tout le monde».

L’attentat de Munich a conduit à un changement de mentalité

Ce qui peut arriver lorsque la police n’est pas bien préparée s’est produit en 1972 à Munich, lors des Jeux olympiques. À l’époque, des terroristes palestiniens avaient attaqué l’équipe israélienne. Ce qui avait commencé comme une prise d’otages s’est terminé par l’assassinat de onze membres de l’équipe israélienne. Un policier et cinq preneurs d’otages ont également perdu la vie.

La police bavaroise n’a pas été à la hauteur de la situation. Grâce à la couverture médiatique, le monde entier a pu constater comment tout était allé de travers.

«On s’est alors rendu compte que la police n’était pas préparée à une telle attaque», explique Leon Borer. Les autorités suisses ont donc envoyé le jeune policier en Allemagne, où il a suivi une formation de trois mois au sein de l’unité antiterroriste GSG9.

La Suisse a créé des unités spéciales

Lorsque Leon Borer a remis son rapport au Conseil fédéral, il était clair que la Suisse aussi avait besoin de telles unités spéciales. Jusqu’alors, seule Berne disposait d’une telle troupe – l’unité spéciale Enzian.

Le commandant a mis sur pied un programme de formation. Il y a 50 ans, des instructeurs triés sur le volet et issus de toutes les polices se sont rencontrés à Isone, au Tessin, pour la formation de base. C’était la première fois qu’une telle formation avait lieu à l’échelle nationale. Selon Leon Borer, cela revêt une importance énorme, notamment lors d’interventions de grande envergure: «Tous les participants sont formés à la même tactique, ils parlent la même langue».

Les unités spéciales sont devenues la norme

L’importance des unités spéciales a été démontrée en 1982 lors d’une prise d’otages à l’ambassade de Pologne à Berne. «Lors de la remise du repas, les policiers ont fait entrer en douce une petite charge explosive avec du gaz lacrymogène. Grâce à l’effet de surprise, l’unité a pu prendre d’assaut le bâtiment immédiatement», raconte Leon Borer. «Les unités spéciales sont entraînées pour une telle approche tactique».

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Après une intervention réussie, la police bernoise emmène les preneurs d’otages. Keystone

Désormais, 28 unités spéciales sont actives en Suisse. Et ce, même si des critiques ont été émises à l’encontre de ces interventions – les membres de ces unités interviendraient trop durement. Les mauvaises langues parlent de «troupes Rambo».

Leon Borer ne veut pas laisser passer cette critique. «Bien sûr, les unités spéciales semblent fortement militarisées par leur tenue, mais elles sont parfaitement formées pour réagir de manière proportionnée. L’objectif est toujours de ne pas faire de victime».

L’unité spéciale argovienne Argus a déjà été jugée à plusieurs reprises. En septembre 2023, deux policiers ont été accusés d’abus d’autorité et de lésions corporelles. Cela parce qu’ils auraient manipulé assez durement un homme innocent lors d’une intervention à Hunzenschwil.

Cinq policiers bernois de l’unité spéciale Enzian doivent également répondre de leurs actes devant la justice. Il s’agit d’une intervention policière mortelle qui s’est déroulée en mai 2020. L’homme se serait tenu dans la pièce, l’arme levée, lorsque l’unité spéciale a fait irruption. L’un des policiers a tiré des coups de feu. Le Suisse de 44 ans est mort.

En 2021, l’intervention d’une unité spéciale de la police municipale de Zurich a suscité de nombreuses critiques. Les policiers en tenue complète sont intervenus lors d’une manifestation de femmes et ont arrêté plusieurs manifestantes. Ils auraient fait usage de spray au poivre à bout portant et se seraient montrés agressifs.

Les interventions antiterroristes sont rares en Suisse. Les unités sont surtout sollicitées pour des arrestations difficiles ou en matière de protection des personnes – par exemple lors du Forum économique mondial WEF à Davos.

Ce qui a commencé il y a 50 ans après l’attentat de Munich est aujourd’hui devenu incontournable dans le paysage policier suisse.

Traduit de l’allemand par Emilie Ridard à l’aide de DeepL.

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