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Aider l’Afrique à reconstruire son identité

Joseph Ki-Zerbo à Genève: «Il faut être avant d'avoir». swissinfo.ch

Le 1er «Salon africain du livre de la presse et de la culture» dévoile ses richesses à Genève, dans le cadre de la 18ème édition du Salon du livre.

La coopération suisse (DDC) soutien cette initiative qui s’inscrit pleinement dans ses objectifs prioritaires: la culture comme outil de développement.

Plus de 40 ans après les indépendances, l’Afrique reste le continent de toutes les dépendances.

«80% des budgets d’investissements de nombreux gouvernements sont alimentés par des fonds extérieurs. L’essentiel des manuels scolaires utilisés dans les écoles africaines est conçu et édité hors du continent. La plupart des études sur l’Afrique sont menée par des non-Africains», énumère Joseph Ki-Zerbo militant de la première heure de l’indépendance en Afrique.

«Même les budgets consacrés à l’éducation sont le plus souvent alimentés par les créanciers de la dette contractée par les Etats africains. Ce qui constitue une dépendance au carré», s’indigne l’historien burkinabé.

Pour sortir de ce cercle vicieux, les Africains doivent en premier lieu se forger une identité propre. «Il faut être avant d’avoir», résume l’auteur de A quand l’Afrique.

«Cette auto-construction doit répudier les ethnies et les frontières de mort tracées par les anciennes puissances coloniales», poursuit le prochain président du Burkina Faso, si l’on en croit le sociologue Jean Ziegler.

Un passage obligé

C’est à ce prix que l’Afrique pourra résister aux prédateurs qui continuent de piller son sol, aux réseaux corrupteurs qui manipulent encore nombre de chefs d’Etat africains, «des dirigeants dirigés», selon Joseph Ki-Zerbo.

«Après des siècles de désintégration, l ‘Afrique pourra ainsi définir des ensemble régionaux économiquement viables et des démocraties authentiques», espère ce sage de 82 ans.

Qui lance à son assistance réunie à Genève: «Aidez l’Afrique à se connaître elle-même.»

Un appel reçu 5 sur 5 par Walter Fust, directeur de l’agence helvétique de coopération (DDC). «En soutenant des projets culturels en Afrique, nous voulons permettre à la jeune génération (45% de la population africaine a moins de 15 ans) de se forger une identité».

«Pour bien comprendre une autre culture, il faut d’abord connaître la sienne», ajoute Walter Fust.

Une production foisonnante

Le 1er Salon africain du livre, de la presse et de la culture – soutenu par la DDC et la Francophonie – permet de constater que ce ressourcement est déjà bien entamé.

Des centaines d’ouvrages de romanciers, d’historiens, d’analyste et de journalistes garnissent en effet les rayons du salon africain.

«On le constate bien ici. En Afrique comme en Suisse, les écrivains peuvent jouer un rôle essentiel dans la définition des projets politiques», relève Nicolas Bideau, le responsable du tout nouveau Centre de compétences pour la politique culturelle du DFAE.

On y trouve les pionniers comme le Sénégalais Léopold Sédar Senghor ou le Camerounais Mongo Beti, tout comme les étoiles montantes, à l’instar de Boubacar Boris Diop et son dernier roman – Doomi Golo – écrit en wolof, une langue parlée dans toute l’Afrique de l’Ouest.

«Encore faut-il que cette langue soit enseignée dans les écoles. Ce qui n’est pas toujours le cas. Des millions d’Africains parlent le wolof. Mais ils ne savent pas forcément le lire», souligne Mutombo Kanyana, créateur, à Genève, de la revue Regards africains.

Un salon novateur

Quoi qu’il en soit, le salon africain contribue à faire connaître, et donc vivre, les auteurs du continent noir.

«Il existe d’autres manifestations littéraires africaines en France ou en Belgique. Mais ce salon africain est unique en son genre», ajoute Hervé Cassan, représentant permanent de l’Organisation de la francophonie à Genève.

De son coté, Pierre-Marcel Favre assure que l’expérience sera renouvelée les prochaines années. «Le financement est assure pour 3 ans», précise le patron du Salon du livre.

Qui conclut: «Les rencontres et les liens noués à Genève auront forcément des répercussions en Afrique même.»

swissinfo, Frédéric Burnand à Genève

Le 18e Salon international du livre, de la presse et du multimédia de Genève se tient jusqu’au 2 mai.
Elle se tient à «Geneva Palexpo» sur une surface de 30.000 m2, inclut 300 exposants et rassemble chaque année 110 à 120.000 visiteurs.

– Genève accueille son 1er Salon africain du livre, de la presse et de la culture.

– Il présente des centaines de livres majeurs de la littérature africaine.

– Plusieurs débats sont également organisés, dont un bilan sur la libéralisation des médias en Afrique (samedi a 17h) et une table ronde sur l’afro pessimisme (dimanche a 11h).

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