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Après Sierre, la BD s’installe à Lausanne

BD Fil: détail de l'affiche signée Tronchet. bdfil.ch

Expositions, stands, «concerts de dessin»... La 1ère édition du festival 'BD Fil' se tient à Lausanne, quartier du Flon, de vendredi à dimanche.

Une manifestation qui prend naissance sur les cendres de BD Sierre, mort au printemps dernier suite au désengagement de la commune.

Le quartier du Flon, à Lausanne vit jusqu’à dimanche son premier festival de bande dessinée, joliment nommé «BD-Fil». Une manifestation née dans une certaine urgence, sinon une urgence certaine: «Tout est allé très très vite, et c’est encore sous-estimer le mot ‘très’!» constate Pierre-Alain Hug, le directeur.

Pourquoi une telle pression? Parce que c’est en décembre 2004 que l’on a appris la mort probable de «BD Sierre», et que les délais ont donc été particulièrement serrés pour mettre sur pied un événement de cette dimension, dans une autre ville.

Rappel des faits: la bande dessinée avait poussé dans la cité valaisanne en 1984. Puis y a fleuri pendant 20 ans grâce à un festival annuel, mais aussi à un lieu permanent, le «Centre suisse de la bande dessinée». Fin 2004: la décision tombe, brutale: la Commune de Sierre ne soutiendra plus financièrement cette aventure, condamnant ainsi la manifestation.

Pierre-Alain Hug, qui fut directeur de BD-Sierre pour l’édition 2004, se souvient: «Sur le moment, quand on arrive avec le meilleur bilan financier depuis 10 ans et qu’on vous annonce la fin du festival, on est évidemment frustré. Mais c’était une décision prise par le milieu politique, elle était sans appel. Elle dénonçait un contrat en vigueur, qui avait été signé en janvier de la même année! On a seulement pu prendre acte d’une décision unilatérale.»

Cap sur Le Flon!

Frustration et déception pour les organisateurs, on s’en doute. Mais ce sont 14 propositions qui vont soudain débouler devant leurs yeux. Sierre détenait en suisse romande une sorte de monopole sur le 9ème Art. Le renoncement des autorités locales ouvrait soudain de belles perspectives à d’autres villes helvétiques.

Sur les quatorze propositions émises, cinq vont être retenues. Et Lausanne va finir par l’emporter. «Lausanne a souligné que la bibliothèque municipale avait le plus grand fonds de BD de Suisse, et que la ville avait donc une vraie légitimité à monter ce festival», explique Pierre-Alain Hug.

Lausanne, riche en BD, mais également une ville plus importante de par sa taille, et beaucoup mieux centrée en Romandie que Sierre. Et puis, Lausanne a un bijou qui s’appelle «Le Flon». Un quartier anciennement industriel devenu haut lieu de la vie artistique, nocturne et branchée du chef-lieu vaudois.

En passant de Sierre à Lausanne, comment le directeur résumerait-il ce qu’il perd et ce qu’il gagne?

«Avec Sierre, on perd une équipe, au sens large, qui entourait le festival, qui était extrêmement bien rodée, et bienveillante envers la bande dessinée. Quand la BD s’installe pendant 21 ans dans une ville comme Sierre, elle laisse des traces, des amitiés, et cela, c’est perdu. On perd aussi le caractère ‘bourgade’ du festival, et la montagne», répond Pierre-Alain Hug.

«A l’inverse, on gagne un cadre ‘lac’ avec Lausanne, et très urbain avec le quartier du Flon. On gagne une nouvelle équipe, extrêmement proactive au niveau culturel, tous azimuts. Avec nous, on a un collectif de courts métrages, un collectif d’architectes, plein de gens qui donnent un coup de main. Une équipe beaucoup moins rodée qu’à Sierre, qui s’est constituée très rapidement, mais au final, ces énergies ont permis de monter un festival impressionnant».

Et l’implantation dans le Flon est profonde: un magasin du quartier est chargé de tout le merchandising, les restaurateurs du Flon seront les seuls à approvisionner les festivaliers; cinéma, galeries, salles de spectacle et autres librairies de la place jouent également le jeu de la participation.

Trop de choses, mille sabords!

A Lausanne, on peut bien sûr acheter des livres grâce à la présence de grands éditeurs, mais aussi des représentants du circuit indépendant. Et parcourir forums, films, ateliers et cours de dessin.

Une douzaine d’expositions sont au menu. «Le coup de cœur, c’est Tronchet, auquel on consacre une rétrospective. Et je parlerais aussi d’un coup de cœur pour le magazine suisse alémanique ‘Strapazin’», s’enthousiasme Pierre-Alain Hug.

A noter aussi une exposition consacrée à «Fluide glacial» et une autre au manga japonais et au manhwa coréen. Les nouveaux talents sont également mis en valeur à travers les lauréats de deux concours, «BD-talent dessin», et «BD-talent scénario». Ils se verront également exposer aux festival d’Angoulême et d’Amadora, au Portugal.

Et puis la musique est de la partie, notamment à travers les «Concerts de dessins» que Zep, avec quelques confrères, a lancés en début d’année dans le cadre du Festival d’Angoulême, dont il était président pour cette édition. «C’est une très bonne entrée en matière pour quiconque ne connaît pas la BD!», constate Pierre-Alain Hug.

Qui précise: «Pour ceux qui connaissent, c’est un plaisir de reconnaître les traits des dessinateurs qui se succèdent. Mais pour ceux qui ne connaissent pas, ils peuvent découvrir huit styles différents qui défilent devant leurs yeux, un moment de magie qui dure 1h15 environ. C’est assez agréable de se laisser transporter sur ces coups de crayons, avec en l’occurrence le personnage de ‘Little Nemo’ comme thème».

Little Nemo, la célèbre bande dessinée créée en 1905 par Winsor McCay, il y a cent ans. Car le 9ème Art a aujourd’hui a une véritable histoire. Lausanne a peut-être un rôle à y jouer.

swissinfo, Bernard Léchot

La 1ère édition du festival ‘BD Fil’ se tient à Lausanne, quartier du Flon, du 2 au 4 août.
«BD Fil» est né suite à la mort de «BD Sierre»: la ville accueillait chaque année un festival de la bande dessinée depuis 1984.

Le programme de BD-Fil a été constitué sur trois axes:

– Le 9e Art, en tant que production artistique.

– L’actualité de la BD, tournée vers les auteurs, les éditeurs et leurs livres.

– La relève créatrice, au travers des concours internationaux ainsi qu’à travers des cursus d’apprentissage plus classiques comme les écoles.

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