Cinéma iranien: reflets des tensions sociales
Jusqu'au 10 février se tient à Téhéran le 19e «Fajr International Film Festival», qui a lieu chaque année à la veille de l'anniversaire de la Révolution islamique. Parmi les professionnels présents, Irene Bignardi, la nouvelle directrice du Festival international du film de Locarno.
Le festival du film de Téhéran est le meilleur moment pour voir le nouveau cru du cinéma iranien, dont la production annuelle moyenne est d’environ 60 films. Comme beaucoup d’autres responsables de festivals européens, américains et asiatiques, Irene Bignardi, qui a beaucoup fait ces vingt dernières années pour promouvoir le cinéma iranien en Occident, est venue «faire son marché».
«Cette année, le cinéma iranien se distingue surtout par des films à caractère social avec un regard très critique et une réalité très dure, constate-t-elle. Les films qu’on voit cette année peuvent très bien avoir été tournés dans d’autres pays, même s’il y a une charge de protestation plus importante et plus forte que par le passé. En ce sens, il y a une évolution et une recherche de nouveaux thèmes».
«Personnellement, le type de cinéma iranien que je préfère, c’est le cinéma plus poétique, plus néo-réaliste. Le cinéma de Kiarostami, Makhmabaf ou de Jalili», ajoute-t-elle, citant trois cinéastes qui ont reçu de nombreux prix ces dix dernières années dans les festivals européens.
En effet, la plupart des nouveaux films iraniens montrés au 19e «Fajr International Film Festival» de Téhéran se concentrent davantage sur les problèmes de la société urbaine iranienne, avec pour centres d’intérêts les relations homme-femme: polygamie, divorce et garde des enfants, donnés au père plutôt qu’à la mère selon la loi islamique. Ou encore la corruption et le problème des enfants des rues à Téhéran… Oubliés les films artistiques d’un Kiarostami, centrés sur la vie des enfants dans les campagnes iraniennes.
«L’un des principaux thèmes des films de cette année est sans doute l’accent mis sur le rôle de la femme, qui fait tout, qui conduit la famille, et se bat pour elle dans toutes les situations. Je pense par exemple au film de la réalisatrice Rakhshan Bani Etemad, «Sous la peau de la cité», qui raconte le combat d’une mère de famille. C’est d’autant plus important que la femme a une position très importante et très compliquée dans la société iranienne», commente Irene Bignardi.
Vingt-deux ans après la Révolution, le cinéma iranien se veut de plus en plus le reflet des dures réalités de la société iranienne d’aujourd’hui. Ce qui explique peut-être les très sévères critiques émises par les conservateurs.
Siavosh Ghazi, Téhéran
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