Court métrage et mémoire courte
Les courts métrages représentent une dimension importante de «Cinéma tout écran», dont la 9e édition se tient jusqu'à dimanche à Genève.
L’actrice française Maria Schneider est membre du jury de la compétition des courts. Il aurait été intéressant d’en parler avec elle…
Le Festival «Cinéma tout écran», voué principalement au film de télévision, a ouvert les portes de sa 9e édition lundi. A côté de la section-phare – les longs métrages en compétition – deux autres sections vivent, elles aussi, un concours: les séries télévisées et les courts métrages.
Cette année, on trouve 48 films courts en compétition, originaires des quatre coins de la planète. 48 films qui illustrent à la fois l’incroyable diversité que permet le genre, malgré les contraintes de la brièveté, et, presque toujours, le bouillonnement qui anime les jeunes cinéastes.
Car même si le court métrage est indéniablement un genre en soi, il représente la plupart du temps un galop d’essai pour les réalisateurs en devenir.
Drôle de jurée
Membre du jury, cette année: l’actrice française Maria Schneider. Maria Schneider, icône sulfureuse des années 70, grâce à son rôle torride dans «Le dernier Tango à Paris», Maria Schneider, qui malgré une carrière en dents de scie, a participé à quelques temps forts du 7e Art.
Que l’on pense à «Profession: reporter» d’Antonioni (1975), «Violanta» du Suisse Daniel Schmid (1977), «La Dérobade» de Daniel Duval (1979), «Bunker Palace Hotel» d’Enki Bilal (1989) ou, plus récemment, «Les acteurs», de Bertrand Blier (1999).
Rendez-vous a été pris en fin d’après-midi dans un hôtel genevois. Sourire, poignée de main. L’actrice s’enquiert à propos du média pour lequel elle va répondre à mes questions. Le mot «Internet» la fait se bloquer immédiatement.
Non, elle ne parlera pas. Car Maria Schneider n’aime pas l’outil ‘ordinateur’, ni les e-mails, ni le web, dit-elle. Bien. Mais est-ce une raison, parce qu’elle n’aime pas l’informatique, de priver de ses propos les lecteurs qui ne partagent pas son allergie? Pour elle, oui.
Et quand on fait remarquer à Maria Schneider qu’elle a le même comportement que quelqu’un qui, il y a 40 ans, aurait refusé une interview à la télévision pour cause de ‘nouveau média’, elle réitère sa décision de rester muette et se flatte d’être têtue.
Sensation bizarre que de voir un symbole de provocation se métamorphoser en conservatrice. Courte mémoire. A moins que sa réaction ne relève du caprice de star? Peut-être. Mais il est des caprices plus ‘glamour’.
Exit donc Maria Schneider. Et retour au présent.
Tour du monde express
Se plonger dans les courts métrages présentés à Genève, c’est réaliser un tour du monde cinématographique étonnant. Qui fait d’autant plus regretter que les télévisions d’ici et d’ailleurs négligent autant cet univers.
Le programme de ce mardi démarrait en Suisse, avec «A Mile to Midsummer» de l’Alémanique Alex Boutellier. Un récit campagnard et dépressif, faussement bucolique et vraiment cauchemardesque. L’histoire d’un ado, harcelé par ses copains buveurs de bière, qui, à bout de ressources, opte pour l’automutilation. Glauque et néanmoins stylé.
Escale ensuite par la Norvège, avec «United we stand» de Hans Petter Moland, dont l’humour voisin de l’absurde british tranche avec ce qui a précédé et fait s’esclaffer la salle.
Crochet par le Vietnam grâce à la production germanique «The shadow», de Robin von Hardenberg. Jeu d’ombres et film tout en regards, le cinéaste allemand s’est imprégné de l’âme asiatique au point de rendre lent un film de 19 minutes.
On passera encore par un délire autrichien, celui de Virgil Windrich, qui a rassemblé les extraits de 500 films pour en faire sa fiction à lui, «Fast Film». Clark Gable y côtoie Sean Connery, Frankenstein et les chars de Ben Hur, tout cela grâce à un montage trépidant et virtuose. Décoiffant.
Le voyage nous emmènera encore en Argentine, puis en Angleterre, et enfin en France, avec une petite chose drôle intitulée « Pacotille » et signée Eric Jameux.
Ou comment un modeste bijou gravé d’un «aujourd’hui plus qu’hier et moins que demain» suscite une montagne de malentendus au sein d’un couple. Incommunicabilité, quand tu nous tiens…
A propos d’incommunicabilité… Dans la soirée, alors que je suis assis, seul, à une table de restaurant, Maria Schneider passe à côté de moi, s’arrête un instant: «Sans rancune, hein?», me dit-elle gentiment.
Sans rancune, non, non. Mais avec juste un peu de stupéfaction.
swissinfo, Bernard Léchot, Genève
– La 9e édition du Festival «Cinéma tout écran» se tient à Genève jusqu’au 9 novembre.
– Vouée principalement aux films d’auteurs produits pour et par la télévision, cette manifestation propose également un vaste choix de courts métrages.
– En plus des 48 courts métrages en compétition, les spectateurs peuvent découvrir de nombreuses productions suisses, une sélection spéciale de films produits par la chaîne franco-allemande Arte, ou encore les premières oeuvres de David Lynch.
– Le film court est particulièrement à l’honneur à Genève lors des «Nuits du court métrage», le vendredi et le samedi au Cinéma Alhambra, dès 19h30 jusqu’à… tôt le matin!
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