Dans le sillage de Jo Siffert
La vie du coureur automobile Joseph Siffert, «Seppi» pour ses amis, est retracée dans un documentaire, actuellement dans les salles.
L’occasion de retrouver le sportif qui influença Steve McQueen pour sa prestation dans le film ‘Le Mans’, mais aussi une époque, les années 70.
«Initialement, j’avais l’intention de tourner un film qui retrace les années 70. Alors que j’étais en train d’élaborer mon projet, je suis tombé sur une biographie de Jo Siffert », explique Men Lareida, le réalisateur.
«Je l’ai lue et j’ai été immédiatement emballé! Une histoire extraordinaire. Je me suis dis qu’avec lui, la réalité était bien plus fascinante que la fiction ». Jo Siffert ou l’histoire d’un jeune homme issu d’un milieu modeste, qui devient champion des circuits de Grand Prix aux quatre coins de la planète, et décède à l’âge de 35 ans, en pleine course.
L’hommage à une icône nationale
Le film se situe à mi-chemin entre le portrait d’un héros et le documentaire historique retraçant une époque. Une époque où les pilotes courraient encore pour s’engouffrer dans leur bolide avant le départ des courses… Des hommes qui ne connaissaient guère le sens du mot «frein», ce qui avait pour conséquence de diminuer sérieusement leur espérance de vie.
Avec son film, Men Lareida, 37 ans, souhaite rendre hommage à une icône nationale, mais aussi à une époque chargée de souvenirs personnels.
«J’appartiens sans doute à la dernière génération qui a grandi sans la télévision. Mais ma grand-mère en possédait une et j’avais le droit d’aller chez elle pour voir les courses de Grand Prix. C’est ainsi que je suis devenu un grand fan de Formule 1, puisque c’était ma seule chance de voir la télévision!»
Il n’est pas impossible qu’une partie importante des spectateurs du film a fait partie des quelque 50’000 personnes qui avaient assisté aux obsèques de Jo Siffert, en 1971. Un record d’affluence qui n’a jamais été égalé en Suisse depuis lors.
Un fou d’adrénaline
Jo Siffert est né à Fribourg en 1936. C’est au cours de son adolescence qu’il contracte le virus de la course automobile. Une passion à laquelle il va consacrer tous ses efforts. Le documentaire, retrace la carrière de Jo Siffert, de sa naissance à ses succès automobiles, dont, évidemment, sa première victoire en 1968, au Grand Prix d’Angleterre.
«Jo Siffert: Live Fast, Die Young » n’est pas une œuvre critique. Tous les témoignages – des mécaniciens aux ex-épouses du pilote – ne tarissent pas d’éloges sur «Seppi». Des proches pour lesquels Jo Siffert était avant tout un homme charismatique et un fou d’adrénaline.
Un personnage «borderline»
Dans les quelques rares interviews données par Siffert, le coureur apparaît comme un personnage «borderline», introverti, et dont la seule raison de vivre était les bolides.
Au-delà de l’admiration du cinéaste pour le pilote, Men Lareida estime que Jo Siffert, n’aurait sans doute pas souvent la chance de grimper sur les podiums d’aujourd’hui.
«Maintenant, les pilotes sont des sportifs très performants, doublés d’excellents communicateurs en matière de technologie automobile. La force de Jo Siffert reposait sur son engouement et sa spontanéité, il montait dans une voiture et démarrait en trombe. Il serait sans doute trop impulsif pour cette même discipline aujourd’hui!»
«Être comme Jo Siffert»
Même si le Fribourgeois n’a fait qu’une brève apparition dans le long métrage «Le Mans», dans lequel Steve McQueen tenait le premier rôle, l’influence de Jo Siffert sur le travail de l’acteur américain a été considérable.
Au cours du tournage, la production avait demandé à Steve McQueen quel type de personnage il désirait incarner. «Je veux être comme Jo Siffert», avait répondu l’acteur. Un propos qui avait marqué les commentateurs sportifs de l’époque. Pour eux, Jo Siffert était résolument devenu le Suisse le plus «cool» de tous les temps.
Avec un travail de montage en «split screen», qui rappelle «Bullit» – un autre grand classique dans la filmographie de Steve Mc Queen – et une bande-son empruntées au début des années70, Men Lareida a pris un parti esthétique qui permet au spectateur de revivre cette époque, empreinte de liberté et d’insouciance.
Barrières linguistiques
«Jo Siffert: Live Fast, Die Young», dont le budget de tournage était modestement de 300.000 francs, est l’un des quatre films documentaires dont le succès commercial a été le plus important en Suisse en 2005. «Je suis très satisfait. Le film est sorti relativement tard et je pense que le résultat que nous avons atteint est très bon», se réjouit Men Lareida.
Pour ce qui est d’une éventuelle distribution à l’étranger, le réalisateur n’y est pas opposé, mais à son avis, le projet n’est pas très réaliste. «J’ai conçu ce film pour le marché suisse. Pour des questions d’ordre linguistique, il me paraît plutôt difficile à distribuer à l’étranger».
Recourir au doublage
Dans le film, on parle en dialecte alémanique, en français, en anglais et en italien, doublés en allemand. «Si le recours aux sous-titres est courant en Suisse, ailleurs cette méthode n’est pas particulièrement appréciée du public. Pour cette raison, la vente à l’étranger de mon film n’est pas très aisée».
Men Lareida rappelle par ailleurs que des chaînes de télévision, qui par le passé diffusaient fréquemment des œuvres sous-titrées, le font désormais de moins en moins: «Cela signifie que nous devrions recourir au doublage, ce qui est très coûteux».
«Cependant, le film a été très bien reçu en Autriche à la Viennale (le Festival international du film de Vienne) et, j’ai aussi été contacté par des distributeurs en Grande-Bretagne et en Allemagne. Finalement, il y a un peu partout des gens qui s’y intéressent!»
swissinfo, Thomas Stephens
(Traduction de l’anglais: Nicole Della Pietra)
Joseph Siffert, surnommé «Seppi», est né à Fribourg en 1936. Il est décédé en 1971.
Le pilote a pris part à une centaine de Grand Prix. Il a remporté deux victoires: le Grand Prix d’Angleterre à Brands Hatch en 1968 et le Grand Prix d’Autriche en 1971.
Jo Siffert a trouvé la mort sur le circuit de Brands Hatch, précisément. Le système de suspension de sa voiture s’était brisé.
Près de 50’000 personnes avaient assisté à ses funérailles à Fribourg.
– «Jo Siffert: Live Fast Die Young» est sorti en Suisse romande à la fin du mois d’octobre 2005 et en Suisse alémanique en décembre. A la fin de l’année, le bilan faisait état de 10’428 spectateurs.
– Le film suisse qui a remporté le plus grand succès en Suisse est «Les faiseurs de Suisses» (1978), qui a été vu par près d’un million de spectateurs dans les cinémas.
– En 2005, «Mein Name ist Eugen» a rassemblé 503.000 spectateurs dans les salles obscures.
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