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Des pionniers suisses chez les Indiens

Le chaman Elan Noir a appris à Alfred Vogel l'effet bénéfique de nombreuses plantes. swissinfo.ch

De belles histoires d'amitié et d'échanges culturels sont nées de la rencontre entre des Suisses et les Indiens d'Amérique. Une exposition en donne quelques exemples.

«Des pionniers suisses sur les terres des Sioux et des Crows» est à voir jusqu’au 3 septembre à Zurich.

En 1952, le célèbre herboriste suisse Alfred Vogel décide de partir quelques semaines pour un tour des Etats-Unis. Il a notamment l’intention de faire une étape dans la réserve de Pine Ridge, au sud du Dakota. Ce qui le pousse dans cette aventure, c’est le désir de connaître de nouvelles cultures, mais aussi son grand intérêt pour les plantes médicinales de la région.

Le hasard veut qu’il rencontre dans la réserve indienne un chaman de 90 ans, Ben Black Elk (Elan noir) de la tribu des Sioux Lakotas. Entre les deux hommes – qui partagent la même passion pour les plantes médicinales – le contact passe bien et la confiance réciproque est immédiate. A tel point d’ailleurs qu’Elan noir décide de révéler à Alfred Vogel son savoir sur les effets thérapeutiques des plantes, un savoir transmis depuis des générations au sein de son peuple.

Avant de retourner à Bâle, Alfred Vogel a l’occasion de tester personnellement les effets bénéfiques de l’échinacée. Il s’en sert en décoction pour guérir une grave blessure au pied. Sa guérison rapide le convainc des bénéfices de cette plante et il s’applique aussitôt à en tirer de nouvelles préparations dans son laboratoire.

Naissance de l’Echinaforce®

C’est ainsi que naît l’Echinaforce®. Commercialisé en 1963, ce produit reste aujourd’hui encore très populaire. Il est utilisé pour augmenter la résistance de l’organisme aux infections et pour exercer une activité immunostimulante et antivirale. Il possède également des propriétés anti-inflammatoires et antibactériennes.

Le Musée des natifs nord-américains de Zurich (NONAM) a voulu consacrer une exposition temporaire à ce pionnier herboriste. Elle est ouverte au public jusqu’au 3 septembre prochain.

On peut y voir les instruments de travail classiques ayant appartenu à Alfred Vogel (éprouvettes, mortiers pour la préparation des substances médicamenteuses, balances, herbes médicinales), mais aussi une série d’objets traditionnels que le médecin suisse a collectionnés durant ses voyages autour du monde. On y trouve également de veilles photographies où il apparaît en compagnie d’Elan noir.

«Sans prétendre représenter tous les Suisses qui se sont établis de l’autre côté de l’Atlantique, notre intention est de raconter l’expérience de quelques citoyens helvétiques qui ont été parmi les premiers à se rendre dans les territoires des Indiens d’Amérique», explique Monika Egli, assistante et ethnologue auprès du NONAM.

Une histoire comme tant d’autres

Outre la tranche de vie d’Alfred Vogel en terre américaine, les commissaires de l’exposition ont aussi voulu dédier une petite salle du musée à l’histoire d’une autre citoyenne suisse, Dorothee Jegen, de Klosters, dans le canton des Grisons.

Comme des dizaines de milliers de ses compatriotes, celle-ci a émigré aux Etats-Unis à la fin du 19ème siècle. «La Suisse était à l’époque un pays très pauvre qui n’offrait que peu d’emplois et où une grande partie de la population devait tirer le diable par la queue», souligne Monika Egli.

La jeune femme décide alors de s’établir avec ses deux frères Peter et Christian à Billings («Magic City»), dans l’Etat du Montana. C’est à cet endroit que les trois ouvrent une boulangerie et vendent leurs produits aux colons, aux nombreux ouvriers qui travaillent à la construction de la voie ferrée, aux chercheurs d’or et aux Indiens Crows qui habitaient la région.

Disposant de peu d’argent liquide, ces derniers payent souvent en nature, en échangeant les biens achetés contre des objets de leur fabrication, comme par exemple avec une paire de mocassins faits mains et exposés dans l’une des vitrines du musée.

Succès américains

La vie n’a pas toujours été simple pour les trois Grisons qui ont été catapultés de leur village alpin vers un pays étranger, où le danger était quotidien. Le pistolet exposé pour le NONAM, que la jeune Dorothee a dû apprendre à utiliser pour se défendre contre les bandits, constitue un exemple emblématique de cette situation.

Mais ces terres lointaines étaient également synonymes de fortune. Les trois Grisons y ont ouvert une importante chaîne de magasins et sont devenus une des familles les plus riches de la région.

Mariée à un autre émigré grison, Dorothee décide de retourner dans sa patrie. Ses deux frères, en revanche, préfèrent rester à jamais aux Etats-Unis. Actif dans la politique, Christian devient d’abord maire de Billings, puis sénateur du Montana. Exemple de l’un des ces «rêves américains» devenu réalité.

swissinfo, Anna Passera, Zurich
(Traduction de l’italien: Olivier Pauchard)

L’exposition «Pionniers suisses sur les terres des Sioux et des Crows» a lieu jusqu’au 3 septembre au Nordamerika Native Museum (NONAM), Seefeldstrasse 317, Zurich.
Heures d’ouvertures: de 13h00 à 17h00 le mardi, jeudi et vendredi, de 13h00 à 20h00 le mercredi et de 10h00 à 17h00 le week-end. Fermé le lundi.

– On compte aux Etats-Unis environ 1,2 million d’Américains qui ont des racines suisses.

– Beaucoup se sont rendus outre-Atlantique entre 1820 et 1890 pour y chercher fortune. Très pauvre, la Suisse n’offrait alors que peu de perspectives.

– Presque 175’000 Suisses ont débarqué aux Etats-Unis durant cette période.

– En 2005, on dénombrait 71’773 Suisses vivant aux Etats-Unis. Les deux-tiers possèdent la double nationalité.

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