L’art à Bâle, c’est bien plus qu’Art Basel
Art Basel s’ouvre jeudi, avec son cirque qui tourne principalement autour du marché de l’art. Cadre parfait pour des œuvres emballées, des acheteurs et des vendeurs, alors que les artistes n’y jouent au mieux que les seconds rôles. Pourtant, il n’en a pas toujours été ainsi.
Au départ, en 1970, Art BaselLien externe est une idée ingénieuse d’un groupe de galeristes pour réunir la plupart des différentes couches d’acteurs et d’agents dans le monde (et le marché) de l’art alors en pleine expansion.
Le succès est immédiat. En 1976 déjà, le nombre de galeries ayant le privilège d’un stand à la foire atteint sa limite, maintenue jusqu’à aujourd’hui aux alentours de 300 – cette année, elles sont 291. En 2017, ce sont 95’000 visiteurs qui ont erré en parcourant les 27’500 m2 de surfaces d’exposition.
Mais au fur et à mesure qu’Art Basel s’impose dans le circuit commercial de l’art, des initiatives parallèles commencent à fleurir autour de la manifestation principale, offrant des perspectives plus fraîches sur des artistes, des performers et des galeries plus jeunes. LISTELien externe, créée en 1995 par un groupe de 10 galeristes alors jeunes (avec des noms comme Peter Kilchmann et Eva Presenhuber de Zurich), occupe l’ancienne brasserie Warteck. En 1997, elle conclut un partenariat avec E. Gutzwiller & Cie, banque privée traditionnelle de la place.
Rien d’étonnant à ce que LISTE soit devenu rapidement un lieu «établi» pour les amateurs d’art les plus enthousiastes, pratiquement un appendice d’Art Basel. Plus récemment, en 2005, un groupe de marchands indépendants a créé VOLTALien externe – «la foire d’art de Bâle pour les nouvelles positions internationales». Ses fondateurs se donnent comme objectif d’«assurer une plateforme pour les galeries internationales au-delà de l’art jeune et vigoureux de LISTE et des poids lourds du marché d’Art Basel».
A quelques arrêts de tram de la foire, le Musée des Beaux-Arts de la ville (KunstmuseumLien externe) a la réponse pour ceux qui cherchent un antidote à l’aspect commercial d’Art Basel. Le Musée vient d’inaugurer l’exposition Black MadonnaLien externe de Theaster Gates, activiste-performer et urbaniste de Chicago, dont les œuvres affichent de hautes ambitions, comme l’amélioration des quartiers déshérités ou l’établissement d’archives de l’histoire culturelle afro-américaine. Ce que vous pourrez voir et vivre là-bas, c’est tout ce qu’Art Basel n’est pas.
Illimité
Pour en revenir à la foire, un large éventail d’œuvres trop grandes, trop conceptuelles ou trop éloignées des standards n’y trouvent pas leur place. Pour ces sculptures, projections vidéo performances ou peintures à grande échelle, Art Basel a créé UnlimitedLien externe (organisé par Gianni Jetzer, ancien directeur de l’Institut suisse d’art contemporain à New York).
La croissance en taille, en ampleur et en volume des ventes a fait qu’Art Basel ressemble de plus en plus à un grand marché ouvert, une juxtaposition confuse et écrasante d’œuvres qui se côtoient, sans espace visible pour la réflexion ou l’échange de vues et de positions entre les acteurs, les artistes et le public. Ce qui ne donne pas très bonne presse à un événement qui, malgré son caractère public, dépend du prestige de l’exclusivité que seul un groupe sélect de jet-setters, de créateurs de tendances, de fashionistas de haut vol et autres peut lui conférer.
Les expositions d’Art Basel comprennent quelques programmes spécifiques, en plus du noyau constitué par les stands des galeries: «Conversations» entend combler un fossé, avec des débats publics entre artistes, collectionneurs et curateurs, «Feature» apporte des projets d’artistes établis ou historiques, organisés par des galeristes, «Statements» présente des projets solos d’artistes émergents, en compétition pour le Prix d’Art de La Bâloise – le géant de l’assurance achète les œuvres des vainqueurs pour en faire don à différentes institutions artistiques européennes.
Avec ParcoursLien externe, Art Basel investit plusieurs lieux dans toute la ville avec des sculptures, des interventions et des performances spécifiques à chaque site. Son programme nocturne, qui se termine dans des fêtes ou des clubs, est très couru.
Sans oublier «Edition», l’endroit où l’on trouve de beaux ouvrages, des éditions spéciales et des publications rares. Oh… et il y a encore les films! Art Basel propose un programme de films expérimentaux sur une semaine, choisis par Maxa Zoller.
Mais tout cela, ou presque a un prix. Car Art Basel reste d’abord et avant tout une foire.
(Traduction de l’anglais: Marc-André Miserez)
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