La Scala de Milan revue par Mario Botta
Restaurée et flanquée de nouvelles bâtisses dues à l’architecte tessinois, la fameuse Scala de Milan rouvre ses portes après deux ans et demi de travaux.
L’opéra ainsi remis à neuf a été inaugurée mardi soir, jour de la Saint-Ambroise, patron de la cité lombarde.
On ne voit qu’eux. Presque un coup de poing dans l’œil. Accolés à la vieille Scala, conçue en 1776 par l’architecte romain Giuseppe Piermarini sur ordre de l’impératrice Marie-Thérèse d’Autriche et inaugurée en 1778, les édifices dessinés par Mario Botta laissent les Milanais de la rue plutôt pantois.
«On ne reconnaît plus la Scala» regrette un passant qui hoche la tête en observant les deux structures qui se détachent agressivement dans le ciel. D’autres sont enthousiastes et prennent des clichés, mêlés aux nombreux touristes qui affluent chaque jour au cœur de la métropole lombarde.
C’est vrai que la Scala revue par la star tessinoise de l’architecture n’est plus vraiment l’opéra qui, pendant plus de deux siècles, a fait le bonheur des mélomanes du tout-Milan et de tant d’autres.
«Une réalisation exemplaire»
La polémique qui a grandi autour du projet de Mario Botta – voulu et soutenu par le critique d’art Vittorio Sgarbi lorsqu’il était sous-secrétaire d’Etat aux biens culturels – commence seulement maintenant à se calmer. Répondant aux ultimes détracteurs, Vittorio Sgarbi a justifié le choix de l’architecte.
«La tour hélicoïdale de Mario Botta» a dit Vittorio Sgarbi en parlant de l’un des deux édifices ajoutés à la bâtisse originale, «est une réalisation exemplaire. On la voit de loin bien sûr et elle a été faite pour être vue mais elle est pure dans sa ligne et dans sa conception.»
La tour ronde de trois étages, typique du style de Botta et le cube, tous deux destinés aux bureaux, loges d’artistes, salles de répétition et cantine, sont les ajouts qui font de l’antique Scala, une nouvelle Scala, à l’empreinte suisse.
Botta aux côtés de Berlusconi et de Blair
Mario Botta en est fier. Au soir du mardi 7 décembre, aux côtés du premier ministre italien Silvio Berlusconi et de son homologue britannique Tony Blair, il sera un des hôtes de marque de la soirée d’inauguration.
«Ce n’est pas sûr, dit-il modestement, puisque 20’000 personnes se pressent pour 2000 places.» Mais le maire de Milan, Gabriele Albertini assure que l’architecte suisse sera de la fête.
«Ca m’est égal, admet Mario Botta. Je suis heureux d’avoir participé à cette aventure. La ville a besoin d’être repensée. En Europe nous sommes capables de le faire, sans détruire pour reconstruire comme cela se fait aux Etats-Unis.»
Mais la Scala nouvelle formule, ce ne sont pas seulement les espaces contemporains de Mario Botta.
L’antique salle réalisée par Giuseppe Piermarini a été revue et rénovée par l’architecte vénitienne Elisabetta Fabbri, qui a scrupuleusement respecté les dessins originaux du maître d’œuvre. La salle décorée de tentures rouge et or, a été restaurée en tenant compte des moindres détails de l’histoire.
La scène, cependant, a été entièrement reconstruite. Elle mesure maintenant 1600 m2 pour une profondeur de 70 mètres et une hauteur de 56 mètres. Trois fois plus grande que l’ancienne, elle pourra accueillir 115 représentations lors de la prochaine saison (80 auparavant) et jusqu’à 150 spectacles dans les prochaines années.
Le théâtre-opéra de la Scala prévoit d’augmenter le nombre des ses abonnés annuels des 4500 aujourd’hui à 9000 environ.
Recours rejetés
Et fi des polémiques, auxquelles le Tribunal administratif de la Lombardie (TAR) vient de mettre un terme définitif en rejetant une série de recours présentés en son temps par certaines formations de gauche et écologistes contre les travaux de restructuration.
Les autorités de Milan s’enorgueillissent de leur opéra nouveau look: «un grand projet artistique a été mené à bon terme» a dit Riccardo de Corato, vice-maire de la métropole.
«Comme beaucoup de Milanais, je me réjouis de franchir le sol de notre bonne vieille Scala, aussi rénovée soit-elle» lance Bruno Ferrante, préfet de Milan.
Après trois saisons lyriques célébrées bon gré mal gré au «Teatro degli Arcimboldi», en banlieue, la Scala s’apprête à vibrer aux sons de l’opéra «Europa riconosciuta» d’Antonio Salieri, dirigée par le chef d’orchestre Riccardo Muti. Cette même œuvre avait été exécutée en 1778 lors de l’ouverture du plus célèbre théâtre du monde.
swissinfo, Gemma d’Urso à Milan
Une foule d’invités ont participé à l’inauguration mardi soir. A côté du chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi, il y avait le président de la Confédération Joseph Deiss.
Les 2000 spectateurs ont ovationné debout le chef Riccardo Muti et les interprètes au terme de la représentation d’un opéra de Salieri.
– Le théâtre-opéra «alla Scala» de Milan a été construit, de 1776 à 1778 par l’architecte romain Giuseppe Piermarini sur mandat de l’impératrice Marie-Thérèse d’Autriche, après la destruction du théâtre Regio Ducale suite à un incendie.
– Le bâtiment a été édifié sur le site de l’église de «Santa Maria alla Scala», au centre de Milan
– La première restructuration de la Scala, 200 ans avant celle confiée à Mario Botta, a été réalisée, au début de 1800, par un autre grand architecte tessinois, Luigi Canonica, de Tesserete.
– Le 16 août 1943, en pleine Seconde Guerre mondiale, la Scala a été bombardée, partiellement détruite puis reconstruite. Les bombes ont dévasté aussi le Palais Royal et le Palais Marino, dans un rayon de 500 mètres. Elles ont même fait trembler faisaient trembler le Dôme tout proche.
– Les plus grands noms de la musique lyrique mondiale ont fait l’histoire de la Scala: de Gioachino Rossini à Giuseppe Verdi, de Gaetano Donizetti à Niccolò Paganini et Vincenzo Bellini.
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