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Locarno, un cinéma qui vise la réalité

La Piazza Grande est à nouveau ouverte aux milliers de spectateurs. Keystone Archive

Le 57e Festival international du film de Locarno, qui s’ouvre mercredi, sera ancré dans l’actualité.

La représentation du journalisme au cinéma et les grands thèmes politiques du moment traversent l’ensemble de la programmation.

Les 18 films présentés en compétition internationale cherchent tous à «décrypter le monde instable dans lequel nous vivons», souligne Irene Bignardi, directrice du festival. «Nous avons sélectionné les films qui nous parlent le mieux de notre époque.»

Ainsi, la production indienne Black Friday, en compétition internationale, reconstitue les attentats de Bombay de 1993 sous la forme d’une enquête journalistique.

Sur la Piazza Grande, Kongekabale s’intéresse aux intrigues secrètes entre la presse et la politique, Football Factory évoque la violence des hooligans anglais et The Hunting of the President retrace les manœuvres pour faire tomber Bill Clinton.

Le réalisateur qui informe

L’actualité s’infiltre dans toutes les sections du festival. La programmation en a même fait le thème de sa rétrospective 2004: «News Front», un éclairage sur la représentation du journalisme au cinéma.

Plusieurs chefs-d’œuvre y seront présentés, comme Citizen Kane d’Orson Welles (1941) ou L’Affaire Dreyfus de Georges Meliès (1899).

Plus récent, All the President’s Men d’Alan J. Pakula (1976), qui raconte le scandale du Watergate, sera projeté parallèlement sur la Piazza Grande. Et Carl Bernstein, qui a révélé l’affaire avec son collègue journaliste Bob Woodward, sera présent à Locarno.

Sur les pas de Michael Moore

Avec ce fil rouge, Locarno tombe pile dans l’air du temps et suit la tendance marquée par le succès populaire et la Palme d’Or à Cannes de Fahrenheit 9/11, le film de Michael Moore sur le président américain George Bush.

«Encouragé par l’actualité, le documentaire a fait un retour en force», commente Irene Bignardi, directrice du festival et ancienne journaliste.

«Nous avons commencé à préparer cette rétrospective il y a un an déjà. La Palme d’Or attribuée à Michael Moore nous a donné raison. Elle a démontré que nous avions choisi un thème important.»

A noter que le premier film du réalisateur américain, Roger et Moi, sera projeté dans le cadre de «News Front».

Moins américano-centriste

Autre ligne qui s’impose à Locarno au fil des ans: l’ouverture. Autrement dit, on s’éloigne de Hollywood ou, du moins, on va voir ailleurs.

Le choix du film rendant hommage à Marlon Brando, décédé cette année, va dans le même sens. Dans la filmographie de Marlon Brando, Queimada de Gillo Pontecorvo – qui sera lui-même à Locarno – «s’ancre dans une prise de distance envers Hollywood».

Même la Piazza Grande, tournée vers un cinéma grand public, suit cet adage. Dans le préambule à la présentation du programme, signé Irene Bignardi, l’allusion est claire.

«Il y a un cinéma qui est bien fait sans être artificiel, qui est grand public sans être à la mode, qui utilise un langage accessible sans tomber dans la banalité, qui génère des recettes sans en faire son but exclusif et qui se nourrit d’idées en plus d’action.»

Portes ouvertes au Mékong

«C’est le devoir d’un festival comme Locarno de parcourir le monde, pour en donner une représentation moins euro- ou américano-centriste», ajoute Irene Bignardi.

Après Cuba en 2003, Locarno s’ouvre cette année au Mékong. En collaboration avec le ministère suisse des Affaires étrangères, il présente une série consacrée aux films du Cambodge, du Laos et du Vietnam, avec notamment la projection de trois films rares réalisés par… Son Altesse Norodom Sihanouk, roi du Cambodge.

swissinfo, Alexandra Richard

Le 57e Festival international du film de Locarno se tient du 4 au 14 août 2004.
En compétition internationale 18 films sont présentés, provenant de 17 pays et en 21 langues.
Un film suisse: Promised Land.

– Cette année, Locarno se tourne vers le cinéma du réel.

– Plusieurs films engagés et documentaires sont programmés.

– La rétrospective «News Front» se consacre au journalisme dans le cinéma.

– Carl Bernstein, qui a révélé le scandale du Watergate avec Bob Woodward, sera présent.

– Le jury est présidé par le photographe René Burri.

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