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Michel Ritter est mort à Paris

Michel Ritter en 2003. Au service d'une culture "pas simplement nationale mais critique, exigeante et participative". Keystone

Le directeur du Centre culturel suisse a succombé à un cancer dans la nuit de mardi à mercredi à son domicile parisien. Il avait 58 ans et dirigeait le Centre depuis 2002.

Artiste d’avant-garde à New York, puis promoteur de l’art contemporain dans sa ville de Fribourg, il avait fait jaser il y a trois ans en organisant à Paris la très contestée exposition de Thomas Hirschhorn sur la démocratie suisse.

«Il avait le flair pour dénicher, parmi ce qui émerge, ce qui est significatif», a dit Yvette Jaggi. L’ancienne présidente de la fondation Pro Helvetia, dont dépend le Centre, a rendu hommage à la «personnalité attachante» de Michel Ritter, à ses choix «audacieux et exigeants» et à sa «capacité de discernement».

Sur son site Internet, Pro Helvetia loue le travail d’un homme qui «a su faire rayonner, de façon exemplaire, une culture suisse qu’il ne voulait pas simplement nationale mais critique, exigeante et participative d’une réflexion universelle».

Pour la fondation, Michel Ritter, «qui considérait tout acte artistique comme un acte politique», restera «un modèle d’engagement, de prospection et d’intuition».

«Un homme à part»

«C’était un artiste, un homme à part, sur le fil du rasoir, a déclaré Pierre Keller, directeur de l’Ecole cantonale d’art de Lausanne sur les ondes de la Radio suisse romande. Il aimait faire découvrir l’art sous toutes ses formes: il l’a fait d’une façon exceptionnelle à Paris, malgré beaucoup de critiques inutiles. Il a certainement trouvé une nouvelle manière de faire valoir l’art suisse».

«Michel Ritter a créé quelque chose de nouveau, pas seulement à Fribourg, mais en Suisse», a dit Gérard Bourgarel, secrétaire général de Pro Fribourg. Lequel craint maintenant que «certains ne profitent de sa disparition pour fermer le Centre culturel suisse de Paris».

En Suisse, «nous n’avons pas de réel ministère de la culture, mais une bureaucratie culturelle», regrette Gérard Bourgarel, rappelant au passage le rôle courageux de Michel Ritter en 2001 dans l’affaire des sans-papiers, qu’il avait recueillis au centre d’art contemporain Fri-Art.

Ancien directeur du festival du Belluard à Fribourg et de celui de la Bâtie à Genève, Olivier Suter souligne aussi le courage, la générosité, l’approche sans concessions et l’esprit de recherche permanente de Michel Ritter, qui a «ouvert Fribourg à la contemporanéité. Il a déclenché bien des choses qui sont aujourd’hui institutionnalisées et sont la carte de visite culturelle de Fribourg».

Remous parisiens

La nomination de Michel Ritter à la tête du Centre culturel suisse de Paris en 2002 avait été contestée à l’intérieur de l’organisation, comme dans le milieu culturel romand. Le nouveau directeur l’avait finalement emporté et c’est l’équipe en place qui était partie.

En 2004, l’exposition ‘Swiss-swiss democracy’ de Thomas Hirschorn avait déclenché un scandale dans le monde politique suisse. Elle n’en avait pas moins avait attiré 30’000 visiteurs, une des plus grandes fréquentations du Centre. Lequel avait fêté ses vingt ans l’année suivante, dans un climat apaisé.

L’équipe de Michel Ritter va maintenant assurer la direction intérimaire du Centre, où un hommage lui sera rendu, à une date qui sera communiquée ultérieurement.

swissinfo et les agences

Né en 1949 à Fribourg, Michel Ritter a d’abord été artiste autodidacte au début des années 70, notamment à New York où il a vécu quelques années, se frottant aux modes d’expression comme la performance, le ‘work in progress’ ou l’installation.

En 1974, il ouvre, avec le peintre Bruno Baeriswyl, la galerie RB, un espace indépendant à Fribourg.

En 1981, il organise une grande exposition d’art contemporain dans les locaux de l’ancien séminaire de Fribourg. Jugées obscènes et attentatoires à l’esprit religieux, les peintures de Félix Müller sont séquestrées. L’affaire a eu des prolongements juridiques jusqu’à la Cour des droits de l’Homme de Strasbourg.

Très attaché aux concepts transdisciplinaires, Michel Ritter a été également directeur artistique du festival Belluard Bollwerk International en 1986 et puis membre de son comité artistique pendant de longues années.

En 1990, il fonde, le Centre d’art contemporain de Fribourg qu’il dirigera jusqu’en 2002. Il recevra en 2004 le «Prix Art Frankfurt» pour la programmation ambitieuse et internationale qu’il mena dans cette institution.

En 1996, il a également obtenu le «Prix de mérite pour médiatrices et médiateurs d’art» et en 2005 le Prix Meret Oppenheim, décerné par l’Office Fédéral de la Culture à des personnalités de premier plan dans l’art contemporain suisse.

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