Qui a changé?

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Michel Sardou est de passage en Suisse pour quatre concerts en Suisse romande. Succès garanti: son public lui est fidèle et ses détracteurs ne sont plus guère virulents.

Il fut un temps (que les moins de vingt ans, etc…) où d’aucuns manifestaient contre Sardou. Tentaient de faire opposition à ses concerts. Criaient «Sardou SS» avec une vigueur qui n’avait d’égal que la disproportion entre la cause et la réaction à celle-ci.

Sardou avait commencé par rendre hommage aux «Ricains» à une époque où, pour l’intelligentsia, il valait mieux louer Mao. Ensuite, le chanteur sulfureux avait crié «Je suis pour». Sans pour autant se faire l’avocat de la peine de mort, mais bien de la vengeance personnelle. Puis il avait chanté «Le temps des colonies»… Là aussi, ses détracteurs avaient hurlé au scandale, en omettant toutefois un détail: la chanson se voulait sarcastique.

Sardou était un provocateur, sans doute un peu réac, mais pas le facho que la fraction la plus hystérique de la gauche voulait voir en lui. Face à de tels excès, même Montand et Bedos se mirent à le soutenir…

Sur son dernier album, Michel Sardou esquisse un sourire. Révolution, glousse-t-on, il a donc changé, lui qui ne souriait jamais. Mais aujourd’hui, plus personne ne s’irrite du chauvinisme véhiculé par la chanson «Français», ni de l’ambiguïté de la formule «J’aime les Français, tous les Français, même ceux que je n’aime pas».

Souvenir d’ado… Eté 1975. Au cours d’un débat animé, une copine à moi vomit Sardou et porte Michel Fugain aux nues… 25 ans plus tard, toutes les musiques du dernier Sardou sont signées Fugain, ami de jeunesse. Lequel me confiait pourtant il y a quelques années: «Sardou et moi, ce n’est pas le même monde».

«Avec le temps va tout s’en va», compléterait Ferré. Quoi qu’il en soit, restent un artiste et un flot de chansons dont certaines ont indéniablement marqué les trente dernières années.

«Cette chanson-là, Tu ne l’entendras pas tout de suite, Mais sois certaine qu’elle te rattrapera, Quel que soit l’endroit de ta fuite, Tu la prendras pour toi… », chante Michel Sardou sur son dernier album. Que celui qui n’a jamais vibré à une seule chanson de Sardou lève la main.

Bernard Léchot

Michel Sardou à la Patinoire de Malley-Lausanne (15) et à l’Arena de Genève (16 au 18)