Un regard différent sur Vallotton
On connaissait ses peintures. Aujourd'hui, le Salon du livre s'intéresse à un Vallotton moins lisse. Plus percutant. A travers ses dessins de presse.
Félix Vallotton, un peintre de scènes d’intérieur ou de paysages. Placide et lisse. C’est cette image qu’on a longtemps voulu donner de lui. Oubliant, volontairement souvent, son autre visage. Plus noir, plus critique. Et très engagé. Trop…
«Ses dessins de presse étaient présentés comme une production purement alimentaire, précise Jean-Paul Morel, commissaire de l’exposition Vallotton. Ils ont été écartés pour deux raisons. Parce que le dessin de presse était considéré comme un genre mineur. Et surtout parce que le ton dérangeait.»
Un dessinateur qui dérange
Parler de Vallotton, militant anarchiste… C’était tout simplement impossible. A tel point qu’on a aussi oublié les risques qu’il a pris. Citoyen suisse jusqu’à son mariage avec Gabrielle Bernheim, en 1901, qui lui donne la nationalité française, Félix Vallotton risquait la censure, mais aussi la prison et la reconduite aux frontières.
Pourtant Vallotton a été l’un des grands dessinateurs de presse de la IIIe République française. Il a porté son regard insolent sur les gens et les événements de son époque. De l’affaire Dreyfus à la Première Guerre mondiale.
Il a travaillé pour les grandes revues du moment: L’Assiette au Beurre, Le Cri de Paris, Le Canard Sauvage, La Revue Blanche, Le Rire, etc. Assoiffé de vérité et de justice, il dénonce la répression policière, soutient les déshérités.
«Le dessin de presse est plus gentillet aujourd’hui»
«Vallotton n’a jamais un regard neutre, ajoute Jean-Paul Morel. Aujourd’hui, le dessin de presse est plus doux. Gentillet. Avec quelques exceptions, comme Charlie Hebdo. Globalement, on cherche plus à faire rire qu’à porter un regard critique. Peut-être que les plus virulents vont enfin reprendre le crayon avec la menace du Front national en France.»
En attendant, on peut s’offrir une bonne dose d’insolence et d’humour noir, à Genève. Avec la grande exposition Félix Vallotton du Salon international du livre, de la presse et du multimédia qui propose «une relecture, voire une réhabilitation» de Vallotton. «Ce qui est présenté était aux trois-quarts inconnu jusqu’ici», ajoute le commissaire de l’exposition.
Des dessins de presse, des gravures, des illustrations et des caricatures. Tout sauf ce qu’on pourrait imaginer en voyant l’affiche de cette 16e édition… «La Lecture abandonnée», une huile sur toile. «Tout de même, c’est le Salon du livre. Il fallait une allusion au livre, répond Jean-Paul Morel. Un clin d’œil.»
swissinfo/Alexandra Richard
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