Quand les Suisses vont-ils voter sur le mariage homosexuel?
Les récentes décisions historiques en faveur des droits des homosexuels ont aussi fait les gros titres des journaux helvétiques. La Suisse met-elle aussi en œuvre des changements qui pourraient renforcer le statut légal des couples de même sexe?
Les défenseurs de l’égalité des droits ont eu des raisons de se réjouir, au cours des dernières semaines. En juin, la Cour suprême des Etats-Unis a légalisé le mariage gay. Environ un mois plus tard, les citoyens irlandais ont accepté d’étendre les droits du mariage civil aux couples homosexuels.
Les Suisses voteront-ils bientôt sur ce sujet? Bastian Baumann, le secrétaire général de l’association de défense des droits des homosexuels Pink CrossLien externe l’espère. Il estime qu’une votation fédérale sur la question des unions homosexuelles donnerait un haut degré de légitimité à la décision. Le peuple suisse pourrait toutefois encore devoir attendre longtemps, avant d’avoir l’occasion de se prononcer. Le processus politique qui précède un scrutin et qui implique le gouvernement, le parlement et la population, prend souvent plusieurs années.
Il est peu probable que les décisions prises à l’étranger aient une influence directe sur la politique suisse. Bastian Baumann estime toutefois que le résultat d’un vote dans un autre pays peut favoriser une prise de conscience au sein de la population et créer une pression populaire.
Pétition en cours
L’absence d’initiative populaire pour demander un vote sur le mariage gay en Suisse peut paraître surprenante. Toutefois, ce type d’action coûte cher et mobilise des ressources importantes.
Les groupes d’intérêts se fient plutôt à une proposition faite par les Verts libéraux. Le petit parti centriste demande au parlement d’accepter un amendement constitutionnel qui garantirait une protection légale à tous les couples, indépendamment de leur identité sexuelle. Les militants ont d’ailleurs lancé une pétition, une requête non-contraignante avec une valeur symbolique, pour soutenir la démarche.
Le document va probablement être remis aux sénateurs en novembre, lorsqu’il sera soumis à la commission des affaires juridiques du Conseil des Etats (Chambre haute). La commission du Conseil national (Chambre basse) s’est déjà prononcée favorablement en février dernier.
Pacte civil de solidarité (PACS)
Dans la loi française, le Pacte civil de se solidarité désigne une forme d’union civile entre deux adultes. Ce contrat peut être conclu entre des personnes de même sexe mais il concerne en grande majorité des couples hétérosexuels. Le PACS définit des droits et des responsabilités moins étendus que le mariage. Il ne permet par exemple pas l’adoption.
Une forme d’union civile existe dans environ vingt pays, principalement en Europe et en Amérique du Nord, depuis la fin des années 90. Le mariage homosexuel n’est pas reconnu en Suisse. Toutefois, la possibilité de conclure un partenariat enregistré (une forme de «PACS allégé») entre couples de même sexe a été introduite en 2007 à la suite d’une votation fédérale.
Saturation?
Jusqu’à présent, la pétition a recueilli 10’000 signatures. Un chiffre bien en-dessous des 100’000 signatures nécessaires pour une initiative populaire ou du nombre de signatures qu’aurait récolté un tel texte, il y a 10 ans. Bastian Baumann estime que l’objectif minimum a été atteint. «Nous ne pourrons pas obtenir beaucoup plus de soutien à moins que nous fassions encore bien davantage d’efforts», commente-t-il sur un ton critique.
Le secrétaire général de Pink Cross constate un sentiment de saturation et un manque d’engagement politique au sein de la communauté homosexuelle. Il note que les autres pays ont fait d’énormes progrès dans ce domaine, alors que la Suisse a pris du retard. La Confédération stagne depuis une décennie. En 2005, les citoyens suisses ont pourtant fait figure de pionniers en permettant aux couples homosexuels de faire enregistrer officiellement leur partenariat (partenariat enregistré) et d’obtenir ainsi des droits et des obligations.
Les élections fédérales pourraient préparer le terrain
Bastian Baumann et Maria Von Känel, directrice de l’Association faîtière Familles arc-en-cielLien externe, estiment que le moment de mettre en avant leurs revendications est venu. Ils se réfèrent à un sondage publié en mai qui a révélé que 71% des citoyens sont favorables à l’ouverture du mariage aux couples de même sexe.
La campagne en vue des élections d’octobre prochain représente une opportunité bienvenue de trouver du soutien. Maria von Känel constate que les droits des homosexuels ne figurent pas seulement dans le programme politique des partis de gauche mais aussi dans celui de partis centristes. Ces derniers espèrent ainsi toucher une partie de l’électorat. Selon Bastian Baumann, il serait ainsi judicieux pour les militants de la cause homosexuelle de soutenir publiquement les politiciens qui promeuvent les droits des minorités.
Un rapport propose des pistes
Le Conseil fédéral est aussi entré dans le débat. La ministre de la justice Simonetta Sommaruga a présenté en mars dernier un rapport sur le sujet. Le document suggère d’introduire le Pacte civil de solidarité, une forme d’union civile entre deux adultes communément appelé PACS.
La proposition est saluée par l’association de l’Association faîtière Familles arc-en-ciel. «Nous devons ouvrir le mariage aux gays, lesbiennes et transgenres pour établir l’égalité des droits», affirme Maria Von Känel. Elle souligne toutefois que c’est toujours le peuple qui a le dernier mot sur un tel changement de constitution, s’il est accepté par le parlement.
(Traduction de l’anglais: Katy Romy)
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