Recherche désespérément: reconnaissance et relève
Un concours d’idée le montre: de meilleures conditions-cadres et des indemnités plus importantes ne sont pas les seules conditions pour renforcer le système de milice qui constitue un des fondements de la démocratie helvétique. Il faut également améliorer son image dans la population.
L’Association des communes suisses (ACS) a déjà obtenu un résultat au moins avec son «Année du travail de miliceLien externe»: les problèmes rencontrés par le système de milice (voir encadré) font maintenant l’objet d’une discussion publique. Même si le travail lui-même reste peu prisé, il est de bon ton de se préoccuper du problème.
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Au début de l’année, la Haute école technique et économique de Coire (HTW) a présenté une étudeLien externe dont les auteurs proposent plus de 80 mesures envisageables pour renforcer le système de milice. Parallèlement au travail de ces experts, l’ACS a lancé un concours d’idéesLien externe en collaboration avec de grandes entreprises et diverses associations économiques. Les meilleures ont été distinguées la semaine dernière à Zurich.
Propositions controversées
Les organisateurs n’ont cependant pas été submergés par les propositions. La plus grande part des 19 idées soumises sont venues d’associations et d’organisations plus ou moins directement concernées par la question. Ainsi, la directrice de la Fédération suisses des Parlements des jeunes Stefanie Bosshard propose l’introduction de «conseils communaux des jeunesLien externe». Ils travailleraient parallèlement et en contact avec les véritables exécutifs communaux de manière à permettre aux jeunes de se familiariser avec la politique à cet échelon.
Sandro Lienhart, président des Jeunes Libéraux-Radicaux zurichois veut pour sa part que le temps consacré à ce travail de milice soit pris en compte dans la durée du service militaireLien externe. Bien que cette idée n’aille pas aussi loin que le «service citoyen» proposé il y a quelques années par la cellule de réflexion libérale Avenir Suisse, elle ne fera certainement pas l’unanimité au niveau politique.
Part de la formation
Il devrait en aller de même pour la proposition de Christine Badertscher qui fait partie du FJG, une association alémanique pour la promotion des jeunes dans les exécutifs communaux, et souhaite que l’exercice d’une telle fonction soit reconnu comme une formationLien externe. Ainsi, une personne active dans un conseil communal pourrait par exemple se voir attribuer des crédits ECTC à faire valoir dans le cadre d’une formation ou d’une formation continue.
Cette idée vient de son expérience personnelle. Âgée aujourd’hui de 37 ans, elle a représenté pendant six ans les Verts dans l’exécutif de la commune de Madiswil, dans le canton de Berne, tout en travaillant et étudiant l’agronomie, a-t-elle expliqué dans un entretien. «Si j’avais pu faire valoir mon activité politique dans le cadre de mes études, j’aurais par exemple pu m’épargner un séminaire sur le leadership». Ce qui lui aurait permis d’alléger un peu son agenda.
Christine Badertscher est en outre convaincue qu’une telle mesure pourrait changer la perception du travail de milice dans le public. «Souvent, quand je racontais à des connaissances que je siégeais au conseil communal, elles s’étonnaient et me demandaient pourquoi je m’infligeais cela», raconte-t-elle.
De nombreuses personnes ne réalisent pas qu’on apprend beaucoup dans cette fonction et que ce travail peut favoriser la carrière professionnelle. Mais cette perception pourrait changer si cette activité était reconnue comme une formation. «Le système de milice bénéficierait d’une meilleure reconnaissance et de plus d’estime.»
Plus
L’Assemblée communale
Lien externePoliticiens à l’école
Ces préoccupations reviennent régulièrement lorsqu’on discute avec des personnes exerçant une fonction politique: elles apprécieraient certes de meilleures conditions-cadres et des indemnités financières plus importantes. Mais ce qu’elles souhaitent surtout, c’est davantage d’estime pour le travail de milice et que les jeunes puissent y accéder plus facilement.
La proposition qui a recueilli le plus de voix auprès du public la semaine dernière à Zurich va d’ailleurs dans cette direction. Le jeune libéral-radical Matthias Müller veut mettre en place des rencontres avec les jeunes consacrées à la politiqueLien externe. Il propose que les conseillers communaux se rendent dans les classes des niveaux primaire et secondaire pour discuter de questions et de problèmes précis. Des interactions directes sur les médias sociaux peuvent aussi être envisagées, dit Mattias Müller. «Les jeunes pourraient ainsi se faire une idée bien plus précise de la politique communale.»
Un potentiel de relève non exploité
Il renvoie à l’étude de la Haute école technique et économique de Coire qui montre qu’un cinquième des jeunes pourraient être intéressés par une fonction politique. Mais la plupart du temps, l’occasion ne se présente pas, dit le jeune politicien qui a grandi à Merenschwand, en Argovie, et vit actuellement à Zurich où il prépare son doctorat en droit. «Quand une vacance se présentait dans notre commune, on faisait tout sauf s’adresser aux jeunes.» Et la plupart d’entre eux ne venaient pas d’eux-mêmes parce qu’ils n’avaient pas de liens avec monde politique. Les rencontres dans les écoles pourraient remédier à ce problème.
C’est maintenant aux communes de décider si elles veulent mettre en pratique ces idées. Des propositions telles que les rencontres politiques sont relativement faciles à réaliser, dit Hannes Germann, président de l’ACS et conseiller aux États de l’Union démocratique du centre (UDC). «Les rencontres dans les écoles permettraient justement aux jeunes de se faire une idée très concrète de la politique communale.» Il ajoute que l’ACS pourrait rassembler les expériences réalisées dans les communes afin d’en conseiller d’autres.
Mais d’abord, le but de l’association faîtière est de réunir des idées et de lancer la discussion. Elle entend ensuite l’alimenter en présentant vers le milieu de l’année ses propres propositions pour renforcer le système de milice.
L’Année du travail de milice
Avec l’Année du travail de milice, l’Association des communes suisses (ACS) veut attirer l’attention du public sur la crise que traverse le système de milice suisse, une crise qui peut prendre des proportions dramatiques au niveau de la démocratie locale. La chute de la participation des citoyens, le manque de volontaires prêts à assumer des fonctions politiques, la réduction de la marge de manœuvre politique, les fusions de commune et la disparition des médias locaux ou régionaux en sont les principales raisons.
Afin de promouvoir une discussion interdisciplinaire approfondie sur les solutions envisageables, l’ACS organise en 2019 des manifestations dans toute la Suisse avec des partenaires issus de différents secteurs. Les discussions entre les experts et le public doivent déboucher sur des impulsions qui, aux yeux de l’ACS, sont nécessaires et urgentes pour renforcer et développer le système de milice.
Partenaire média de l‘«Année du travail de milice», swissinfo.ch publiera régulièrement des articles sur ce thème.
(traduction de l’allemand: Olivier Hüther)
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