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e-voting par blockchain: Zoug pourrait apporter une solution pour la Suisse entière

Delegation aus Südkorea auf Studienbesuch in Zug, dem Herz des Crypto Valley
Zoug est devenue un haut lieu des technologies de la blockchain. La ville reçoit régulièrement des délégations étrangères. Début octobre 2018, un groupe est venu de Corée du Sud pour voir ce qui se prépare dans la Crypto Valley. Urs Flüeler / Keystone

L’échec d’une idée et sa relance coïncident parfois d’une manière surprenante. Mercredi, le canton de Genève a annoncé l’abandon prochain de sa plate-forme d’e-voting, utilisée par sept cantons. Mais vendredi dans la région de Zoug, les autorités et les spécialistes des technologies de l’information de la Crypto Valley indiquent que le premier essai mondial de vote électronique basé sur la technologie de la blockchain a été un succès.

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Alors que Genève a décidé d’enterrer son système d’e-voting après 2019, le vote électronique «Made in Zoug» vient seulement de faire ses premiers pas.

La Crypto Valley constitue l’un des pôles de hautes technologies en Suisse. Installée sur la rive supérieure du lac de Zoug, elle n’a au premier abord rien d’impressionnant: des immeubles de bureaux grisâtres qui pourraient aussi bien abriter des cabinets dentaires ou des filiales d’assurances.

Mais ils ne donnent certainement pas la mesure de son importance. D’une part en raison des progrès technologiques qu’elle abrite dans le domaine du chiffrement numérique. D’autre part en regard du potentiel des solutions pour la démocratie qu’on y concocte, à en croire les acteurs de ces innovations.

Les 200 entreprises de la région qui travaillent dans le domaine en plein essor des technologies de la blockchain constituent un biotope particulier. Et c’est là que vient de voir le jour le premier système de vote électronique basé sur cette technique.

Il a été testé l’été dernier lors d’un essai pilote par 72 citoyennes et citoyens de la ville de Zoug. Pour y participer, ces «cobayes» ont dû adopter d’abord une identité numérique, autrement dit obtenir un identifiant qui leur permette de donner leur suffrage d’un clic de souris sur internet.

La Haute École de Lucerne et l’entreprise Luxoft, spécialisée dans la blockchain, ont maintenant évalué les résultats de cet essai. Leur rapport satisfait pleinement Daniel Truttmann: «C’est un succès complet», dit le responsable des technologies de l’information de la ville de Zoug qui représente les autorités dans ce projet.


Une blockchain, comment ça marc he?
Kai Reusser / swissinfo.ch


Nouvelle approche

La solution zougoise ne constitue certes pas encore une alternative complète aux deux systèmes d’e-voting actuellement en concurrence en Suisse mis au point par La Poste et par le canton de Genève qui se retire maintenant «pour des questions de coût», selon les indications fournies mercredi par les autorités genevoises. Ces deux solutions ne sont pas utilisées au niveau fédéral mais dans différents cantons pour de nombreux scrutins.

Les critiques du vote électronique tels qu’Hernani Marques, du Chaos Computer Club (CCC), soulignent que ces systèmes sont extrêmement vulnérables aux attaques de hackers. Il estime que leur manque de fiabilité pourrait saper la confiance dans la démocratie. Des membres du CCC sont récemment parvenus à cracker le système genevois.

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Alors, qu’apporte la solution zougoise? La plus grande différence par rapport aux systèmes actuels vient du fait que les données ne sont pas enregistrées en un seul endroit sur un serveur central, que ce soit celui d’une administration ou d’une entreprise externe. Elles se retrouvent au contraire sur de nombreux serveurs répartis dans le monde entier. «Cela empêche la concentration de pouvoir qui se produit quand seul un cercle restreint d’administrateurs a accès à un système», explique Alexander Denzler, spécialiste des technologies de la blockchain à la Haute École de Lucerne et responsable scientifique du projet zougois d’e-voting. Chaque serveur disposant d’une copie identique des données, il n’est presque pas possible de manipuler un tel scrutin de l’extérieur, dit-il.

Collaboration entre la politique, la science et l’économie

Cette première mondiale en matière de scrutin électronique a été réalisée grâce à la Haute École de Lucerne. Son département d’informatique est situé à Rotkreuz, à l’extrémité de la Crypto Valley, et elle constitue en quelque sorte une charnière entre la politique et les start-up actives dans la blockchain.

Tout a commencé avec un travail de Bachelor consacré au thème du e-voting basé sur la blockchain dont l’auteur travaillait dans l’administration communale de Zoug. Le papier de cet étudiant en informatique a servi de base au projet pilote.

Pour le réaliser, l’équipe de la Haute Ecole a pu recourir à un code qui existait déjà. La société de conception de logiciels Luxoft, établie à Zoug, avait mis au point une solution basée sur la blockchain pour les votations organisées dans le cadre de l’assemblée générale d’une société anonyme. Elle a ensuite été développée en commun dans une collaboration impliquant la ville, la Haute Ecole et l’entreprise.

Le défi principal était d’assurer le secret du vote. Parce que dans la blockchain, il n’est pas possible d’effacer des données existantes. Autrement dit: il serait toujours possible de savoir qui a voté quoi.

«Il nous fallait trouver une solution permettant de rendre ces informations méconnaissables», explique Alexander Denzler. Elle est venue de la combinaison de diverses approches de chiffrement. Mais cela posait un autre problème crucial: «Tous les chiffrements peuvent être décryptés si des ordinateurs assez puissants s’y attaquent», indique le spécialiste.

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De «très sûr» à…

Lors du scrutin qui a eu lieu durant l’été, la barrière de sécurité mise en place a tenu. Avant l’essai, ses concepteurs avaient lancé un défi de type «Hack me if you can», invitant explicitement les hackers à tester le système sous toutes ses coutures. «L’essai a confirmé que notre application de vote électronique est très sûre», dit Alexander Denzler.

Plus

… «pas fiable»

Les résultats de l’étude réalisée à Zoug tombent à point dans le vif débat qui a lieu actuellement sur le e-voting. Le gouvernement suisse a présenté un plan ambitieux prévoyant l’introduction progressive du scrutin électronique dans les cantons également pour les votations fédérales. Et cela relativement rapidement. Mais le projet suscite de fortes oppositions, en particulier au Parlement fédéral. Plusieurs parlementaires souhaitent limiter ou interdire le vote électronique.

Le lancement d’une initiative populaire destinée à le bannir a déjà été annoncé et la récolte de signatures doit débuter au début de 2019. L’argument central est que le e-voting n’est pas suffisamment fiable.

Le responsable internet de la Ville de Zoug Daniel Truttmann, est d’un autre avis. «Je suis convaincu que le e-voting représente l’avenir. Il y a déjà longtemps que la numérisation imprègne notre vie quotidienne.» Si l’on veut assurer la fiabilité du vote électronique à l’avenir, il est urgent de le développer et de le tester plutôt que de l’interdire.

«Il faut partager le savoir»

La solution de Zoug présente encore deux différences importantes par rapport aux systèmes actuels. Elle est en «open source» et donc accessible aux spécialistes des technologies de l’information du monde entier. Les partenaires impliqués entendent placer prochainement sur leur page internet un lien donnant accès au code.

«Nous voulons que les personnes de tous les pays puissent accéder au code, le développer et l’améliorer», dit Alexander Denzler. Il sera ainsi meilleur et plus sûr. La publication du code reflète également sa position personnelle, partagée par les autres parties impliquées: «Il ne faut pas enfermer le savoir dans un conteneur et le couler en mer, mais le partager».

Le système de vote électronique zougois sera également mis en valeur dans le monde réel. Daniel Truttmann entend présenter ces solutions lors de diverses conférences. La ville de Zoug indique pour sa part que «Nous recevons presque chaque semaine des requêtes et des visites de délégations étrangères qui ne sont pas seulement intéressées par l’écosystème de la Crypto Valley, mais aussi par l’identité numérique basée sur la blockchain.»

(Traduction de l’allemand: Olivier Huether)

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