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Syngenta accusé de vendre au Brésil des pesticides interdits en Suisse

Mato Grosso
Récolte de soja dans l'Etat du Mato Grosso au Brésil. Keystone / Andre Penner

Trois millions de tonnes de pesticides sont épandues chaque année dans le monde, surtout au Brésil. Dans un rapportLien externe publié lundi, l’ONG Public Eye accuse Syngenta de gagner des milliards de francs avec des produits interdits en Suisse.

Dans l’Etat brésilien du Mato Grosso, au centre du pays, on est très loin du paysage idyllique. Dans ce grenier du pays, plus de 14 millions d’hectares de forêts amazoniennes ont été sacrifiées au cours des 20 dernières années, soit trois fois et demie la superficie de la Suisse. L’objectif de cette déforestation est d’y cultiver du soja de manière intensive. Et qui dit culture intensive, dit usage intensif de produits toxiques.

Le Brésil est le plus grand utilisateur de pesticides au monde, y compris pour la catégorie de pesticides considérés comme dangereux pour la santé ou l’environnement. Or, depuis qu’il est arrivé au pouvoir, il y a un peu plus de 100 jours, le président Jair Bolsonaro a déjà autorisé l’utilisation de 86 nouveaux pesticides. De quoi alarmer l’ONG Public Eye, qui a placé dans sa ligne de mire le géant bâlois Syngenta.

«Au Brésil, l’agrochimie et l’agrobusiness sont tout puissants. Et les sociétés comme Syngenta également. Dans ce pays, on voit aussi de plus en plus d’études montrant des taux de malformations congénitales, des taux de cancers et d’autres maladies chroniques très élevées dans les régions où le plus de pesticides sont épandus. Malgré le contexte politique peu favorable, beaucoup d’experts tirent la sonnette d’alarme», affirme à la RTS Géraldine Viret, porte-parole de Public Eye.

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Des produits très profitables

Le directeur de Syngenta Suisse, Roman Mazzotta, affirme ne pas vouloir réagir à la campagne politique que mène Public Eye: «Nos produits sont sûrs, ils font l’objet d’inspections sur le long terme et sont contrôlés régulièrement. Il faut de nombreuses années pour qu’un produit soit homologué. Il n’y a donc pour nous aucune raison de retirer ces produits du marché.»

Sur le millier de pesticides recensés dans le monde, 310 sont qualifiés d’extrêmement dangereux par le réseau international Pesticide Action Network (PAN). Selon Public Eye, ces pesticides rapportent gros à leurs fabricants: 42% de leur chiffre d’affaires, soit environ 22 milliards de francs dans le monde en 2017. Les deux tiers du 1,8 million de tonnes de substances dangereuses sont vendus dans des pays en développement ou émergents.

L’ONG estime que la commercialisation de pesticides extrêmement dangereux est au coeur du modèle d’affaires de Syngenta: 15 des 32 pesticides présentés comme ses produits vedettes figureraient sur la liste noire du PAN: «Rien qu’en 2017, on estime que Syngenta a réalisé 3,9 milliards de francs de chiffre d’affaires sur ces produits extrêmement dangereux», explique Géraldine Viret.


La faiblesse des législations

La porte-parole de Public Eye reproche à la multinationale de profiter de la faiblesse des réglementations dans certains pays pour y vendre des produits toxiques, dont bon nombre ne sont plus autorisés en Suisse, ni dans l’Union européenne.

Mais pour le directeur de Syngenta, la réglementation brésilienne en matière de produits dangereux est tout aussi stricte qu’en Suisse: «Il n’y a aucune raison pour laquelle Public Eye affirme que le Brésil n’est pas soumis aux mêmes conditions que la Suisse. Il est vrai que les autorités brésiliennes parviennent à une conclusion différente. Je ne le nie pas, c’est comme ça. Mais le fait que les autorités brésiliennes décident différemment de ce que Public Eye aurait souhaité ne signifie pas que les autorités brésiliennes sont incapables. Nous pensons qu’il s’agit d’une affirmation présomptueuse de Public Eye.»

Dans tous les cas, ce business est légal. Il n’empêche que pour Public Eye, «ces pratiques sont vraiment illégitimes». C’est pourquoi l’ONG demande l’interdiction d’exporter des produits bannis en Suisse en raison de leur dangerosité pour la santé ou l’environnement.

L’Organisation mondiale de la santé a elle aussi édicté des règles visant à retirer du marché les pesticides «reconnus comme présentant des niveaux de risques aigus ou chroniques particulièrement élevés pour la santé ou l’environnement». Mais elles n’ont aucun pouvoir contraignant.

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