Le nouveau calendrier des salons complique la vie des horlogers
La décision des deux principales foires horlogères de Suisse – le Salon International de la Haute Horlogerie de Genève et Baselworld – de se tenir directement l’une après l’autre dès 2020 perturbe l’organisation des professionnels de la branche.
Fréquentation record pour le 29e Salon International de la Haute Horlogerie. Le SIHH a fermé ses portes jeudi soir à Genève après avoir accueilli 23’000 visiteurs en l’espace de quatre jours, une hausse de 15% par rapport à 2017.
L’avant-dernier jour de la foire, un flux ininterrompu de distributeurs et de détaillants japonais, chinois, et européens se massaient devant les stands des marques horlogères. S’ils sont suffisamment impressionnés, les acheteurs internationaux passent leur commande et permettent ainsi à l’industrie horlogère suisse de se maintenir à flot – jusqu’à ce que tout recommence encore une fois au mois de mars, lors de la foire de Baselworld.
Or, tout va changer dès 2020, car les deux salons ont décidé de synchroniser leurs calendriers et de se tenir directement l’un après l’autre: le SIHH du 26 au 29 avril à Genève, puis Baselworld du 30 avril au 5 mai à Bâle. Un arrangement prévu jusqu’en 2024.
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«Nous avons cherché à dialoguer avec le SIHH et nous avons trouvé ensemble une solution qui profite aux visiteurs, aux médias et à l’industrie horlogère dans son ensemble», expliquait Michel Loris-Melikoff, directeur de Baselworld, lors de l’annonce de ces nouvelles dates à la mi-décembre. Il s’agit également d’une bonne solution pour de nombreux acheteurs internationaux. «Il est pénible de devoir assister à deux foires horlogères dans un intervalle de trois mois, confie Kunhiro Tanaka de East Japan, un distributeur de la marque suisse H. Moser. C’est aussi difficile pour la marque d’apporter des nouveautés aux deux salons dans un laps de temps si court.»
Après la récente décision de plusieurs marques de ne plus participer à Baselworld, les acheteurs semblent plutôt satisfaits de pouvoir profiter de discuter avec elles au SIHH durant la même période. «En venant d’autres parties du monde, plus vous rencontrez de personnes mieux c’est pour les affaires. Le milieu de l’horlogerie fonctionne à travers les relations directes, et il est difficile de les développer si les marques sont absentes des salons», déclare Ankur Jhunjhunwala, de Swiss Timepieces basé au Népal.
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L’horlogerie est la troisième industrie exportatrice de Suisse après la pharma et les machines-outils, avec un chiffre d’affaires de près de 20 milliards de francs en 2017. La majeure partie des exportations sont destinées au marché asiatique.
Si les acheteurs se réjouissent de la synchronisation des deux salons, les producteurs sont plus sceptiques. La marque Grönefeld, dont le dernier modèle coûte tout de même 45’000 euros, a été obligé de choisir entre les deux manifestions et a opté pour le SIHH. «Nous ne sommes pas des robots qui pouvons travailler à plein régime durant deux semaines consécutives. C’est aussi un gaspillage d’argent que d’aller voir exactement les mêmes personnes à deux endroits différents», a expliqué Bart Grönefeld à swissinfo.ch.
Une vision partagée par son homologue Christophe Claret, dont la montre Angelico est proposée au SIHH au prix de 200’000 CHF, et qui préfère se rendre uniquement à Genève l’année prochaine: «Il n’y a pas vraiment d’avantage à participer à deux foires, je l’ai fait une fois et cela n’a pas vraiment provoqué de grande différence pour nous. Encore moins maintenant qu’elle se tiendront l’une après l’autre.»
Il faut également avoir suffisamment d’employés et de modèles de montres à disposition. «Le second événement [Baselworld] sera malchanceux, car tout le monde sera épuisé et les montres seront souillées par la première semaine d’exposition [SIHH]», indique l’horloger Romain Gauthier, qui a également décidé de ne participer qu’à un seul salon en 2020.
Les producteurs sont tout de même satisfaits d’une chose: de ne pas devoir se préparer pour le SIHH en janvier prochain. «Nous préférons que cette foire se déroule plus tard, car nous sommes très occupés durant la période de Noël et ensuite pour boucler l’année fiscale», confie Kari Voutilainen, qui fabrique des montres sous son nom. Il ne veut pas encore dévoiler pour quel salon il optera l’année prochaine. «Cela dépendra de ce que les exposants auront à nous proposer», glisse-t-il.
Baselworld et SIHH
Baselworld est le plus important salon annuel du monde dédié à l’horlogerie et la bijouterie. Il existe depuis 1917 et se déroule chaque année à la fin du mois de mars à Bâle. Pour cette édition, les organisateurs attendent environ 700 stands et 100’000 visiteurs du 21 au 26 mars.
Le SIHH est né en 1991, lorsque le groupe Richemont a décidé de mettre en place un événement séparé de Baselworld pour présenter ses marques. Depuis, ce salon est entré dans le calendrier des horlogers suisses. L’édition 2019 vient de se terminer et a accueilli environ 35 stands pour 23’000 visiteurs.
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