Washington desserre la vis aux banques, dont Credit Suisse et UBS
Dix ans après la crise financière des subprimes de 2008, le gouvernement américain vient d’effectuer un premier pas significatif en matière de dérégulation bancaire. Présenté comme un geste en faveur des petites banques, le texte devrait aussi bénéficier à des institutions comme UBS et Credit Suisse.
A fin mai, le Congrès et le président Trump ont entériné l’Economic Growth, Regulatory Relief and Consumer Protection ActLien externe, qui vient modifier plusieurs provisions de la loi Dodd-FrankLien externe, promulguée en 2010 par l’administration Obama pour prévenir de nouvelles crises financières. Bien qu’initié par la majorité républicaine du Congrès, la nouvelle loi a néanmoins été soutenue par un certain nombre d’élus démocrates.
Parmi les changements majeurs introduits: l’abaissement des critères définissant les banques «d’importance systémique» (les fameuses «too big to fail», dont la faillite présenterait un risque de déclenchement de crise). Sous la loi Dodd-Frank, tout établissement affichant des actifs supérieurs à 50 milliards de dollars était considéré comme «d’importance systémique», et dès lors soumis à certains garde-fous. Le nouveau texte, désormais, rehausse ce seuil à 250 milliards de dollars.
Credit Suisse et UBS sortent de la liste
Résultat: contre 43 banques auparavant considérées comme d’importance systémique aux Etats-Unis, seules 12 institutions répondent dorénavant à cette caractéristique. Parmi la trentaine de banques fraichement exemptées figurent les filiales américaines de Credit Suisse et d’UBS, dont les actifs déclarés s’élevaient respectivement à 141 et 140 milliards de dollars à la fin 2017.
Retirées de la fameuse liste, les deux banques helvétiques verront donc s’alléger certaines régulations dont elles font l’objet outre-Atlantique. Pour autant, la nouvelle loi prévoit qu’elles pourront occasionnellement être soumise à des «stress tests» (simulations de choc financier) par la Réserve fédérale américaine.
L’adoption de la nouvelle législation a été saluée par les milieux bancaires américains, qui appellent depuis plusieurs années à l’allègement des régulations. Un optimisme d’autant plus prononcé que, quelques jours après l’adoption de la loi, la Réserve fédérale américaine annonçait réfléchir à une autre mesure dérégulatoire: l’allègement de la «règle VolckerLien externe», limitant les activités spéculatives des banques de dépôts.
Le prix d’un vote
Pour autant, la nouvelle loi a également suscité de virulentes critiques à gauche. Nick Jacobs, porte-parole de l’ONG Better Markets, s‘en est notamment pris Lien externeaux avantages accordés aux banques étrangères «comme Credit Suisse, Barclays ou Deutsche Bank, qui ont reçu d’immenses renflouements du gouvernement américain lors de la crise [de 2008]».
Dans un tweet, la sénatrice progressiste du Massachussetts Elizabeth Warren a quant à elle surnommé la loi «Bank Lobbyist Act» (loi du lobby des banques), affirmant que les législateurs ayant appuyé la législation auraient essentiellement agi sous l’influence des groupes de pression de Wall Street.
Big banks have spent millions of dollars trying to roll back the rules we put in place after we bailed them out ten years ago. Today, they got what they paid for. The House just passed the #BankLobbyistActLien externe. We lost this round – but we won't give up the fight. https://t.co/ppFj9SUm1MLien externe
— Elizabeth Warren (@SenWarren) 22 mai 2018Lien externe
Une accusation qui n’est pas sans fondements: une analyseLien externe comptable de l’organisation citoyenne Center for Responsive Politics révélait à la mi-mars que les sénateurs ayant soutenu la nouvelle loi avaient en effet reçu d’importantes contributions d’établissements bancaires. Et de préciser que «les deux plus gros donateurs ont été UBS AG et Credit Suisse Group, qui ont versé respectivement 3,5 et 2,2 millions de dollars à des membres du Sénat».
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