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Alexander Van der Bellen, ou la rude tâche de réconcilier l‘Autriche

Très distancé au premier tour, le candidat écologiste Alexander van der Bellen, 72 ans, a finalement remporté la présidentielle autrichienne avec 50,3% des suffrages en sa faveur. Reuters

Après un suspense qui a duré près de 24 heures, l’écologiste Alexander Van der Bellen a finalement remporté d’un cheveu la présidentielle autrichienne face au candidat d’extrême-droite Norbert Hofer. Malgré le soulagement, la presse suisse estime qu’il sera très difficile de réconcilier un pays divisé en deux.

«L’Autriche empêche le basculement grâce à une majorité due au hasard», titre la Berner Zeitung. «L’Autriche bascule de justesse du côté du président écolo», renchérit L’Express de Neuchâtel. «La victoire du moins diabolique», estime pour sa part La Liberté de Fribourg. De nombreux quotidiens helvétiques reviennent ce mardi sur la très courte victoire du candidat écologiste Alexandre Van der Bellen à la présidence autrichienne, qui a devancé le candidat du FPÖ Norbert Hofer de seulement un peu plus de 30’000 voix.

«Reste qu’à l’arrivée, le pays sort exsangue de cet affrontement qui a divisé l’Autriche comme jamais. Alexander Van der Bellen et le nouveau chancelier social-démocrate, Christian Kern, ont deux ans pour réconcilier les citoyens avec leurs politiques. Sans quoi, en 2018, [date des prochaines législatives] ce n’est pas un président mais un chancelier d’extrême droite qui prendra la tête du pays», estime le correspondant du Temps à Vienne.

La tâche s’annonce toutefois difficile voire impossible pour le nouveau président autrichien, écrit le Tages Anzeiger. «L’Autriche est un pays divisé. Plus divisé que jamais. Il n’y a plus de possibilités d’entente entre les deux camps ennemis. En Pologne et en Hongrie, on connaît déjà cette division de la société. Elle est maintenant arrivée en Autriche.» Il reviendra désormais au Premier ministre Christian Kern et à son équipe d’opérer un changement d’ambiance, de lutter contre la haine et de faire redescendre la pression dans cette marmite qu’est devenue l’Autriche, poursuit le quotidien zurichois.

Van der Bellen, un chef d’Etat populaire?

La Südostschweiz et l’Aargauer Zeitung se montrent, pour leur part, moins alarmistes. «L’Autriche est désécurisée, elle manifeste de longue date et chroniquement sa mauvaise humeur. Mais l’Autriche n’est pas aussi à droite qu’on le pense aisément à l’étranger», affirment les deux quotidiens alémaniques dans un éditorial commun. Alexandre van der Bellen, le candidat que l’on n’attendait pas, pourrait au final se révéler un président apprécié, poursuivent les deux quotidiens. «Alexander van der Bellen est un vrai Autrichien. Avec sa sérénité, son auto-ironie, sa tolérance et sa résistance face aux accusations de conformisme – qui viennent de droite comme de gauche – et de suivisme, il incarne le côté sympathique de l’identité autrichienne. Il ne serait pas étonnant que le Vert devienne un chef d’Etat très populaire.»

Même son de cloche dans la Neue Zürcher Zeitung (NZZ), qui qualifie Alexander van der Bellen de «jeune senior sympathique» qui ne s’est pas laissé démonter durant ce scrutin très serré. «L’Autriche s’est vraiment choisi un président qui lui convient. L’académicien du Tyrol a fait preuve d’un dynamisme remarquable face à l’élégant populiste de droite Hofer. Il a battu un candidat qui apparaissait irrattrapable après le premier tour.»

Professeur en études européennes à l’Université de Fribourg, Gilbert Casasus estime pour sa part dans le quotidien fribourgeois La Liberté que c’est surtout un sursaut citoyen qui a permis d’éviter la victoire du candidat d’extrême-droite. «Ce qui a le plus motivé les électeurs de Van der Bellen, c’est de sauver l’image européenne de l’Autriche. Les attaques de la presse étrangère et les avertissements des hommes politiques et des intellectuels à l’intérieur et hors des frontières ont éveillé les consciences», avance-t-il.

Partis populistes en vogue

Les quotidiens tessinois font quant à eux le lien entre le résultat de la présidentielle autrichienne et la situation que connaissent plusieurs pays européens. Une Europe en proie à de graves problèmes économiques et sociaux, où les peurs de la population croissent de jour en jour. «Les partis populistes tels que le FPÖ du candidat à la présidence Norbert Hofer ont construit leur succès électoral sur ces peurs alors que dans plusieurs pays, les partis traditionnels sont incapables depuis des années de répondre aux préoccupations d’une partie non négligeable de la population», commente ainsi le Corriere del Ticino.

La bataille autrichienne, qui devrait se poursuivre en vue des élections législatives de 2018, reflète «le paysage politique global tout sauf rassurant» en Europe, poursuit le quotidien de Lugano. Et notamment «l’incapacité, à la fois des gouvernements mais également des dirigeants européens, de se mettre à l’écoute des problèmes des citoyens et à proposer des solutions crédibles, favorisant ainsi la propagation inquiétante des partis populistes, prêts à canaliser avec peu d’efforts les frustrations du peuple».

La Regione fait une lecture similaire, en pointant plus particulièrement du doigt le «long travail de perte de sens opéré par les gouvernements de gauche en Europe, celui de l’Autriche inclus, qui ont conduit à un déplacement des voix des formations se réclamant de la social-démocratie vers les nationalismes de toutes sortes». 

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