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«La Suisse a une bonne réputation à l’ONU»

Micheline Calmy-Rey
Membre du parti socialiste, Micheline Calmy-Rey (*1945) a été cheffe du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) de 2003 à 2011. Depuis 2012, elle est professeure au Global Studies Institute de l'Université de Genève. Keystone / Salvatore Di Nolfi

En juin 2022, l'Assemblée générale de l'ONU se prononcera sur la candidature de la Suisse à un siège non permanent au Conseil de sécurité. À l'origine de ce projet, l'ancienne ministre des Affaires étrangères Micheline Calmy-Rey dit pourquoi.

swissinfo.ch: Pourquoi vous êtes-vous engagée pour la candidature de la Suisse?

Micheline Calmy-Rey: Je suis convaincue qu’elle est utile pour développer nos réseaux et donc notre influence au niveau international. La Suisse a une bonne réputation à l’ONU. Elle défend des positions indépendantes, objectives et consensuelles et sa voix est appréciée et prise au sérieux.

C’est pourquoi j’ai lancé [en tant que ministre des Affaires étrangères et présidente de la Confédération] la candidature de la Suisse en 2011

La Suisse profite donc d’un siège non permanent au Conseil de sécurité?

Oui. L’adhésion au Conseil de sécurité est certes un défi, mais c’est aussi une chance – avec une bonne dose de réalisme, mais aussi de confiance en soi – d’apporter notre contribution à la paix, la justice et la stabilité dans le monde.

Que signifie un siège au Conseil de sécurité pour le rôle de médiateur de la Suisse?

Ce siège a une grande importance. C’est pour nous l’occasion d’exercer le rôle de bâtisseur de ponts sur la scène internationale grâce à notre savoir-faire. Au Conseil de sécurité, nous aurons cette opportunité.

Sicherheitsrat
En avril 2012, le Conseil de sécurité a adopté une résolution autorisant le déploiement d’un maximum de 30 observateurs pour surveiller un cessez-le-feu en Syrie. Keystone / Un Photo/paulo Filgueiras

Que répondez-vous à la critique selon laquelle le siège pourrait également affaiblir le rôle de la Suisse en tant que médiatrice, car elle ne serait plus perçue comme un intermédiaire neutre?

Non, non, c’est le contraire! Certains disent aussi que ce n’est pas compatible avec la neutralité, parce que le Conseil de sécurité décide de la guerre et de la paix. Il le fait, mais très rarement. Jusqu’en 2019, le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté environ 2500 résolutions. Dans quatre cas seulement, il a autorisé le recours à la force armée, ce qui a conduit à des opérations militaires d’envergure. Cela représente 0,002 % de toutes les résolutions de sécurité. Dans la grande majorité des situations, le Conseil n’agit pas militairement, mais politiquement. C’est là que nous avons notre rôle à jouer. Nous avons la réputation d’être un honest broker.

Encore un mot sur la neutralité. Si, dans des cas exceptionnels, le Conseil de sécurité autorise néanmoins une intervention militaire, il agit à l’unisson et au nom de la communauté internationale. Et c’est précisément la différence essentielle avec un conflit interétatique classique, pour lequel la neutralité s’applique. La neutralité n’est pas en contradiction avec l’appartenance au Conseil de sécurité.

Que signifie ce siège pour la Genève internationale?

La Genève internationale est un lieu de multilatéralisme, tout comme l’ONU. C’est à Genève que siègent toutes les organisations techniques de l’ONU, c’est à Genève que nous façonnons les règles de la mondialisation. La Suisse a intérêt à renforcer le multilatéralisme. C’est maintenant qu’il faut s’engager dans ce sens, car nous constatons actuellement une érosion du multilatéralisme. Au Conseil de sécurité, nous pouvons faire entendre notre voix pour le multilatéralisme et pour les règles qui s’appliquent à tous, c’est-à-dire le droit international. C’est dans notre intérêt.

Quelles sont les expériences d’autres pays neutres, comme la Finlande, la Suède et l’Autriche?

Je pense qu’ils ont fait de bonnes expériences. La Suède a joué un rôle de médiateur à New York. La Suède a connu les mêmes discussions que la Suisse lorsqu’elle s’est portée candidate à un siège non permanent au Conseil de sécurité.

Nous sommes membres de l’ONU, nous y sommes très engagés et nous payons aussi quelque chose à l’ONU. Il est donc normal que nous allions jusqu’au bout de notre engagement.

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