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Les armes de l’OMC contre la récession

Keystone

Pour limiter l'impact de la crise financière sur le commerce international, l'Organisation mondiale du commerce se mobilise. Selon le Suisse Luzius Wasescha, un accord sur le cycle de Doha permettrait de sortir plus rapidement de la récession qui menace de s'abattre sur l'économie mondiale.

L’Organisation mondiale du commerce (OMC) a tenu mercredi une réunion d’experts sur le financement du commerce international, déjà entravé par la crise bancaire et financière.

«Depuis les Templiers, 90% du commerce international fonctionne avec du crédit à court terme. L’OMC veut persuader la communauté financière de ne pas traiter le financement du commerce comme un crédit toxique. On risquerait de tuer le dynamisme des pays émergents qui seront, en 2009, les seuls à pouvoir tirer la croissance mondiale», plaide Pascal Lamy, directeur de l’OMC, dans les colonnes du quotidien Le Monde de ce week-end.

Pour comprendre le problème, Richard Baldwin, professeur d’économie à l’Institut genevois de hautes études internationales et du développement, donne l’exemple d’un entrepreneur européen qui se fournit en Corée du Sud.

Pour ce faire, il a besoin d’une lettre de crédit émise par une banque européenne. Une forme d’assurance qui permet à son fournisseur coréen d’obtenir le financement du transport de la marchandise vers l’Europe par une banque coréenne. La lettre de crédit lui garantit en effet que sa marchandise sera payée dès son arrivée en Europe.

Garantie internationale

Or, avec la crise financière, les banques ne se font plus confiances. Ce qui entrave, voire empêche ce type d’échange entre entreprises.

«La réunion de l’OMC devrait permettre d’imaginer une forme de garantie d’Etat au niveau international à l’avantage de tous. Et ce, pour éviter que les garanties d’Etat au niveau national ne soient considérées comme des subventions à l’exportation avantageant les uns au détriment des autres», explique Richard Baldwin.

De manière générale, l’OMC craint un écroulement des échanges commerciaux, selon le Suisse Luzius Wasescha, en charge du volet «produits industriels» des négociations commerciales en cours (cycle de Doha).

«La crise actuelle a déjà un impact sur le commerce international dans les secteurs agricoles, industrielles et les services. Si la récession s’installe, les opérateurs économiques pourraient chercher à se protéger en poussant les Etats à adopter des mesures anti-dumping», avertit Luzius Wasescha.

«Ces mesures ont déjà augmenté de 40% cette année», signale de son coté Richard Baldwin.

Respecter les garde-fous

La bonne nouvelle est que ces entraves au commerce ont face à elles les accords déjà conclus dans le cadre de l’OMC. «Ces accords permettent d’activer des mécanismes d’arbitrages et de sanctions – l’organe de règlement des différents – qui servent de garde-fous», rappelle Luzius Wasescha.

Un retour aux politiques protectionnistes et à la guerre commerciale qui a suivit le Krach de 1929 parait donc peu probable, selon Richard Baldwin.

Un optimisme nuancé par Luzius Wasescha: «Si nous arrivons à mener une action concertée, nous arriverons à endiguer cette tentation du repli. Sinon, nous risquons d’assister à une fragmentation du marché global et à la renaissance de politiques nationales contraires aux garde-fous approuvés par les Etats membres de l’OMC.»

Citant l’exemple des taxes à l’exportation que certains Etats ont déjà décrétées, Luzius Wasescha avertit que de telles mesures censées protéger le marché intérieur ne feraient qu’accentuer la récession.

Conclure le cycle de Doha

Raison pour laquelle selon le négociateur suisse, il est plus que jamais nécessaire de conclure les négociations du cycle de Doha. Des accords commerciaux qui fourniraient un ballon d’oxygène à l’économie mondiale.

Et Luzius Wasescha de conclure: «En préservant et en améliorant l’accès aux marchés, ces accords favoriseraient une concurrence plus forte et pousseraient les secteurs dynamiques à produire de l’innovation et cette création de valeur ajoutée permettrait une sortie plus rapide de la crise.»

swissinfo, Frédéric Burnand à Genève

Le directeur général de l’OMC Pascal Lamy a réuni mercredi une quinzaine de représentants de banques privées et régionales.

Plusieurs banques commerciales, tels HSBC, JP Morgan, Citigroup, Royal Bank of Scotland et Commerzbank, étaient représentées.

Côté institutionnel, des représentants de la Banque mondiale (BM), du Fonds monétaire international (FMI), de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, de la Banque africaine de développement et de la Banque islamique de développement ont participé à la réunion.

Selon Pascal Lamy, cette réunion a « confirmé que le marché pour le financement du commerce s’était gravement détérioré.»

Deux problèmes majeurs ont été identifiés. L’un est un manque de liquidité pour financer les crédits soutenant le commerce. Un manque estimé à 25 milliards de dollars.

Le deuxième est une réévaluation générale des risques due autant à la crise financière qu’au ralentissement de l’économie mondiale.

Un sommet du G20 sur la crise financière se tient à Washington le 15 novembre prochain.

Les chefs d’Etat des pays industrialisés et des grandes économies émergentes vont chercher un accord sur les moyens de contenir la crise financière.

Ce sommet devrait au moins envoyer un fort signal politique pour conclure rapidement le cycle de Doha négocié actuellement par les Etats membres de l’OMC.

C’est l’espoir exprimé mardi par Catherine Ashton, la nouvelle commissaire européenne au Commerce, suite à une rencontre avec Susan Schwab, la représentante américaine au Commerce.

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