Les relations avec l’Union européenne préoccupent les Suisses de France
Des parlementaires des six principaux partis politiques suisses sont allés à la rencontre de la diaspora helvétique en France, réunie à Annecy pour son Congrès annuel. À six mois des élections fédérales, ils ont profité de cette tribune pour détailler leur position sur les relations entre la Suisse et l’Union européenne, un thème cher à la Cinquième Suisse.
En campagne pour les élections fédérales d’octobre prochain, les principaux partis politiques suisses sont partis à la conquête des voix des Suisses de France, ce week-end à Annecy. Six parlementaires étaient invités à participer à une table ronde, au 63e Congrès de l’Union des Associations Suisses de France, animé par le président de l’Organisation des Suisses de l’étranger (OSE) Filippo Lombardi.
Les relations entre la Suisse et l’Union européenne ont occupé une large place dans les débats. Un thème central pour les plus de 200’000 Suisses qui vivent dans l’Hexagone, préoccupé-es par la rupture des négociations autour de l’accord-cadre institutionnel avec l’UE par le Conseil fédéral. Les expatrié-es craignent notamment une remise en cause de l’accord sur la libre circulation des personnes, qui restreindraient leurs droits.
À Annecy, les parlementaires ont ainsi présenté leurs solutions pour pérenniser les relations entre la Suisse et ses voisins. À l’exception de l’Union démocratique du centre (UDC / droite conservatrice), tous les partis considèrent que la situation actuelle n’est pas satisfaisante et que des négociations avec l’UE doivent être relancées.
Les Suisses de France représentent la plus grande communauté helvétique de l’étranger. Ils et elles sont 206’400 à vivre dans l’Hexagone, soit 25% des 800’000 Suisses de l’étranger. Parallèlement, la Suisse accueille la plus grande diaspora française au monde.
La Suisse et la France disposent d’une frontière commune de presque 600 km et partagent une même langue. Leurs riches relations économiques, culturelles ou politiques sont régies par de nombreux accords.
La France est le 5e partenaire commercial de la Suisse. Les flux commerciaux sont particulièrement importants dans les zones frontalières. À l’inverse, la France figure au 4e rang des investisseurs étrangers en Suisse.
Relancer des pourparlers
Le député du Parti libéral-radical (PLR / droite) Laurent Wehrli a appelé à une modernisation des accords bilatéraux. «Il faut trouver rapidement des solutions politiques, qui ne soient pas guidées par la peur», a-t-il estimé, fustigeant les revendications des syndicats en matière de protection des salaires. Il a aussi regretté que les conséquences de la mise à l’arrêt des négociations autour de l’accord-cadre en 2021: «La Suisse ne peut plus participer complètement au programme pour la recherche et l’innovation Horizon Europe. Cela pousse notamment des professeurs de l’École polytechnique fédérale de Lausanne à partir dans un pays européens».
Le Conseil fédéral a commis une erreur en mettant fin aux négociations avec l’UE, considère pour sa part le député vert Nicolas Walder. «La Suisse a cru qu’elle pourrait continuer à emprunter la voie bilatérale, mais il s’agissait d’une voie temporaire. Nous avons désormais besoin d’un accord-cadre», a-t-il déclaré. Il a également rappelé que, sur le long terme, son parti soutient une adhésion à l’UE.
Du côté des Verts’libéraux (PVL / centre), la députée Céline Weber a accusé les syndicats d’être à l’origine de l’échec de l’accord-cadre, en refusant d’accepter les compromis de l’UE sur la protection des salaires. «Ils doivent maintenant venir à la table des négociations pour clarifier leurs attentes», a-t-elle martelé.
«Je passe beaucoup de temps avec les syndicats pour trouver des solutions pragmatiques. Il faut leur tendre la perche au lieu de les accuser», a défendu le sénateur socialiste (PS / gauche) Carlo Sommaruga. Il perçoit également des signaux positifs: «Le dernier communiqué du Conseil fédéral sur le sujet annonce des avancées pour le mois de juin. Nous croyons à une réouverture des négociations», a-t-il déclaré. Il a également rappelé qu’une adhésion à l’UE est toujours inscrite dans le programme du PS. «Cependant, pour l’instant, la voie bilatérale est la seule voie possible, si la Suisse ne veut pas se retrouver seule au milieu de l’Europe».
Le sénateur du Centre Charles Juillard a également estimé qu’une adhésion à l’UE était un leurre. «La population n’est pas prête à cela», a-t-il constaté. À ses yeux, le Conseil fédéral n’a pas suffisamment expliqué le contenu de l’accord-cadre. «Il doit maintenant clarifier et définir les lignes rouges que notre pays n’est pas prêt à dépasser. Nous devons savoir ce que nous voulons», a-t-il affirmé.
Sauver l’autodétermination
Seul contre tous, le député UDC Michael Buffat a salué l’abandon d’un rattachement institutionnel à l’UE, qu’il considère comme une attaque dangereuse contre l’autodétermination de la Suisse. «Nous continuerons à nous battre contre les juges étrangers qui veulent nous imposer leur volonté, comme ils ont voulu le faire avec l’accord-cadre», a-t-il averti.
Le dossier devrait prochainement franchir une nouvelle étape, selon le Conseil fédéral. Dans un communiqué diffusé fin mars, il avait estimé que la dynamique entre la Suisse et l’UE était positive et qu’il avait chargé le Département fédéral des affaires étrangères d’élaborer les grands axes d’un mandat de négociations avec Bruxelles d’ici fin juin.
Un vent nouveau à l’Union des associations suisses de France
Alors que l’Union des Associations suisses de France (UASF) ne cessait de voir disparaître des membres, elle accueille cette année trois nouvelles associations. L’amicale des Suisses du Vaucluse et Gard, les Tireurs suisses de Lyon et Genevois sans frontière viennent renforcer l’organisation. L’UASF est désormais composée de 57 associations de Suisses de France. Sa présidente Françoise Millet-Leroux salue un renouveau bienvenu après «l’état de léthargie» dans lequel la pandémie avait plongé l’organisation. La communication entre les clubs et les associations suisses des différentes régions de France a également été intensifiée, grâce à des séances communes organisées par visioconférence qui visent à mutualiser les actions.
L’UASF a également affiné son projet national, élaboré l’an dernier pour retrouver des forces vives. Elle souhaite mettre en place une bourse annuelle (dotée de 5000 euros) pour permettre à une étudiante ou un étudiant suisse de France de faire ses études en Suisse. Le Prix UASF permettra, lui, de soutenir la réalisation d’un projet professionnel innovant. Celui-ci pourra être soutenu à hauteur de 5000 euros, selon les fonds mis à disposition par des mécènes. Ces actions seront financées grâce à des dons des clubs suisses en France et des sponsors. Le projet devrait être concrétisé l’an prochain.
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