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Les zones d’ombre de Baselworld

Des manifestants utilisent des radiographies pour témoigner du problème de la silicose. Keystone

A l'occasion du Salon international de l'horlogerie, des ONG dénoncent les sombres affaires réalisées avec les pierres précieuses.

Dans leur ligne de mire: le commerce des «diamants de guerre» et les mauvaises conditions de travail des polisseurs de diamants.

«Nous voulons profiter de Baselworld pour attirer l’attention sur les conditions de travail auxquelles nous, polisseurs de diamants, sommes confrontés», explique Feng Xingzhong, ancien employé de fabrique du sud de la Chine.

Il fait partie des milliers de travailleurs qui, en Chine et en Inde, sont atteints de silicose (maladie pulmonaire incurable provoquée par l’inhalation de poussières contenant de la silice cristalline libre) pour avoir poli des pierres précieuses sans protection respiratoire.

Une campagne internationale d’information a été présentée avant l’ouverture du Salon international de l’horlogerie et de la bijouterie (Baselword). Les participants avaient été conviés à Bâle par Solifonds, une organisation d’aide au développement, et par l’Union syndicale bâloise.

Améliorer la sécurité au travail

«L’industrie horlogère devrait dédommager correctement les personnes atteintes de silicose», estime Feng Xingzhong.

Autres revendications: l’Association internationale de commerce de bijoux (CIBJO) devrait encourager ses membres à créer un fonds en faveur des victimes.

Il est en outre nécessaire d’édicter de nouvelles lignes directrices pour le travail de polissage, d’encourager l’utilisation de nouvelles technologies et de mener des contrôles réguliers pour améliorer la sécurité du travail, ce qui s’avère particulièrement difficile dans un secteur où de nombreuses personnes travaillent à la maison.

En Suisse aussi, les acteurs de l’horlogerie doivent prendre leurs responsabilités. «Baselworld devrait, lorsqu’elle lance ses invitations, jeter un œil critique sur les conditions de travail et exclure les entreprises qui violent les droits des travailleurs», estime le député socialiste bâlois Remo Gysin, membre du Conseil de fondation de Solifonds.

Baselworld veille au grain

«Nous prenons ces questions au sérieux et nous resterons en contact avec les initiateurs de cette campagne», affirme Bernhard Keller, responsable de la communication de Baselworld, après une rencontre avec les représentants des ONG.

A l’avenir, le Salon attirera clairement l’attention de ses exposants sur le fait qu’il prendra en compte les conditions de travail avant de les autoriser à venir à Bâle. Et s’il obtient la preuve que celles-ci sont mauvaises, il pourra exclure tel ou tel exposant.

Bernhard Keller ajoute que Baselworld «recherche le dialogue» avec deux entreprises de Hong Kong qui sont actuellement au Salon et qui se trouvent dans le collimateur des ONG.

Responsabilité de l’acheteur

Les organisations Amnesty International (AI) et Global Witness se sont de leur côté adressées aux clients et aux marchands, en distribuant une brochure sur les «diamants de guerre», appelés aussi «diamants du sang», et en tenant un stand d’information.

«Chez nous, les diamants symbolisent l’amour. Ailleurs, mais principalement en Afrique, ils servent à financer la haine», explique Danièle Gosteli Hauser, responsable d’AI pour l’économie et les droits de l’homme.

Ces «diamants de guerre» ont ainsi permis aux parties en guerre de s’armer, en Angola, dans la République démocratique du Congo, au Libéria et en Sierra Leone notamment. Actuellement, c’est en provenance de Côte d’Ivoire, selon AI et Global Witness, que parviennent des diamants sur les marchés internationaux.

Trop peu de mesures

Depuis 2003, un système de certification étatique pour les pays producteurs et les pays commerçants, le «processus Kimberly», a certes permis d’améliorer le contrôle des diamants bruts.

De plus, l’industrie du diamant s’est mise d’accord sur un système volontaire international de garanties et de lignes directrices sur les comportements admis.

Mais les acheteurs continuent à trouver bien peu de certificats d’origine avec leurs factures. C’est ce qu’a montré une enquête réalisée également en Suisse par AI et Global Witness en 2004.

L’association veut agir

Les deux ONG recommandent donc aux acheteurs d’exiger un certificat d’origine pour faire pression, indirectement, sur la branche.

De l’avis de Marc-Alain Christen, président de l’Union de la bijouterie et de l’orfèvrerie suisse (UBOS), des progrès ont été réalisés, mais un travail de sensibilisation reste nécessaire.

L’UBOS entend d’ailleurs soumettre à ses membres un label de qualité attestant du respect de lignes directrices concernant l’origine des matériaux. Ces principes permettraient aussi de reconnaître des prestations environnementales, l’interdiction du travail des enfants et le respect de la santé et des droits des travailleurs.

swissinfo et Dominique Schärer, InfoSud
(Traduction de l’allemand: Ariane Gigon Bormann)

Baselworld est le plus vaste et le plus important des salons commerciaux dans le domaine de l’horlogerie et de la bijouterie.

Avec une surface de 160’000 m2, c’est aussi le plus gros événement commercial organisé en Suisse.

Quelque 90’000 visiteurs de plus de 100 pays sont attendus cette année au sein des stands présentant nouvelles collections et dernières tendances.

Ce salon est aussi un indicateur de la marche des affaires pour la suite de l’année dans les industries horlogère et de la bijouterie.

Baselworld accueille cette année 2127 exposants de l’horlogerie et la bijouterie.
283 marques suisses sont présentes dans l’horlogerie, 53 dans la bijouterie.
Indicateur de croissance, la taille moyenne des stands a augmenté de 30% (de 39 à 52 m2) ces cinq dernières années.
Le salon se tient jusqu’au 6 avril.

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