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DPI: «la liberté de choisir face à une grande souffrance»

Rédaction Swissinfo

Un an après l’acceptation de l’article constitutionnel qui ouvre la voie à l’autorisation du diagnostic préimplantatoire (DPI), c’est la loi d’application qui est soumise à votation. Pour l’ancien sénateur vert Luc Recordon, il faut transformer l’essai et dire oui à la possibilité de choisir ainsi offerte aux parents. 

Le 14 juin 2015, la base du DPI a été inscrite à l’article 119 alinéa 2 de la Constitution fédérale. Le peuple a dit oui à 61,9 % et les cantons à 18 ½ contre 4 ½. Un an plus tard, nous retournerons aux urnes pour nous prononcer sur la loi d’application votée par le parlement, qui a fait l’objet d’une demande de référendum; seule la majorité du peuple sera nécessaire. Il importe de réitérer notre approbation.

La base qui est désormais acquise est la liberté de choisir face à une grande souffrance. Les couples porteurs d’une maladie héréditaire grave et ceux qui ne peuvent pas procréer par voie naturelle doivent pouvoir recourir à l’analyse génétique d’un embryon obtenu par insémination artificielle, avant qu’il ne soit implanté dans l’utérus de la mère. Le but est de leur permettre de sélectionner un embryon qui ne soit pas porteur d’un gène gravement défectueux. Cela leur évite d’attendre plusieurs mois de grossesse pour le faire et de ne décider qu’alors s’ils veulent ou non interrompre la gestation.

Luc Recordon est ingénieur physicien et avocat. Il a siégé successivement dans les deux Chambres du parlement fédéral, entre 2003 et 2015, pour les Verts. Il est né avec le syndrome de Holt-Oram. Keystone

Avoir un enfant fortement handicapé ou y renoncer, cela constitue un choix intime sur lequel quiconque ne saurait se substituer aux parents potentiels. Il n’est pas admissible non plus de refuser un diagnostic à un stade très précoce et de renvoyer la future mère à la seule possibilité d’un avortement, bien plus tardif.

Mais, si la loi n’est pas acceptée le 5 juin 2016, ces excellents principes demeureront longtemps encore lettre morte. Rappelons que sur certains points, la Constitution est restée inappliquée pendant des décennies, un demi-siècle dans le cas de l’assurance maternité!

Or, un peu plus ouverte que le projet initial du Conseil fédéral, la loi n’en est pas moins très prudente. Il sera toujours interdit – et punissable – de choisir des embryons en fonction de leur sexe ou d’autres aspects physiques secondaires, telles la taille, la couleur des yeux ou les caractéristiques de la chevelure. Les couples concernés ne pourront être que ceux qui sont porteurs d’une maladie héréditaire grave ou qui ne peuvent pas procréer par voie naturelle et doivent sérieusement craindre que l’implantation de l’embryon ne soit suivie d’une difficulté de développement, voire d’une fausse couche. De surcroît, la conception de «bébés médicaments», qui auraient pour rôle de faire don de cellules souches à un frère ou à une sœur gravement malade, sera elle aussi exclue. Enfin, lors de chaque cycle, on ne pourra développer que douze embryons, au plus.

Ajoutons que, par rapport à la procréation assistée actuellement pratiquée, le système retenu évite non seulement nombre de grossesses problématiques, mais encore la conception de jumeaux ou de triplés, qui est risquée pour la santé de la mère et de l’enfant.

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La principale critique des référendaires vise le risque de marginalisation accrue qu’encourraient les personnes en situation de handicap si leur nombre venait à diminuer beaucoup. C’est ici le lieu de réaffirmer avec force qu’il n’est nullement question de pousser les couples à renoncer à avoir un enfant handicapé, mais à l’inverse de prendre leur décision en toute connaissance de cause. Les votants l’ont compris en 2015, puisque cet argument était déjà avancé en tête de liste par ceux qui s’opposaient à l’article constitutionnel.

D’ailleurs, le droit de chacune et de chacun de vivre sa vie dans la dignité et de bénéficier de la solidarité de la société est encore renforcé par la loi. Elle instaure en effet un conseil professionnel aux couples notamment sur la fréquence et la gravité de la maladie en cause, la probabilité qu’elle se manifeste, les mesures de lutte contre elle, les projets de vie possibles pour un enfant atteint et – last but not least – sur les associations de parents d’enfants handicapés, les groupes d’entraide, ainsi que les services d’information et de conseil.

Placé devant ce texte équilibré, qui évitera bien des souffrances, dont j’ai l’expérience personnelle, et n’obligera plus les couples à risque à aller obtenir un DPI à l’étranger, s’ils ont assez d’argent pour ça, j’ai voté oui au parlement. J’espère vivement que mes concitoyennes et concitoyens feront de même.

Les opinions qui sont exprimées dans ce texte sont celles de son auteur et ne correspondent pas nécessairement à celles de swissinfo.ch.


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