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Quand la Chine renoncera au charbon

Le centre de Shenyang. son smog, sa centrale à charbon. Alain Arnaud

La Chine est désormais le premier émetteur mondial de gaz à effet de serre. Malgré les promesses, ses émissions vont continuer à augmenter massivement. La communauté internationale, et notamment la Suisse, peut l'aider à évoluer vers une économie plus propre.

C’est une grosse chaudière en fonte rouge vif, de construction récente. Elle chauffe les nombreux ateliers d’une usine de peintures et vernis qui compte 140 employés et s’étend sur une vingtaine d’hectares dans la banlieue de Shenyang, la capitale de l’état industriel du Liaoning, dans le nord-est de la Chine.

Une montagne de charbon va permettre de passer l’hiver. Rien que de très banal dans un pays dont l’économie dépend à au moins 70% d’une énergie produite à partir du charbon.

Le patron, dynamique, entreprenant, formé dans les meilleures écoles de Shanghai, a repris les rênes de l’entreprise familiale. Il préfère qu’on ne cite pas son nom, ni celui de sa compagnie, on n’est jamais trop prudent. «Brûler du charbon, c’est la méthode habituelle, et surtout de loin la moins chère», dit-il.

«Mais je vais très prochainement passer au bureau de l’environnement, me renseigner sur les méthodes de chauffage alternatives, le gaz ou le mazout. Je veux améliorer la qualité de l’air, pour ma famille, pour mes employés, pour moi-même», ajoute l’homme, qui prévoit aussi d’équiper son système de chauffage de filtres, pour limiter les émissions.

Son entreprise produit du vernis pour meubles, principalement à base d’huile, peu respectueux de l’environnement. Mais elle développe également des produits à base d’eau, nettement plus écologiques, et le gouvernement finance ses efforts de recherche. Cela dit, les vernis à l’huile sont plus résistants, le consommateur chinois les préfère. «Aussi longtemps que le gouvernement n’en interdit pas la production, je ne vois pas comment nous pourrions cesser d’en faire», constate le jeune patron.

Conscience écologique

Shenyang et le Liaoning étaient jadis le fief des grandes entreprises d’état, aciéries, cimenteries, mines de charbon, avant de connaître un déclin dont ils se sont sortis grâce à la campagne de «revitalisation du nord-est» et le dynamisme des PME privées.

Exemple parmi des milliers d’autres, cette menuiserie qui emploie une soixantaine de travailleurs. Là encore, le vice-directeur préfère garder l’anonymat. «Nous chauffons nos locaux au charbon et aux copeaux de bois», explique-t-il. «Le gouvernement est devenu très attentif aux questions environnementales. Comme la plupart des PME dans la région, nous avons au sein de notre direction une personne en charge de ces questions.»

C’est l’émergence d’une conscience écologique en Chine. Jiang Yong Nian est expert en climat chez Greenpeace à Pékin. «La Chine a besoin du charbon. Mais elle doit réduire sa dépendance, en commençant par fermer ses petites centrales à charbon, peu productives et très polluantes. Elle doit ensuite ajouter le gaz naturel à son portfolio énergétique, et adopter une approche globale. Certaines études concluent que la Chine a la capacité de produire la totalité de ses besoins en courant électrique à partir de l’énergie éolienne. Greenpeace estime qu’elle doit réduire sa dépendance au charbon à moins de 50%.»

Avec l’aide de l’Occident

Deux semaines avant l’ouverture du sommet climatique de Copenhague, la Chine a annoncé ses objectifs en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre: diminution de 40 à 45 % par point de PIB d’ici à 2020, par rapport à 2005.

Le vice-ministre Xie Zhenhua, principal négociateur sur le climat, déclarait devant la presse que ces objectifs seraient «très difficiles à atteindre, c’est ce que nous allons tenter de réaliser avec nos propres ressources. Mais si les pays développés décidaient de nous soutenir, il est possible que nous y arrivions mieux et plus rapidement.» Allusion à la responsabilité historique des pays industrialisés, priés par la Chine de passer à la caisse, notamment en matière de transfert technologique.

La Suisse en a conscience. Au risque de déplaire aux partis politiques de la droite dure qui siègent à Berne, l’agence publique de coopération au développement (DDC) et l’Office fédéral de l’Environnement viennent d’intensifier leurs soutiens à la Chine dans ses efforts pour limiter ses émissions de gaz polluants, une action qui s’inscrit dans le cadre du Programme global Changement climatique.

«Toute une série de projets sont en chantier, il est encore un peu trop tôt pour en parler en détail», déclare Walter Meyer, de la DDC, le «Monsieur climat» à l’ambassade de Suisse à Pékin, qui a pris ses fonctions en août de cette année. «Les émissions chinoises de gaz à effet de serre ont aussi une influence sur le climat en Suisse. Nous devons aider la Chine à en limiter l’intensité.»

Alain Arnaud, swissinfo.ch, Pékin.

Lancé suite à l’adoption par le Parlement du «Message Sud» en 2008, le PGCC se consacre à la protection du climat et la gestion des changements climatiques dans le monde.

Doté d’un budget annuel de 20 millions de francs, il entend «Eviter ce qui ne peut être maîtrisé» (mitigation, efforts pour remédier aux émissions à effet de serre engendrées par l’être humain) et «maîtriser ce qui ne peut être évité» (adaptation aux changements climatiques reconnus comme inéluctables).

Sous la conduite de la Direction du Développement et de la Coopération, le PGCC compte parmi les tâches-clés inhérentes à la réduction de la pauvreté, au développement durable et à l’aide humanitaire.

La Suisse et la Chine ont signé en février 2009 un accord pour intensifier leur collaboration dans le domaine de l’environnement. La Suisse collabore avec la Banque mondiale pour étudier l’impact des changements climatiques dans le domaine des eaux, et avec l’ASEAN (Association du Sud-Est asiatique) dans celui des forêts.

Elle anime un forum pour la révision de la législation chinoise sur la pollution de l’air et soutient plusieurs projets de société à bas carbone et de villes moins polluantes.

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