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Election d’Ignazio Cassis: le choix de la cohésion nationale

Ignazio Cassis
Avec le nouveau ministre Ignazio Cassis, l'"italianità" est de retour au gouvernement suisse. Keystone/Peter Klaunzer

La presse suisse salue le retour d’un italophone au Conseil fédéral après 18 ans d’absence. Si elle a certes manqué de panache, l’élection du Tessinois Ignazio Cassis au gouvernement couronne le respect des minorités qui composent la Suisse.

«Tout ça pour ça!», s’exclame l’éditorialiste de La Liberté. «Au terme d’une campagne hypermédiatisée de trois mois, en dépit de l’importance relative de l’enjeu, l’élection au Conseil fédéral a consacré hier le grandissime favori Ignazio Cassis», commente le quotidien fribourgeois.

Dans la même veine, Le Temps résume ainsi la journée d’élection: «Le moment d’émotion du sortant, un vote sans surprise qui remet le Tessin à l’exécutif après dix-huit ans d’absence et, au final, des institutions respectées.» Le journal édité à Genève estime que le nouveau conseiller fédéral «n’a pas de quoi emballer les foules», tout en soulignant que «ce n’est pas une qualité requise pour devenir conseiller fédéral». «Le système politique privilégie la retenue en toutes choses.»

Manque d’audace

Ignazio Cassis est ainsi présenté comme le candidat qui s’est imposé pour satisfaire la cohésion nationale. La Tribune de Genève le dépeint comme «un pur produit helvétique»: «Il incarne le compromis, de droite. Il est plurilingue, chérit le système et promeut les minorités sans faire de vagues. Selon les standards de la mythologie helvétique, il se montre efficace comme un Alémanique, enjôleur comme un Romand, chaleureux comme un Tessinois.»

Déplorant un choix peu audacieux, le quotidien genevois ne manque pas de saluer la performance du candidat de son canton Pierre Maudet, «l’outsider, le candidat de la rupture, qui aurait fait souffler sur Berne le même vent rafraîchissant qui a accompagné sa campagne. Une campagne d’idées et de contenu, un rien iconoclaste. Trop pour le parlement.»

Même son de cloche du Journal du Jura qui déplore: «Les parlementaires ont hélas manqué de courage et n’ont pas eu l’audace de franchir le Rubicon en choisissant Pierre Maudet. Des trois candidats, et malgré son jeune âge – 39 ans –, l’homme fort du Gouvernement genevois était assurément le mieux taillé pour la fonction.»

Un ministre affranchi des liens d’intérêts?

La presse alémanique se montre également enthousiaste. «Un choix judicieux» titre la Neue Zürcher Zeitung (NZZ) «L’Assemblée fédérale a fait preuve de responsabilité civique et a élu Ignazio Cassis. C’est maintenant à lui de prouver qu’il peut mener au gouvernement une politique économique et sociale, en s’affranchissant des intérêts particuliers», écrit le journal zurichois.

L’éditorialiste affirme qu’Ignazio Cassis a été depuis le début un candidat compétent et dénonce les vaines tentatives de ses adversaires à gauche de le discréditer, en pointant du doigt sa proximité avec les caisses maladie. Accuser Ignazio Cassis d’être un lobbyiste était hypocrite, car la plupart des parlementaires ont des liens d’intérêts: «Dans les rangs socialistes se trouvent aussi des représentants de groupes d’intérêts, des syndicalistes et des protecteurs des consommateurs.»

Affaires étrangères

«Qui fera quoi dans le nouveau collège?», s’interrogent L’Impartial et L’Express. Les quotidiens neuchâtelois imaginent le nouvel élu tessinois à la tête de la diplomatie suisse et redoutent que la Suisse ne «se referme» et oublie les «vertus réconciliatrices» du démissionnaire neuchâtelois, qui avait su incarner «une Suisse garante du dialogue et de la paix». «Le toubib de Montagnola a bien réaffirmé hier qu’il privilégierait la voie bilatérale notre voisin européen, on attend pour voir s’il le peut.»

«Réussir à rendre au gouvernement les couleurs de l’italianité est la confirmation que la Constitution a un poids et un sens profond.»

Le Tages-Anzeiger et le Bund relèvent qu’il a été «jusqu’à maintenant vague» sur le dossier des relations avec l’Union européenne. «Cela doit changer», car la politique européenne est aussi «un travail de persuasion en Suisse». L’Aargauer Zeitung aimerait, elle, «voir un ministre des Affaires étrangères eurosceptique devoir convaincre sur les juges étrangers les Alémaniques réfractaires».

«Et ensuite une femme!»

Avec Ignazio Cassis, le gouvernement suisse reste composé de cinq hommes et deux femmes. Or, la présidente de la Confédération Doris Leuthard a annoncé sa démission à la fin de la législature. Pour de nombreux commentateurs, il ne fait pas de doute qu’à l’heure de la remplacer viendra le tour d’une femme. «Le couronnement de Cassis a des conséquences: les femmes ont désormais de meilleures cartes au poker pour l’élection au Conseil fédéral! Car lorsque Doris Leuthard se retire, Simonetta Sommaruga sera la seule femme», écrit le Blick, listant de nombreuses candidates potentielles dans différents partis.

La NZZ est également formelle: «Après l’élection d’Ignazio Cassis, la pression pour élire une femme sera encore plus forte, lors des prochaines élections.»

Le retour de l’«italianità»

«Et maintenant qu’apportera cette élection à la Suisse?», interroge de son côté La Regione. «La présence d’un ministre italophone la fera briller davantage par sa sensibilité pour les minorités qui la composent», répond le journal tessinois. Rappelant que le nouveau ministre s’est défini comme «un forgeron pour l’unité de notre pays», il conclut: «Réussir à rendre au gouvernement les couleurs de l’italianité – après de nombreuses tentatives avortées et après presque vingt ans d’absence de l’exécutif fédéral – est la confirmation que la Constitution a un poids et un sens profond.»

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