Au Salon, on carbure aussi à l’hydrogène
La voiture de demain devrait marcher à l'hydrogène. Dans cette course au moteur 100% propre, la Suisse joue placée.
C’est incontestablement une des attractions du 72ème Salon de l’auto qui vient de s’ouvrir à Genève. Extérieurement pourtant, la VW Bora HY.POWER (HY pour hydrogène) se distingue à peine de sa cousine à essence. La différence est sous le capot.
En lieu et place du moteur traditionnel, le fabricant allemand a installé une pile à combustible (PAC), mise au point en Suisse, par les ingénieurs de l’Institut Paul Scherrer.
Et pour assurer à la voiture le supplément de puissance nécessaire au démarrage ou lors des dépassements, Volkswagen utilise un autre produit helvétique: les super-condensateurs de Montena, une entreprise de Rossens (FR).
Une technologie vieille de 160 ans
A vrai dire, l’idée de la PAC est presque aussi vieille que celle du moteur à explosion, puisque le plus ancien exemplaire connu a été mis au point en 1839.
Schématiquement, il s’agit d’une sorte de moteur immobile et silencieux. A l’intérieur, deux électrodes font réagir entre eux l’hydrogène du réservoir et l’oxygène de l’air ambiant. La rencontre des deux éléments produit du courant électrique, de la chaleur et de la vapeur d’eau.
Pas de dégagement de gaz toxiques, pratiquement pas d’usure mécanique et un rendement trois fois supérieur à celui du moteur à essence pour la même quantité de carburant: c’est quasiment le moteur idéal.
Pourtant, il n’a été que très peu utilisé jusqu’ici, si ce n’est par la NASA. Déjà à l’époque glorieuse du programme Apollo, ce sont les PAC qui fournissaient le courant aux vaisseaux partant à la conquête de la lune.
Mais les PAC d’alors présentaient l’inconvénient majeur d’être bien trop volumineuses pour être embarquées dans une voiture, à moins de manger toute la place normalement dévolue au coffre et aux sièges arrière.
«Boostée» aux super-condensateurs
«Depuis quelques années, on a fait d’immenses progrès dans les matériaux utilisés pour fabriquer les PAC», explique Philippe Dietrich, ingénieur à l’Institut Paul Scherrer. Si bien qu’aujourd’hui, on peut aisément faire entrer une pile à combustible sous le capot d’une voiture de série.
Avant de venir trôner au Salon, la VW Bora HY.POWER a été testée sur la route du Col du Simplon. Au volant, Philippe Dietrich a pu apprécier le silence du moteur et la puissance des accélérations.
Pour arriver à ces performances, il aura fallu recourir à une astuce. La PAC ne développe en effet qu’une énergie linéaire. Lorsque le conducteur appuie sur le champignon, la voiture a donc besoin d’un supplément de puissance.
Pour le lui offrir, le fabricant a installé des super-condensateurs. Ces sortes de batteries capables de se remplir et de se vider en quelques secondes sont alimentées par la PAC lorsque la voiture tourne en régime de croisière et récupèrent également l’énergie des freinages.
Seuls quatre fournisseurs au monde étaient capables de fabriquer les super-condensateurs idoines. Et parmi eux, c’est l’entreprise Montena, installée à Rossens, dans la campagne fribourgeoise, qui a décroché la timbale. Spécialisée dans les condensateurs depuis pratiquement un siècle, Montena travaille également beaucoup pour l’industrie ferroviaire.
Le plein d’hydrogène
Ainsi équipée, la VW Bora HY.POWER semble disposer de tous les atouts pour s’imposer. Mais elle n’est – et de loin – pas la seule dans son créneau. Aujourd’hui, pratiquement tous les grands constructeurs automobiles investissent massivement dans la technologie à l’hydrogène.
Mais aucun d’entre eux ne se risquerait à prédire une fabrication en série – et donc un prix d’achat abordable – avant 10 à 15 ans. Se posera ensuite la question du ravitaillement.
On imagine les résistances de l’industrie pétrolière, obligée en cas de généralisation des voitures à PAC, de revoir entièrement ses réseaux de production et de distribution.
Certains géants de l’or noir ont senti venir le vent et se mettent, eux aussi, à investir massivement dans la recherche sur l’hydrogène. La production de ce précieux gaz passe en effet par l’électrolyse de l’eau. Et même si le procédé est peu satisfaisant d’un point de vue écologique, une des énergies utilisables pour ce faire est précisément le pétrole.
swissinfo / Marc-André Miserez
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