Bruxelles veut des voitures plus propres
Malgré de fortes divisions, la Commission européenne a approuvé mercredi un règlement sur la réduction des émissions de CO2 pour les nouvelles voitures. Ces mesures sont prévues pour 2012.
La Suisse devrait suivre les normes européennes. Son Parlement a récemment adopté une motion demandant au gouvernement de s’aligner sur les décisions de l’Union européenne.
La Commission européenne propose d’infliger des sanctions progressives à partir de 2012 aux constructeurs automobiles n’atteignant pas leurs objectifs de réduction d’émissions de CO2 à cette date.
Ces sanctions seraient de 20 euros (33,15 francs) par gramme de C02 en trop en 2012, 35 euros en 2013, 60 euros en 2014 et 95 euros en 2015, selon ces propositions présentées mercredi.
Chaque constructeur vendant des voitures en Europe se verra assigné un objectif d’émissions spécifique, pour arriver à une moyenne globale de 130 grammes de CO2 émis au kilomètre sur l’ensemble du parc automobile neuf en Europe.
L’objectif par constructeur sera fixé en fonction du poids des véhicules vendus, mais les constructeurs des voitures les plus lourdes, et donc les plus gourmandes en carburant, devront faire les efforts les plus importants, précise la Commission.
Les mesures préconisées par la Commission européenne ne sont qu’au début du processus législatif et devront être adoptées d’un commun accord avec le Parlement européen et les ministres des 27 pays membres.
Vives réactions
Ces propositions sont très controversées au sein de la Commission. Mais aussi parmi les constructeurs européens. C’est naturellement en Allemagne –principal producteur européen d’automobiles – que les réactions ont été les plus vives.
Depuis plusieurs semaines, les groupes automobiles allemands multiplient les avertissements en direction de Bruxelles, menaçant de délocaliser une partie de leur production et de supprimer plusieurs dizaines de milliers d’emplois rien qu’en Allemagne, où le secteur automobile emploie plus de 740’000 personnes et pèse plus que tout autre dans l’économie.
Le gouvernement allemand a lui aussi fustigé les propositions de la Commission, les jugeant «totalement inappropriées» et «déséquilibrées». «Elles interviennent dans la compétition existante au détriment surtout des constructeurs allemands», a critiqué le porte-parole adjoint du gouvernement, Thomas Steg.
«Pathétiques»
Le son de cloche est très différent auprès des milieux de défense de l’environnement. Les écologistes ont jugé très insuffisantes les propositions présentées par la Commission européenne.
«Alors que la semaine dernière à Bali, l’Union européenne rugissait comme un lion pour défendre le climat, aujourd’hui son bras exécutif file doux comme un agneau en plaçant les bénéfices à court terme des constructeurs avant notre survie à tous», a souligné Franziska Achterberg, expert des questions de transport chez Greenpeace.
L’organisation dénonce notamment «des pénalités trop faibles» pour les constructeurs. «Les responsables européens veulent réduire de façon ambitieuse les émissions de CO2 d’ici 2020, mais la Commission a pondu une proposition législative pathétique qui n’exige aucun changement substantiel du transport routier», poursuit l’organisation.
Le vice-président du groupe des Verts au Parlement européen, le Luxembourgeois Claude Turmes, a qualifié ces propositions, «premier test après la conférence de Bali», d’«échec flagrant de l’UE».
La Suisse emboîte le pas
Les nouvelles valeurs-limites européennes, pour autant qu’elles soient adoptées par les Etats de l’Union européenne et le Parlement européen, vaudront aussi pour la Suisse.
Le Parlement suisse a en effet transmis cette année au gouvernement une motion qui enjoint ce dernier d’aligner sur les normes européennes les dispositions helvétiques concernant les émissions moyennes de CO2 des voitures de tourisme nouvellement mises en circulation.
La mise en application de ces normes, qui se heurtent à de fortes réticences dans les pays constructeurs d’automobiles, n’ira cependant pas sans poser des problèmes, car le parc automobile suisse est constitué de bon nombre de grosses cylindrées.
Quoi qu’il en soit, l’Office fédéral de l’énergie salue la décision de la Commission européenne. «Cela va dans la bonne direction, a indiqué à swissinfo Pascal Previdoli, chef de la section Politique de l’énergie auprès de l’Office fédéral de l’énergie. A eux seuls, les objectifs ne suffisent pas; il faut aussi des sanctions.»
swissinfo et les agences
Selon une étude, quatre Suisses sur cinq estiment aujourd’hui que le changement climatique représente un risque majeur, alors qu’ils n’étaient qu’un peu plus de 50% en 1994.
Les problèmes environnementaux occupent la troisième place en matière d’urgence dans l’esprit des personnes interrogées (79%), derrière le financement de l’AVS (88%) et les coûts de la santé (88%).
Présentée mercredi par l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ), l’enquête confirme aussi une constatation faite en 1994: les femmes sont plus sensibles à l’environnement que les hommes.
En revanche, les différences entre régions se sont estompées avec le temps. La Suisse romande est devenue plus «verte». Les Romands, comme les Tessinois, sont même plus sensibles aux risques liés à l’énergie nucléaire que les Alémaniques.
Cette étude a été réalisée par téléphone auprès de plus de 3300 ménages entre novembre 2006 et mars 2007. La moitié a répondu aux questions.
L’automobiliste suisse préfère les voitures lourdes et de grosse cylindrée, relativement gourmandes en carburant.
Selon une étude de l’Office fédéral de l’énergie portant sur les émissions de gaz de voitures neuves en 2004, la valeur moyenne en Suisse s’inscrivait à 192 grammes de CO2/kilomètre. Elle dépassait ainsi nettement la moyenne des 15 Etats de l’UE d’alors.
Seule la Suède, avec 196 grammes de CO2/litre en moyenne, dépassait encore la Suisse. A titre de comparaison, les valeurs pour l’Allemagne étaient ressorties à 174 grammes, pour l’Autriche à 161 grammes, pour la France à 152 grammes et pour l’Italie à 149 grammes.
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