Doris Leuthard évoque le problème ‘Emmentaler’ à Bruxelles
Pour sa première visite à Bruxelles, la nouvelle ministre suisse de l'économie Doris Leuthard a évoqué des dossiers agricoles avec ses interlocuteurs.
La conseillère fédérale vise une protection des produits suisses d’appellation d’origine contrôlée sur le marché européen. Les partenaires européens ne veulent pas céder sur la question de l’Emmentaler.
Deux dossiers en particulier étaient mardi au centre de la première visite de Doris Leuthard à Bruxelles, durant laquelle la conseillère fédérale a notamment rencontré les ministres de l’économie et des finances de l’UE et de l’AELE (Association européenne de libre-échange, dont font partie, outre la Suisse, l’Islande, le Liechtenstein et la Norvège).
Le premier concerne un éventuel accord de libre-échange dans le secteur agricole avec l’Union européenne. Mais de véritables négociations ne sont cependant pas encore à l’ordre du jour car le gouvernement suisse ne décidera qu’au printemps 2007 de sa réelle volonté d’entrer en tractations sur ce sujet.
L’autre dossier est d’envergure plus modeste, mais il concerne un problème qui donne bien du fil à retordre aux exportations agricoles helvétiques.
A l’exemple d’autres pays européens, à commencer par la France, la Suisse a introduit ces dernières années des appellations d’origine contrôlée (AOC) destinées à distinguer et à protéger ses produits agricoles de la concurrence sur les marchés étrangers.
Mais jusqu’ici, et malgré les diverses demandes transmises par Berne, ces marques ne sont pas reconnues par l’UE.
Le problème concerne en particulier l’Emmentaler et le Gruyère, deux fromages qui sont aussi produits sous le même nom dans d’autres pays européens. Notamment en France, en Allemagne et en Italie.
La confiance de Doris Leuthard
La question de la reconnaissance des AOC se trouve au centre des discussions entre la Suisse et l’UE depuis 1999.
Mardi, au terme de son entretien avec la Commissaire européenne chargée de l’agriculture et du développement rural Mariann Fischer Boel, Doris Leuthard se montrait plutôt optimiste sur la possibilité d’obtenir de la part des Vingt-Cinq une reconnaissance des produits AOC.
«La volonté réciproque de parvenir à un accord est grande», a déclaré la ministre suisse de l’Economie. Selon elle, dans les mois à venir, la Commission européenne devrait transmettre à Berne un mandat pour l’ouverture de négociations.
«Nous sommes effectivement en train de préparer un mandat sur cette matière», a confirmé le porte-parole de la commissaire Mariann Fischer Boel. Mais elle n’a pas précisé si l’UE entendait négocier sur la reconnaissance du registre AOC helvétique.
Le problème ‘Emmentaler’
Trouver une solution au problème devient toutefois urgent. La Suisse et l’UE entendant en effet libéraliser le marché des produits fromagers en 2007.
Plusieurs pays européens ne semblent pour l’heure pas disposés à reconnaître l’AOC de l’Emmentaler. A leurs yeux, ce fromage ne peut pas être considéré comme une spécialité régionale puisqu’il est produit dans de nombreux pays.
«Le problème Emmentaler existe», a confirmé Doris Leuthard.
Des signaux positifs
La commissaire européenne s’est par contre exprimé beaucoup plus positivement sur la perspective d’un accord de libre-échange dans l’agriculture entre la Suisse et l’Union européenne.
Toutefois, sur ce point également les positions restent pour l’instant divergentes. Bruxelles serait en effet plutôt favorable à une simple suppression des droits (taxes) agricoles.
La Suisse voudrait par contre étendre cette libéralisation aux secteurs en lien avec celui de l’agriculture.
Berne insiste en outre sur l’introduction de règles communes. Par exemple sur la question des pesticides, des fertilisants et sur celle de la sécurité des tracteurs. De fait, la route menant à la conclusion d’un accord bilatéral de libre-échange sur l’agriculture semble donc encore bien longue.
swissinfo, Simon Thönen à Bruxelles
(Traduction et adaptation de l’allemand: Mathias Froidevaux)
En 2005, 167’706 tonnes de fromage ont été produites en Suisse, dont 32’181 d’Emmentaler.
Depuis plusieurs décennies, l’Emmentaler est le fromage suisse le plus exporté. En 2005, 23’878 tonnes ont été vendues à l’étranger.
Ce fromage doit son nom à la vallée de l’Emme, dans le canton de Berne. Aujourd’hui, il est cependant produit dans diverses autres régions de Suisse et, au-delà, dans d’autres pays européens (surtout en France et en Allemagne).
Pour favoriser la reconnaissance et la protection des produits agricoles suisses, les autorités helvétiques ont introduit ces dernières années des appellations d’origine contrôlée (AOC et IGP).
L’Appellation d’origine contrôlée (AOC) garantit que toutes les étapes de production et de transformation se font dans une même région géographique avec des matières premières de cette région. Le Gruyère ou l’abricotine du Valais en sont des exemples.
L’Indication géographique protégée (IGP) atteste qu’au moins une étape de production se fait dans une région géographique définie. La matière première peut provenir de l’étranger. La viande des Grisons est un exemple connu.
La Suisse compte à l’heure actuelle 21 spécialités AOC ou IGP reconnues. Elles sont protégées dans le pays mais leur reconnaissance internationale est très faible.
L’UE a son propre registre. Des négociations de reconnaissance mutuelle devraient débuter bientôt.
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