En 20 ans, Monsieur Prix a gagné en maturité
Le premier Monsieur Prix est entré en fonction en 1986. Depuis, ses intervention ont contribué à faire baisser les tarifs en Suisse, pays traditionnellement cher.
Les consommateurs ne sont pas les seuls gagnants: pratiquement tous les anciens surveillants des prix sont devenus populaires. Deux sont même devenus ministres.
Il y a encore deux ans, lorsque le Glaronnais Werner Marti a donné sa démission, le gouvernement suisse voulait céder aux pressions du camp néolibéral et supprimer la fonction du surveillant des prix. Aujourd’hui, plus personne ne songe à déboulonner Rudolf Strahm, l’actuel titulaire de la fonction.
Personnalité incontestée
«Il a montré qu’un surveillant des prix pouvait exercer sa fonction en alliant une parfaite connaissance des dossiers avec le courage et la détermination. Cette fonction est aujourd’hui largement reconnue au sein de la population mais aussi dans l’économie et la politique», confie Simonetta Sommaruga à swissinfo.
Depuis 2000, cette députée socialiste à la Chambre basse (Conseil national) du Parlement suisse préside la Fondation pour la protection des consommateurs (SKS). Dans sa fonction antérieure de secrétaire générale de cette fondation, Simonetta Sommaruga a été pendant des années à la tête de la défense des consommateurs en Suisse.
Rudolf Strahm fait l’unanimité au-delà des limites de partis. «Il fait un très bon travail», reconnaît Franz Jaeger, professeur d’économie à l’Université de Saint-Gall. Opposé par principe à tout interventionnisme de l’Etat, l’économiste avait autrefois demandé la suppression de la surveillance des prix ou au moins son intégration dans la Commission de la concurrence.
La bonne réputation du surveillant des prix réside dans le fait qu’il ne se contente pas de déclarer la guerre aux entreprises privées, mais examine aussi les tarifs pratiqués par des organismes publics.
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Monsieur Prix
Une action au coeur des structures
«Nous avons besoin d’un Monsieur Prix actif et courageux, comme celui que nous avons actuellement, qui n’a pas peur d’aborder des choses désagréables», résume Simonetta Sommaruga.
Dans les faits, Rudolf Strahm a une compréhension de sa fonction plus large que ses prédécesseurs: son action ne se limite pas au prix de la tasse de café ou du verre de bière mais porte aussi sur les structures cachées qui favorisent les prix artificiellement élevés.
Le surveillant des prix a ainsi dénoncé le diktat des fournisseurs de semences et d’engrais pour les exploitants agricoles et a dénoncé la «toute puissance de l’Etat sur les prix», conséquence d’une véritable jungle dans les réglementations.
Rudolf Strahm plaide en outre inlassablement en faveur d’une autorisation des importations parallèles, ce qui permettrait de réduire la facture des importations de 20% soit de 132 milliards de francs.
Les louanges de Monsieur Prix
Rudolf Strahm a annoncé une offensive en particulier contre le prix des médicaments et sur le marché de l’électricité. Dans le premier cas, un succès se dessine.
L’accord entre la Confédération et l’industrie, en vigueur depuis le début de cette année, se traduira, d’ici à la fin 2006, par des économies de 300 à 400 millions de francs, ce qui a récemment amené le surveillant des prix à décerner des louanges inattendues au ministre de la Santé Pascal Couchepin.
Dans le cas du marché de l’électricité, Rudolf Strahm devrait se heurter à une plus grande résistance puisqu’il n’entend pas lâcher prise jusqu’à la libéralisation complète des marchés. Il s’est notamment attaqué aux tarifs d’acheminement qui constituent au fond un obstacle à l’ouverture du marché de l’électricité.
Il a certes obtenu des baisses allant jusqu’à 11%, permettant des économies de près de 30 millions de francs. D’autres interventions s’avèrent néanmoins nécessaires.
Plus grande marge de manoeuvre
A l’opposé de certains de ces prédécesseurs qui ont exercé cette fonction comme tremplin pour leur carrière politique – Leon Schlumpf et Joseph Deiss ont été ensuite ministres – Rudolf Strahm a pris le chemin inverse.
Lorsqu’il a été élu pour prendre la succession de Werner Marti, le député socialiste a renoncé à son mandat de parlementaire ce qui lui a donné plus d’indépendance et de marge de manœuvre. Rudolf Strahm pouvait ainsi beaucoup mieux jouer le rôle d’avocat de la population.
swissinfo, Renat Künzi
(Traduction de l’allemand: Bertrand Baumann)
Surveillance des prix 2005:
1395 réclamations en provenance du public
Augmentation par rapport à 2004: 50% (par rapport à 2003: 100%)
1972: Leo Schürmann est le premier Monsieur Prix: nous sommes alors en période de haute conjoncture caractérisée par une forte inflation (surveillance des prix conjoncturelle).
1979: Naissance du «vrai» surveillant des prix, les forums de consommateurs de Suisse alémanique, romande et italienne déposent une initiative pour empêcher les prix abusifs
1982: acceptation inattendue de l’initiative par le peuple.
En décembre 1985, le Parlement adopte la Loi sur la surveillance des prix (LSPr), qui entre en vigueur le 1er juillet 1986.
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