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L’alerte climatique rencontre un écho en Suisse

Dans les 50 prochaines années, la température globale pourrait monter de 3 degrés. Keystone

Economistes et climatologues suisses espèrent que le nouveau rapport sur les changements climatiques relancera la lutte contre le réchauffement de la planète.

Publié lundi, le rapport de l’ancien économiste en chef de la Banque Mondiale Nicholas Stern prédit que si rien n’est fait dans ce domaine, le réchauffement pourrait coûter au monde des milliers de milliards de dollars.

Commandé par le gouvernement britannique, le rapport Stern conclut que si d’ici 2050, le monde ne consacre pas chaque année au moins 1% de ses revenus à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, l’économie planétaire pourrait perdre entre 5 et 20% de son PIB.

En d’autres termes, le réchauffement climatique peut avoir des conséquences économiques aussi dévastatrices que les deux guerres mondiales ou la crise de 1929.

Dans certains milieux, on considère déjà le rapport Stern comme un tournant majeur dans le débat sur le climat. Pour Martin Beniston, climatologue récemment installé à l’Université de Genève, ce document représente la première vraie analyse économique globale sur la question.

«Cette fois, on va plus loin que répéter qu’on ne peut pas continuer comme ça sans causer des dégâts majeurs à l’environnement, explique le professeur à swissinfo. Le message dépasse la communauté scientifique et atteint maintenant les milieux de l’économie».

Avec les récentes flambées du prix du pétrole, les entreprises ont déjà dû commencer à réfléchir sérieusement à leur consommation d’énergie, et ceci indépendamment de toute conscience des problèmes climatiques et environnementaux, se réjouit Martin Beniston.

Pour lui, il est de toute première importance que les milieux économiques prennent la tête du combat contre le réchauffement climatique. Et le fait que ce pavé de plusieurs centaines de pages émane d’un ancien chef économiste de la Banque mondiale devrait y contribuer.

«Ce rapport aura une influence positive sur les entreprises qui hésitaient entre agir et laisser aller les choses. Il devrait les pousser dans la bonne direction», explique Martin Beniston.

Le bon équilibre

Markus Nauser, conseiller scientifique pour les questions climatiques à l’Office fédéral de l’environnement (OFEV), estime lui aussi que le rapport Stern est de première importance et que le gouvernement suisse devra l’étudier de près.

«Je pense que c’est une contribution fondamentale au débat. Ce rapport donne des chiffres que nous n’avions encore jamais eu sous cette forme et il confirme notre propre analyse», explique-t-il.

Markus Nauser espère bien que le document aura un impact sur la manière dont les milieux économiques envisagent les changements climatiques et la nécessité de promouvoir les technologies et les sources d’énergie alternatives.

«Je crois qu’une partie de l’économie est déjà bien consciente des risques liés au réchauffement de la planète, poursuit le spécialiste de l’OFEV. Si vous regardez le secteur de l’assurance, toutes les grandes compagnies de réassurance sont très actives dans ce domaine depuis longtemps. Et bien d’autres entreprises ont compris que développer des technologies offre de nouvelles occasions de faire des affaires».

L’OFEV est d’ailleurs en train de réaliser sa propre étude sur les impacts du réchauffement pour la Suisse. Celle-ci donnera au gouvernement une idée du prix de l’inaction, en vue de développer ce que Markus Nauser nomme «le bon équilibre entre réduction des émissions et mesure d’adaptation».

Que tout le monde s’y mette

Urs Näf, responsable des questions d’énergie et d’environnement à economiesuisse, la Fédération des entreprises suisse, approuve également le «diagnostic» posé par le rapport Stern.

Pour lui, le défi est maintenant de s’attaquer aux problèmes et de s’assurer que tous les pays participent à l’effort de réduction des émissions.

economiesuisse craint en effet que des efforts unilatéraux pour lutter contre le réchauffement ne pénalisent les entreprises des pays qui y consentent et ne créent des distorsions de la concurrence avec les autres.

«Personne ne veut d’engagements unilatéraux qui ne font qu’entraver son commerce et sa croissance, explique Us Näf. Nous avons besoin d’une approche globale et d’un engagement de tous les pays».

Et de rappeler que les milieux économiques suisses ont déjà pris volontairement des mesures, par exemple en créant la Fondation Centime Climatique.

Lancée en octobre 2005, cette fondation investit chaque année 100 millions de francs suisses dans des projets de réduction des émissions de gaz à effet de serre, en Suisse comme à l’étranger. La fondation tire ses revenus d’un prélèvement de 1,5 centime sur chaque litre de pétrole importé.

swissinfo, Adam Beaumont
(Traduction de l’anglais: Marc-André Miserez)

La Suisse s’est engagée à réduire ses émissions de CO2 de 10% d’ici 2010.
La loi sur le CO2 est entrée en vigueur en 2000. elle prévoit des mesures supplémentaires pour le cas où les réductions d’émissions volontaires ne suffiraient pas.
En octobre 2005, face à l’opposition contre une taxe obligatoire sur le CO2, les autorités ont accepté d’introduire à titre d’essai un prélèvement sur l’essence et le diesel, pour alimenter la Fondation Centime Climatique.

Si rien n’est entrepris pour lutter contre le réchauffement, la température moyenne de la Terre pourrait grimper de 5 degrés en un siècle. Les inondations et les sécheresses qui s’en suivraient obligeraient au déplacement de 200 millions de personnes.

Le rapport estime que la stabilisation des émissions de gaz à effet de serre coûterait chaque année l’équivalent de 1% du PIB mondial jusqu’en 2050. Ne rien faire, par contre, pourrait faire perdre au monde entre 5 et 20% de ce PIB.

Selon Nicholas Stern, le monde doit évoluer vers une économie qui rejette peu de carbone dans l’atmosphère. Les gouvernements doivent taxer et réguler ces émissions et promouvoir les nouvelles technologies. Les pays riches doivent aider les plus pauvres à s’engager dans cette voie.

Le rapport paraît à une semaine de l’ouverture de la conférence climatique des Nations Unies à Nairobi, qui doit se pencher sur la suite à donner au Protocole de Kyoto, qui expire en 2012.

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