L’avenir de Swiss en question(s)
Mardi, les dirigeants de Swiss doivent annoncer des mesures pour tenter de sauver la compagnie aérienne, qui perd 3 millions de francs par jour.
L’avenir de Swiss en six questions brûlantes.
A combien de licenciements peut-on s’attendre dans le personnel de la compagnie?
Quelque 3000 licenciements sur un effectif total de 9000 personnes ont été décidés par le conseil d’administration de Swiss. C’est ce qu’a déclaré Daniel Vischer, du syndicat VPOD, lundi soir à Bâle à l’issue d’une réunion avec la direction.
La flotte des longs et moyens courriers devrait être réduite d’un tiers. «Outre les 3000 licenciements chez Swiss, il faut aussi craindre la perte de 2000 emplois périphériques», a ajouté M. Vischer.
Pour Thomas Von Ungern, professeur à l’Ecole des Hautes Etudes commerciales (HEC) de l’Université de Lausanne, la compagnie devrait avoir le courage de réduire sa flotte de moitié.
De plus, la tâche des dirigeants de la compagnie sera encore compliquée par le récent verdict d’un tribunal bâlois.
Selon les juges, en effet, Swiss n’avait pas le droit de licencier 169 pilotes de l’ex-Crossair au début de l’année. A l’avenir, la compagnie devra tenir compte de la parité suivante: quatre anciens pilotes de Crossair pour cinq anciens de Swissair.
Dans quelles proportions Swiss doit-elle réduire son réseau
La réponse de Thomas von Ungern est très claire: il faut supprimer toutes les destinations qui ne sont pas rentables. Et celles-ci sont le plus souvent des liaisons long-courrier.
«Quand je vois que Swiss prévoit un vol par jour vers Pékin, note le professeur HEC, il est évident que c’est beaucoup trop. Un à deux vols par semaine suffiraient.»
Selon Thomas von Ungern, si Swiss ne diminue pas la taille de son réseau de moitié, la compagnie court à une faillite certaine dans les prochaines années.
Si Swiss venait à disparaître, quelles en seraient les conséquences pour le pays?
Pour Thomas von Ungern, la question n’a rien de tabou. En termes de desserte aérienne, le professeur de la HEC affirme que la Suisse ne perdrait pratiquement rien à voir disparaître sa compagnie nationale.
Et de citer le cas de la Belgique, qui n’est pas moins bien desservie aujourd’hui qu’avant la faillite de Sabena.
«Il y a de toute façon des surcapacités dans le transport aérien, explique Thomas von Ungern. Si une destination est rentable, les compagnies vont se précipiter pour la desservir.»
«Lorsque Swissair a abandonné partiellement Genève, poursuit le professeur de la HEC, Cointrin n’a eu aucun problème à trouver très rapidement d’autres compagnies pour la remplacer. Et la même chose se passera avec Zurich.»
Est-ce une bonne idée d’accorder à Swiss la Garantie contre les risques à l’exportation pour l’aider à trouver de nouveaux crédits?
«Le gouvernement en a déjà fait beaucoup trop pour Swiss», réplique Thomas von Ungern.
Pour lui, il est clair que si la compagnie obtient de nouveaux crédits auprès des banques, elle ne pourra pas les rembourser et ce sera à nouveau au contribuable de passer à la caisse.
«Après le grounding de Swissair, poursuit le professeur de la HEC, il y a eu une période de manque de lucidité totale de la part du gouvernement. Les décisions prises l’ont été dans la hâte et sans réflexion et les conséquences en sont catastrophiques, comme on pouvait le prévoir.»
Pourquoi la cotation de l’action Swiss a-t-elle été suspendue lundi à la Bourse?
Rien d’étonnant ni d’inquiétant à cela. Il s’agit d’éviter que des personnes qui seraient au courant de ce qui va être annoncé mardi puissent en profiter pour réaliser des opérations d’initiés.
Pour Thomas von Ungern, en revanche, ce qui est inquiétant, c’est que «l’action Swiss aujourd’hui ne vaut pratiquement plus rien.»
Finalement, la Suisse a-t-elle raison de continuer à rêver à une grande compagnie nationale?
Pour Thomas von Ungern, depuis le lancement de Swiss, ce rêve ressemble plutôt à un cauchemar.
Selon le professeur de la HEC, une grande compagnie nationale helvétique ne pourra jamais s’intégrer dans une alliance. La Suisse n’a donc que le choix entre une petite compagnie indépendante et une petite compagnie membre d’un grand réseau.
«Mais de toute façon, conclut Thomas von Ungern, elle sera petite.»
swissinfo, Marc-André Miserez
Swiss affiche une perte nette de 980 millions de francs en 2002.
Au premier trimestre 2003, la perte atteint 200 millions pour des rentrées de 1,04 milliard.
La compagnie invoque le SRAS, la guerre en Irak et la mauvaise conjoncture économique.
Elle affirme vouloir continuer à réduire ses coûts en 2003 en réduisant sa flotte.
Selon le syndicat VPOD, 3000 personnes sur 9000 seront licenciées.
Les médias avancent même le chiffre de 3500 suppressions d’emploi.
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