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L’avion est-il encore sûr?

Un inspecteur de l'OFAC lors d'un contrôle SAFA à l'aéroport de Zurich Kloten. Keystone

Après la récente vague d'accidents, les Suisses se demandent s'il est plus risqué de voler de nos jours. C'est toujours plus sûr, répondent les experts.

L’Europe s’est dotée d’une agence de la sécurité aérienne. Et la Suisse, qui a décidé de publier avec la France une liste noire des compagnies interdites, en fait aussi partie.

Cette décision inédite a été prise jeudi soir. Paris et Berne vont publier dès le 1er septembre une liste noire des compagnies aériennes interdites. Il sera possible de trouver sur Internet l’identité des compagnies dont l’ensemble de la flotte est interdite en France et en Suisse.

Il faut dire que durant le seul mois d’août, cinq accidents importants ont causé la mort de plus de 380 personnes. Et cela alors que certaines compagnies aériennes offrent des prix défiant toute concurrence.

Dans ces conditions, on se pose forcément des questions sur la sécurité: les passagers courent-ils un danger accru aujourd’hui?

Visiblement, ce n’est pas vraiment le cas: l’année 2005 est, jusqu’ici, l’une des plus sûres de l’histoire de l’aviation. Rien que l’année dernière, elle a fait 450 victimes dans le monde.

Les accidents plus élevés en voiture

En réalité, statistiquement, l’avion est toujours le moyen de transport le plus sûr. Que ce soit en voiture ou à pied, en train ou en bateau, le risque d’accident est plus élevé. Ainsi, dans l’Union européenne (UE), le nombre de victimes de la route n’est redescendu en dessous de la barre des 50’000 que l’année dernière.

«Voler est aussi sûr qu’autrefois, sinon encore plus sûr», affirme Anton Kohler, porte-parole de Office fédéral de l’aviation civile (OFAC).

Et cela vaut aussi pour les nombreuses nouvelles compagnies aériennes à bas prix, ajoute Anton Kohler à swissinfo. «Ces compagnies doivent répondre aux mêmes conditions de sécurité que les autres, que ce soit en Suisse, en Europe ou aux Etats-Unis.»

Des contrôles surprises

Cela concerne également la compagnie Helios, dont l’un des appareils s’est crashé sur une montagne aux environs d’Athènes le 14 août dernier, à la suite d’une brusque dépressurisation. «Helios n’est pas une compagnie-bidon. Elle a passé avec succès les contrôles SAFA», affirme l’expert suisse

Anton Kohler fait allusion aux contrôles de sécurité qui sont effectués au hasard par tous les Etats européens sur les avions étrangers qui transitent par leur territoire, dans le cadre du programme SAFA (Safety Assessment of Foreign Aircraft).

«En Suisse, nous procédons à environ 200 contrôles SAFA chaque année.» Dont Helios. En 2004, plus de 4500 contrôles ont été effectués sur des appareils étrangers dans toute l’Europe. Ces tests font partie du programme de la Conférence européenne de l’aviation civile (CEAC).

Chaque pays est responsable

Ce programme s’ajoute aux politiques nationales de sécurité de chaque pays. «La sécurité aérienne est assurée surtout par le fait que les compagnies aériennes et les avions sont contrôlés là où ils sont enregistrés», explique Anton Kohler.

Outre les contrôles des compagnies helvétiques telles que Swiss, Belair, Edelweiss ou Helvetic, l’OFAC contrôle aussi les quelque 300 compagnies étrangères qui veulent passer par la Suisse.

«Et nous vérifions si la compagnie en question répond aux exigences émises par leur pays d’origine, à celles des compagnies d’assurances et à un management de sécurité», précise le porte-parole de l’OFAC.

Des compagnies sur une liste noire

Ce n’est que lorsque toutes ces conditions sont remplies qu’une compagnie aérienne obtient une autorisation pour cinq ans. Toutes ne l’obtiennent pas. Actuellement, 18 compagnies ou appareils font l’objet d’une interdiction.

Elles figurent sur une liste noire, qu’il s’agisse d’un avion testé défectueux ou, dans les cas les plus graves, il peut s’agir de toute une flotte.

Le problème, c’est que cette liste n’était pas rendue publique, ce qui a relancé régulièrement la controverse.

Selon l’OFAC, la publication de ces listes noires, tenues par chaque pays, est en train d’être discutée au niveau européen. La seule possibilité est actuellement de faire une demande écrite à propos d’une compagnie donnée.

Bande à part

Or, les choses changent. Puisque la Suisse et la France viennent de décider d’accélérer le mouvement. Moritz Leuenberger, ministre suisse des Transports et son homologue français Dominique Perben sont tombés d’accord sur la nécessité de publier une liste recensant les «mauvaises compagnies». Sans attendre un feu vert européen.

Dans un premier temps, la Suisse s’opposait à la publication de telles listes in extenso pour des questions de protection des données, tout en répondant aux demandes individuelles concernant un vol ou une compagnie.

Une polémique avait éclaté en Suisse après la catastrophe de Charm el-Cheikh (Egypte) de janvier 2004, lorsque l’on avait appris que la compagnie égyptienne Flash Airlines était interdite en Suisse depuis 2002.

A la suite de cette polémique et de révélations partielles dans la presse, l’OFAC avait publié une liste partielle de sept appareils interdits en Suisse sur les 23 figurant alors sur sa liste noire.

Désormais, il sera possible d’avoir accès à toute la liste noire dès le 1er septembre sur la Toile.

Nouvel organe de sécurité de l’UE

En général, les standards de sécurité en vigueur en Europe sont en train d’être harmonisés. La nouvelle Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) a été créée en 2004 à Cologne (Allemagne).

Petit à petit, l’AESA va prendre la direction des autorités du trafic aérien des pays membres, au fur et à mesure qu’ils lui en donneront les compétences. «Par exemple, pour ce qui concerne les licences et le contrôle des constructeurs d’avion», précise Anton Kohler.

Outre le développement et la définition de normes de sécurité du trafic aérien en Europe, l’AESA procédera aussi à l’avenir à l’autorisation des gros porteurs. Elle deviendra ainsi l’équivalent de la puissante FAA américaine (Federal Aviation Agency).

«La Suisse travaille déjà au sein de l’AESA et bénéficie des même droits d’intervention», indique Anton Kohler. La Suisse est d’ores et déjà totalement intégrée.

«De facto, nous sommes déjà représentés dans tous les groupes de travail.» Avec un bémol tout de même: «Nous ne pouvons être membre à part entière parce que nous ne sommes pas membre de l’Union européenne.»

swissinfo, Christian Raaflaub
(Traduction de l’allemand: Isabelle Eichenberger)

– En Europe, plusieurs instances sont responsables de la sécurité aérienne:

– D’abord, chaque pays est responsable de la sécurité de ses propres compagnies aériennes. En Suisse, cette tâche est assumée par l’Office fédéral de l’aviation civile (OFAC).

– Le contrôle des appareils étrangers (contrôles SAFA) est également assuré par l’OFAC, mandatée par la Conférence européenne de l’aviation civile (CEAC) à Paris.

– Depuis 2004, l’Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) à Cologne est chargée d’harmoniser les conditions de sécurité en Europe.

– Elle remplit pour l’Europe le même rôle joué jusqu’ici au niveau international par la puissante Administration américaine de l’aviation (FAA).

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