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La «mue» des banques suisses peine à convaincre

Nouveau patron d'UBS, Sergio Ermotti n'a pas encore vraiment convaincu les analystes. AFP

Toujours regardées avec méfiance par les marchés, UBS et Credit Suisse ont annoncé ce mois leur intention de réduire leurs activités de banque d’affaires et de se focaliser sur la clientèle fortunée. Mais pour certains observateurs, ces changements ne vont pas assez loin.

Dans une note aux investisseurs, la Banque Sarasin décrit le plan de restructuration dévoilé jeudi à New York par UBS comme «une évolution, pas une révolution». La note exprime la déception de voir qu’UBS n’a pas choisi de couper davantage dans sa banque d’affaires, afin de la rendre juste assez grande pour servir les clients et les institutions fortunés.

«Nous ne sommes pas pleinement convaincus qu’UBS a vraiment besoin d’une banque d’affaires de cette taille et de cette diversité. Cette stratégie reflète celle de nombreuses autres banques, qui luttent pour s’adapter à des conditions de marché plus difficiles», commente Sarasin.

Bricolages

La banque privée n’avait guère salué avec plus d’enthousiasme le plan de restructuration de Credit Suisse annoncé au début du mois.

«Nous pensons que cela va effectivement dans la bonne direction, mais plus généralement, nous aimerions voir une action plus prononcée dans le sens d’un alignement de la banque d’affaires de Credit Suisse», écrivait alors Sarasin dans une autre note.

Andreas Venditti, analyste à la Banque cantonale de Zurich, pense aussi que les deux grandes banques auraient pu aller plus loin. Il admet toutefois que l’importance des opérations de banque d’affaires au sein du groupe Credit Suisse rendait la tâche de couper plus difficile.

«Je suis déçu de voir qu’il n’y a pas de changement significatif dans la stratégie, explique l’analyste à swissinfo.ch. La structure des deux banques ne va pas vraiment changer». Andreas Venditti est également convaincu que les deux géants suisses se contentent de suivre le troupeau, en se livrant aux mêmes bricolages que leurs rivaux.

Mise en sourdine forcée

UBS et Credit Suisse avaient rejoint la compétition l’an dernier, à une période où toutes les banques embauchaient du personnel et multipliaient leurs opérations dans la banque d’affaires, persuadés à tort que les conditions du marché allaient devenir plus favorables.

Au lieu de se recentrer entièrement sur leur «ADN principal» (comme l’a illustré le patron d’UBS Sergio Ermotti jeudi), soit la gestion de fortune internationale et la banque universelle, UBS et Credit Suisse sont suspectés d’attendre une accalmie dans l’espoir de retrouver la grande ligue mondiale de la banque d’affaires.

Pour l’instant, un appétit perdu pour le risque, des taux d’intérêt au plus bas et la menace d’un nouveau durcissement de la réglementation, destiné à freiner les excès bancaires, ont forcé les grandes banques universelles à mettre temporairement la sourdine sur leurs ambitions.

Devant les investisseurs d’UBS, Sergio Ermotti avait déclaré en avoir assez de cette course pour occuper «le statut de premier de la ligue». Une déclaration qui fait référence à la désastreuse tentative de gravir les échelons de la gloire à Wall Street, qui avait mené la première banque suisse dans la spirale infernale de la crise des subprime.

Ambitions pas enterrées

Tout en reconnaissant que les défis à venir étaient «impressionnants», Carsten Kengeter, le patron de la banque d’affaires d’UBS, n’a pas toujours semblé sur la même longueur d’ondes.

Alors qu’UBS devra renoncer à certaines opérations, supprimer 2000 emplois dans le secteur et la moitié de ses actifs à risques d’ici la fin 2016, Carsten Kengeter a profité de sa présentation jeudi à New York pour démontrer comment il allait s’y prendre pour gagner des parts de marché au détriment de ses rivaux et croître sur les nouveaux marchés, en particulier au Brésil.

«Les nouvelles réglementations obligent les banques à accroître leur capital propre. Certaines activités ne seront ainsi plus rentables, relève Andreas Venditti. Et tout le monde fait la même chose». Pourtant, UBS n’a pas perdu son ambition de compter parmi les acteurs majeurs de la banque d’affaires, estime-t-il. «Mais l’environnement ne va pas devenir plus facile. Au contraire, ce secteur va rester extrêmement compétitif».

Analystes et investisseurs retirent tout de même une bonne nouvelle de cette journée des investisseurs à New York. UBS a décidé de mettre un terme au gel des dividendes et de verser 10 centimes par action au titre de l’exercice 2011. La banque a affirmé viser une hausse progressive des dividendes pour les années à venir. Affaire(s) à suivre.

UBS a été la banque européenne la plus touchée par la crise des subprime, avec une perte d’environ

50 milliards de dollars entre la fin de 2007 et 2009.

2008 a été le pire exercice, avec des pertes totalisant 21 milliards de francs suisses.

Entre 2008 et 2010, la crise de confiance de la clientèle a coûté plus de 200 milliards de francs. En 2010, le retrait d’actifs est tombé à 14,3 milliards.

UBS a également été frappée par une amende de 780 millions de dollars au fisc américain en 2009.

De plus, la banque a été forcée de transmettre des informations sur des milliers

de clients aux Etats-Unis.

En 2010, le Parlement suisse a ratifié l’accord passé entre la Suisse et les Etats-Unis sans qu’UBS doive répondre en Suisse de violation du secret bancaire. Cette année-là, la banque a renoué avec les chiffres noirs, dégageant un bénéfice de 7,16 milliards de francs suisses.

En septembre 2011, une nouvelle affaire est venue entachée l’image de la première banque suisse. La fraude d’un courtier a coûté plus de deux milliards de francs à UBS, entraînant la démission de son patron Oswald Grübel.

Son successeur, le Tessinois Sergio Ermotti, a annoncé dès sa nomination sa volonté de réduire la taille de la banque d’affaires du groupe. Parallèlement, il entent se recentrer sur la gestion de fortune internationale et la banque universelle en Suisse.

(Traduction de l’anglais: Marc-André Miserez & Samuel Jaberg)

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