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La politique agricole 2011 divise les esprits

La réforme de l'agriculture voulue par le gouvernement inquiète beaucoup les paysans. Keystone Archive

Paysans, écologistes et droite dure critiquent vivement la politique agricole 2011 du gouvernement. Ils demandent une révision en profondeur du projet.

Les partis du centre et de la gauche modérée soutiennent en revanche ce projet axé sur une amélioration de la compétitivité du secteur agroalimentaire.

Le délai imparti pour la procédure de consultation entourant la politique agricole 2011 (PA 2011) arrivait à échéance vendredi. Les réponses à cette consultation montrent que les avis exprimés sont pour le moins partagés et tranchés.

Pour les milieux agricoles, il en va de la survie du secteur. L’Union suisse des paysans (USP) rejette les propositions du gouvernement. La mise en œuvre de la PA 2011 se traduirait par un recul de 25% des revenus de l’agriculture et par une dégradation massive de sa situation économique.

40% des entreprises agricoles sur la touche

L’USP n’est pas d’accord non plus avec la répartition telle que prévue de l’argent de la Confédération. Elle exige le maintien des mesures actuelles de soutien au marché. Autre revendication majeure des paysans: autoriser les importations parallèles.

Enfin, il y a lieu de conserver les éléments centraux du droit foncier et du droit du bail à ferme agricole.

L’élévation proposée à 1,25 unité de main-d’œuvre standard du seuil à partir duquel le droit foncier rural considère qu’une exploitation est une entreprise agricole mettrait sur la touche plus de 40% des entreprises agricoles reconnues actuellement.

Mauvaise humeur

L’USP n’attend pas uniquement du Conseil fédéral (gouvernement) qu’il montre de la compréhension. Elle veut des faits. La manifestation organisée le 17 novembre à Berne a réuni 10’000 personnes qui ont exprimé leur mauvaise humeur par rapport au projet de PA 2011.

Même son de cloche auprès de la «Plateforme pour une agriculture socialement durable»: sur 64’000 exploitations, 32’000 devraient disparaître en Suisse, s’insurge-t-elle. De quoi accentuer la précarisation des petits paysans et des employés agricoles.

Ces derniers, qui représentent 30’000 à 35’000 personnes en Suisse, ne sont pas pris en compte par la PA 2011.

Corriger les erreurs du passé

La plateforme comprend des représentants des milieux agricoles (Bio Suisse, Bio- Forum, Uniterre, les petits paysans), syndicaux (Unia), des consommateurs et de défense des immigrés. Elle intègre également des partis, comme les Verts et le Parti suisse du travail (communistes).

Pour l’Union démocratique du centre (UDC / droite dure), la PA 2011 devait être une chance de corriger les erreurs du passé et de remettre l’agriculture suisse sur les rails. Or c’est le contraire qui se produit avec les coupes prévues et l’abandon du soutien au marché.

Exigences écologiques

Les Verts approuvent la suppression des contributions à l’exportation et des soutiens au marché intérieur. En revanche ils refuseront la PA 2011 si des améliorations n’y sont pas intégrées.

Selon eux, il faut notamment soumettre les prestations écologiques à des exigences plus rigoureuses, et non assouplir la réglementation dans le domaine du bio.

La Coordination alliance agraire, qui regroupe une quinzaine d’organisations agricoles et de protection de l’environnement et des animaux (IP Suisse, Bioterra, Demeter, Pro Natura, Protection suisse des animaux, WWF, notamment), rappelle que le peuple vient d’accepter le moratoire sur les OGM dans l’agriculture. Les exigences écologiques ne sauraient donc être réduites.

Sucrière indigène menacée

Pour les sucreries suisses et la Fédération suisse des betteraviers, les mesures de la PA 2011 sont «inacceptables», car elles menacent l’économie sucrière indigène dans sa survie. La culture de betteraves, dont le prix baisserait de moitié, risque de perdre tout attrait.

Quant à l’association Laines d’ici, qui tente depuis quelques années de recréer des réseaux de valorisation de la laine de mouton, elle voit en la PA 2011 un «démantèlement accéléré du tissu agricole». Les 800’000 francs annuels octroyés à la valorisation de la laine seraient en effet supprimés.

Plus de soutien au marché

Son de cloche inverse à l’Union suisse des arts et métiers, qui déplore que des privilèges soient accordés à l’agriculture, désavantageant les autres branches de l’économie. Cette tendance est accentuée par la PA 2011.

Le Parti socialiste soutient la tendance générale de la PA 2011. Il est positif que le changement structurel se fasse par étapes et celui-ci est socialement supportable. Passer aux paiements directs est aussi une bonne chose, puisque ces derniers pourront être liés à des critères standards en matière d’environnement et de protection des animaux.

Pas de taille minimale

Le parti demande toutefois que les importations parallèles soient autorisées afin de baisser les coûts de production pour les paysans. Enfin, le PS refuse une taille minimale de l’entreprise agricole: son introduction impliquerait la disparition de beaucoup de petites exploitations.

Le Parti démocrate-chrétien (PDC / centre-droit) estime que la PA 2011 renforce l’autonomie des agriculteurs tout en évitant de laisser tomber ceux qui se trouvent dans une situation précaire. Le changement structurel doit toutefois se faire à un rythme supportable socialement.

Le PDC juge trop sévère la proposition de porter la main-d’œuvre standard à 1,25 unité. Enfin, le PDC demande aussi d’examiner la piste des importations parallèles.

swissinfo et les agences

Il y avait environ 65’000 exploitation agricoles en Suisse en 2005 (80’000 en 1990).
Cinq exploitations disparaissent chaque jour.
En 2004, le revenu moyen des exploitations agricoles était de 76’115 francs par an.
En 2004, 4,1% de la population suisse était active dans le secteur primaire.

– Entre 2003 et 2007, la Confédération aura dépensé 14’092 milliards de francs pour l’agriculture. Ce poste de dépense représentait 8,5% des dépenses totales en 1990; il sera de 7,1% en 2006.

– Le projet de PA 2011 est axé sur une amélioration de la compétitivité du secteur agroalimentaire.

– La pièce maîtresse est la réallocation aux paiements directs des fonds destinés actuellement au soutien du marché.

– Le gouvernement souhaite que l’enveloppe dévolue à l’agriculture se limite à 13,4 milliards de francs pour 2008 à 2011, soit 638 millions de moins que le crédit quadriennal en cours.

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