La Suisse ne craint pas un nouveau choc pétrolier
Les menaces de guerre contre l'Irak affolent le marché du pétrole. En cas d'intervention armée, l'économie helvétique souffrirait aussi de la hausse du prix du brut.
Mais la Suisse ne risque pas d’être prise de court. Ses réserves sont suffisantes.
Les menaces d’intervention militaire contre Bagdad font flamber le prix du brut. Vendredi dernier, au lendemain du raid américano-britannique en Irak, le cours du baril (environ 159 litres) a dépassé les 30 dollars à New York, ce qui n’était plus arrivé depuis une année.
Mercredi, le baril de Brent de la Mer du Nord pour livraison en octobre s’échangeait à Londres à un peu plus de 28 dollars.
Mais jeudi déjà, à l’issue du discours de George W. Bush aux Nations unies, le baril reperdait un demi-dollar, l’intervention armée en Irak paraissant moins imminente.
Pour les experts pétroliers, ces prix élevés incluent une «prime de guerre» de quelque quatre dollars. Cette flambée en effet ne reflète pas l’état de l’offre et de la demande, mais bien celui de la spéculation.
Une nouvelle flambée est à craindre
«Si les Américains interviennent en Irak, cela fera évidemment monter les cours du brut», explique Kurt Rüegg, porte-parole de l’Union pétrolière (UP), organe faîtier de l’économie pétrolière suisse.
Dans ce cas, le prix du baril risque bien de crever le plafond des 30 dollars. Et cela ne serait pas sans effets sur les prix des produits finis que paie le consommateur.
Toutefois, l’expérience de la guerre du Golfe et des attentats du 11 septembre a montré que les prix redescendent rapidement. Et cette règle devrait valoir également pour la crise actuelle.
Mais s’il devait réellement y avoir un choc pétrolier, Kurt Rüegg n’exclut pas un mouvement de récession économique. «Quelle serait son ampleur, personne ne peut le dire pour l’instant», admet le porte-parole de l’UP.
Pas de risque de pénurie
La Suisse est en principe à l’abri d’une pénurie de pétrole. Sur mandat de l’Office fédéral de l’énergie, Carbura, Centrale suisse pour l’importation des carburants et combustibles, est chargée de constituer des réserves.
«Nous devons avoir dans nos citernes de l’essence, du diesel et de l’huile de chauffage pour quatre mois et demi, ainsi que du carburant pour avions pour trois mois», explique Sonja Studer, vice-directrice de Carbura.
Autant dire que la Suisse a de quoi voir venir. Et ce d’autant que ni la guerre du Golfe ni le 11 septembre 2001 ne l’avaient à l’époque obligée à puiser dans ses réserves.
Les producteurs sont divisés
Les spécialistes du marché quant à eux attendent la réunion de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), prévue en fin de semaine prochaine.
L’OPEP pourrait en effet décider d’augmenter sa production, ce qui n’est plus arrivé depuis deux ans. Mais certains de ses membres ont déjà manifesté leur opposition ferme à cette proposition.
Dès lors, tout peut arriver. Et même un professionnel comme Kurt Rüegg ne se risque à aucun pronostic.
Pas de quoi s’inquiéter
En attendant, les consommateurs se demandent quel prix ils devront payer ces prochains jours à la pompe.
«Cela dépendra des compagnies pétrolières, admet Sonja Studer. Les prix sont fixés sur le marché international et si le mouvement est à la hausse, cela aura évidemment des conséquences en Suisse».
Jeremy Baker, analyste à Credit Suisse Financial Services, n’est pas inquiet outre mesure. Selon lui, la plupart des pays développés sont parfaitement armés pour résister à un choc pétrolier.
«Les consommateurs ne devraient commencer à s’inquiéter réellement que s’il se passe quelque chose sur le terrain et que les prix du brut s’inscrivent à la hausse sur une longue période», estime Jeremy Baker.
swissinfo
50% du pétrole importé en Suisse vient de Libye et 33% du Nigeria
Le solde provient d’Algérie et du Proche-Orient
La moitié des livraisons se fait sous forme de brut, traité ensuite dans les deux raffineries du pays
Le solde est importé directement en produits finis
En conformité avec les normes du JTI
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