Le loup suisse entre deux feux
Faut-il redonner une place au loup? Alors que le projet divise l'opinion, des écologistes italiens accusent la Suisse de délivrer des permis de chasse.
L’Office fédéral de l’environnement, des forêts et du paysage (OFEFP) va remettre sur le métier son «Concept Loup Suisse». La consultation qu’il a menée recueille certes «une large adhésion». Mais certains opposants irréductibles gardent la dent dure. Et le projet réclame quelques bémols.
Deux ou trois loups, venus notamment du Piémont italien, s’installent chaque année sur territoire suisse. On peut imaginer que leurs apparitions se feront de plus en plus fréquentes. Non sans poser de gros problèmes aux éleveurs.
Pensons d’abord aux moutons
La solution du gouvernement, c’est de créer à long terme les conditions d’une coexistence pacifique entre loups, hommes et troupeaux. Mais que les choses soient claires, nous dit Willy Geiger, sous-directeur de l’OFEFP, «on ne travaille pas pour la protection du loup, mais pour celle des moutons».
Solution contestée jusqu’au sein du Parlement fédéral, puisqu’un député, le Grison Theo Maissen, demande que le loup soit purement et simplement biffé de la liste des espèces animales protégées. Le Conseil national tranchera dans l’une de ses prochaines sessions.
En attendant, l’administration poursuit son travail. D’autant que les 62 institutions et associations consultées suggèrent de très nombreuses modifications du projet, notamment pour améliorer les mesures de protection.
Il y a unanimité concernant les indemnités dont doivent bénéficier les propriétaires de troupeaux en cas d’attaque. Ce qui est loin d’être le cas dès qu’on évoque les autorisations de tirer le prédateur.
À combien le coup de fusil?
La pratique actuelle fixe à un minimum de 50 le nombre de bêtes de rente égorgées pour que soit délivré le permis d’abattre. Les paysans veulent abaisser cette limite, les écologistes demandent qu’on la remonte.
Le débat est doublement d’actualité, puisque le Conseil de l’Europe vient d’écrire à Berne. On veut savoir, à Strasbourg, pourquoi la Suisse a autorisé l’an dernier la chasse au loup du Val Bregaglia, dans les Grisons. L’ennemi public avait tué 59 chèvres et moutons sur territoire suisse, d’autres en Italie.
C’est précisément une organisation écologiste italienne, Legambiente Lombardia, qui a dénoncé la Suisse au Conseil de l’Europe, prétextant qu’elle violait ainsi la Convention de Berne sur la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe.
Berne sereine malgré tout
Sur ce sujet, Willy Geiger ne se fait guère de soucis, la Suisse n’aura aucune peine à justifier sa décision: «les autorisations de tir ont été données dans le cadre de liberté laissé ouvert par la Convention».
L’accusation a tout de même le mérite de montrer du doigt le manque de coordination entre les grands pays alpins concernés par le retour du loup: Italie, France et Suisse. Willy Geiger convient qu’il faudra bien, un jour, mettre en place une gestion internationale des lynx, loups, ours & Cie.
Pour le moment, la politique suisse reste très simple: pas question de réintroduire le loup, mais s’il vient chez nous, qu’il soit le bienvenu, qu’il aille où bon lui semble. On fera en sorte qu’il cause le moins de dégâts possibles.
Bernard Weissbrodt
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