Le ‘mobile’, cet incontournable compagnon
Le téléphone portable, certains l’adorent, d’autres l’abhorrent. A la fois compagnon fidèle et pire ennemi, il a bouleversé nos vies. Avec l’exposition «T’es où?», le Musée de la communication de Berne, nous invite à la réflexion.
De la Suède à l’Islande, en passant par la Thaïlande ou l’Arabie saoudite, le téléphone portable est affublé de sobriquets plus ou moins surprenants et improbables. En Israël, on parle même de «téléphone miracle». Un surnom que le mobile n’a jamais aussi bien porté qu’aujourd’hui.
De fait, avec le temps, ce minuscule appareil s’est mué en un gadget aux mille et une fonctions. Agenda, aide-mémoire, glossaire, pense-bête, cours de la bourse, boussole, appareil photo, support musical et vidéo… parfois, il sert même à téléphoner. Et si c’est pour cette fonction qu’il avait été conçu au départ, soit appeler et être joignable sans ligne fixe, cet aspect appartient désormais au passé.
La téléphonie mobile a marqué un tournant technologique radical et avec elle, c’est toute la société qui a changé. Et comme cela se produit parfois, lorsqu’ une innovation technologique envahi la planète, celle-ci divise les nostalgiques et les ardents défenseurs de la nouveauté, et soulève une foule de questions.
Des questions et peu de réponses
Peut-on mettre fin à une relation par un simple sms? Le téléphone portable nous a-t-il conféré davantage de liberté ou, au contraire, rendus esclaves? Bénédiction ou malédiction? Faut-il être joignable en permanence? Peut-on vivre sans répondeur automatique, SMS ou MMS?
Autant de points d’interrogation qui font la matière première de l’exposition proposée par le Musée de la communication à Berne, «T’es où?». Un événement qui explore le thème de fond en comble, sans pour autant fournir de réponses toutes faites.
«Ce n’est pas la tâche du musée que de donner des réponses aux questions que se pose la société. Nous nous considérons néanmoins comme un centre de compétences en matière de communication et nous disposons probablement de la plus vaste collection de modèles de téléphones portables de Suisse, puisque nous en avons près de 1000 modèles », explique Kurt Stadelmann, le commissaire de l’exposition.
Du commerce à la rue
Avec un aménagement judicieux des espaces d’exposition, «T’es où?» va droit au but. Une première salle du musée incarne un magasin de téléphones portables, et plonge le visiteur dans le monde coloré de la consommation. Une autre met en scène un univers d’ombres, sans contours définis: «Le visiteur déambule sans remarquer les autres, exactement comme cela se produit dans la vie quotidienne, lorsqu’on est absorbé par une conversation téléphonique, et que les gens passent à côté de nous sans que nous nous en apercevions», explique le commissaire.
Et c’est évidemment le téléphone portable qui sert de guide au public. «C’est une nouveauté mondiale», se réjouit Kurt Stadelmann. En effet, il est indispensable de garder son appareil allumé pour visiter la manifestation. Avec son téléphone personnel ou un appareil mis à disposition du public à l’entrée du musée, le visiteur se déplace tout en écoutant les commentaires, témoignages ou informations qui lui sont fournis.
On apprend notamment, que le record mondial du lancer de téléphone portable, détenu par un Britannique, est de 95,83 mètres de longueur. Ou encore, qu’en 1985, les PTT (Poste, Téléphone, Télégraphe, devenus Swisscom et la Poste suisse) avaient prévu que 235’000 abonnements seraient délivrés en 2000 en Suisse, alors que le chiffre avait en réalité atteint les 4 millions. Ou encore qu’en 2007, le nombre de téléphones portables dans la Confédération avait, pour la première fois, dépassé le nombre de ses habitants. Et enfin, que 4,6 milliards d’appareils sont actuellement utilisés dans le monde, avec une croissance de 9% en 2010.
Courtoisie et sensibilités diverses
A ce jour, aucun autre bien de consommation n’a remporté le même succès en un laps de temps aussi court. L’usage du téléphone mobile aux quatre coins de la planète s’est répandu tel une tache d’huile, sans distinction de race, de culture ou de nationalité. Et pourtant, les habitudes de leurs propriétaires ne sont pas égales partout et pour autant. «Si en Grande-Bretagne, une certaine discrétion prévaut, au Japon, à l’inverse, rares sont les pendulaires qui n’ont pas les yeux rivés en permanence sur leur portable», souligne encore Kurt Stadelmann.
Et comme il n’existe pas de code de comportement quant à l’usage adéquat de cet instrument, le Musée de la communication a mis au point un questionnaire qui a pour but d’établir une sorte d’inventaire des règles en la matière. Peut-on téléphoner alors qu’on se trouve au cinéma? Licencier un collaborateur par simple SMS? Faut-il être joignable en permanence? Ou encore, répondre à chaque texto? Voire même, doit-on impérativement posséder un portable?
Entre le Bien et le Mal
Mais les questions ne s’arrêtent pas à la bonne conduite. L’utilisation excessive du portable a déjà fait plonger plus d’un adolescent dans un abîme de dettes. Un phénomène qui a aussi suivi la courbe du développement technologique de ces appareils. Comment le juguler? Qu’en est-il des ondes électromagnétiques par les portables. Sont-elles nuisibles pour la santé?
Ou à l’inverse, ces ondes offrent-elles de nouvelles perspectives dans le domaine médical? Un implant cardiaque peut envoyer les données de l’électrogramme par SMS au médecin traitant, en cas de dysfonctionnement et donner l’alarme. La repérabilité favoriserait-elle le réflexe de l’Etat fouineur? Ou permet-elle plutôt de sauver des vies, en cas d’accident par exemple?
«T’es où?», interroge, fait réfléchir et invite le visiteur au débat. Et à ces «T’es où, tu fais quoi?», soit les deux questions les plus fréquemment posées par les usagers, faut-il toujours répondre par la vérité?
L’exposition du Musée de la communication de Berne est ouverte jusqu’au 3 juillet 2011. Les informations, textes et commentaires audio, sont disponibles en français et en allemand.
La manifestation est à découvrir à l’aide d’un téléphone portable personnel ou un appareil prêté à l’entrée du musée, ou encore avec les services d’un guide. Un dossier didactique a été spécialement préparé à l’attention des élèves des classes de cinquième primaire au cycle secondaire.
1918: La «Reichsbahn» allemande effectue pour la première fois des essais avec un radiotéléphone.
1926: Les voyageurs de première classe sur la ligne ferroviaire Hambourg-Berlin peuvent profiter pour la première fois de l’usage d’un téléphone portable.
1939: La cabane Konkordia du Secours alpin suisse (CAS), dans le canton du Valais, se dote du premier téléphone sans fil du pays.
1975: La Poste suisse (PTT, Poste Téléphone, Télégraphe) décide d’introduire en un réseau de téléphone mobile pour les véhicules, appelés Nationales Autotelefonnetz (réseau national de téléphone pour les voitures).
1978: Mise en service d’un réseau de téléphone mobile Natel A, de type analogiques, pour voitures.
1980: Mise en service du réseau mobile Natel B, avec des téléphones portables de 12 kilos.
1983: L’entreprise Motorola met en vente le premier téléphone portable véritablement mobile. L’appareil mesure 30 centimètres de longueur. Le Dyna-TAC 8000x, coûte 4000 dollars, soit autant qu’une voiture modèle Ford Mustang, ce qui ne l’empêche pas de trouver quelque 300’000 acquéreurs aux Etats-Unis.
1987: Mise en service du réseau de Natel C. Les premiers appareils véritablement portables sont mis en vente.
1993: Mise en service du réseau de Natel D, de type digital, basé sur le système GSM (Global System for Mobile Communications).
Milieu des années nonante Messages de textes avec un téléphone portable (SMS ; short message service).
2001: Introduction de la technologie GPRS (General Packet Radio Service), qui permet de se raccorder à un réseau Internet.
2004: Lancement de la technologie de téléphone mobile de la troisième génération, l’Universal Mobile Telecommunications System (UMTS), qui permet d’envoyer des photos digitales, d’enregistrer des vidéos par téléphone, d’enregistrer et de vsionner des films ainsi que de naviguer sur Internet.
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