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Le pari à hauts risques de Tele2

Tele2 devra peut-être mettre en place ses propres relais. Keystone Archive

La licence de téléphonie mobile octroyée à la filiale suisse de l’opérateur suédois pourrait être un cadeau empoisonné.

On voit mal comment Tele2 réussira à s’implanter dans un marché saturé, surtout si Swisscom, Sunrise et Orange refusent de lui louer leur réseau.

«L’attribution de deux nouvelles licences de téléphonie mobile promet de stimuler le marché et d’intensifier la concurrence au profit des clients privés et commerciaux», se réjouit la Commission de la communication (ComCom) qui a octroyé ces concessions GSM à la société de Vevey In&Phone, et à l’antenne suisse du groupe suédois Tele2.

Voilà une affirmation qui laisse sceptique. Actuellement ce secteur est dans une situation d’oligopole. Swisscom (63% de part de marché), Sunrise (20%) et Orange (17%) se partagent quelque 6 millions de clients.

Le casse-tête du réseau

«Le marché helvétique de la téléphonie mobile est le plus profitable d’Europe car les tarifs y sont très élevés et aucun des trois opérateurs n’a intérêt à se lancer dans une guerre des prix», estime une étude d’octobre 2003 réalisée par la banque privée genevoise Pictet.

L’arrivée de deux outsiders pourra-t-elle relancer la concurrence ? Rien n’est moins sûr. Tele2 entend casser les prix et vise «100000 nouveaux clients ces trois prochaines années et 15% de part de marché d’ici 6 ans».

Le problème c’est qu’il devra soit louer, via un accord de roaming, le réseau mobile d’un de ses concurrents, soit construire sa propre infrastructure.

Même si Swisscom, Sunrise ou Orange acceptait de mettre son réseau à disposition de Tele2, le prix ne serait certainement pas bon marché.

Pire, en cas de refus de ses rivaux, Tele2 devra mettre en place ses propres relais. Un investissement conséquent «compris entre 60 et 100 millions», estime l’opérateur.

Mais il oublie que l’implantation de nouvelles antennes se heurte désormais quasi systématiquement au rejet de la population, surtout dans les grandes villes, justement les zones visées par Tele2.

Des clients déjà captifs

En plus, comme environ 80% de la population suisse possède déjà un téléphone cellulaire, le marché arrive à saturation. Pour bénéficier d’un appareil dernier cri à très bas prix, de nombreux clients ont signé des contrats bloqués sur 12 ou 24 mois avec leur opérateur.

Pour attirer les utilisateurs, Tele2 devra non seulement être très convaincant au niveau du prix des communications et des appareils, mais aussi de la qualité et de la couverture de son réseau.

Enfin, l’arrivée prévue fin 2004 de l’UMTS, la téléphonie mobile de la troisième génération, pourrait rendre rapidement obsolète le réseau GSM de Tele2.

Quant à la société In&Phone, elle vise les entreprises. Cet opérateur a été créé par la société veveysanne Intelcom qui emploie aujourd’hui une vingtaine de collaborateurs, surtout en Romandie.

In&Phone compte développer des réseaux GSM locaux pour les sociétés et administrations de grande taille. Concrètement, au lieu d’appeler un collègue sur son téléphone portable via un réseau national, on peut le contacter à moindre coût sur réseau local.

Un partenaire débutant

La couverture en entreprise nécessite simplement la pose de picocellules, «un investissement de 10 à 20 millions», estime la ComCom. Mais In&Phone devra aussi conclure des accords de roaming avec des opérateurs nationaux si elle souhaite élargir son réseau.

En outre, il ne sera pas facile de persuader une société de s’engager avec un petit partenaire, débutant sur ce marché.

Chez Swisscom, on reste serein. «Nous souhaitons la bienvenue à ces concurrents », lance avec ironie son porte-parole Christian Neuhaus.

«Ces nouveaux venus ressemblent aux skaters qui tentent de s’accrocher derrière les trams pour voyager à bon compte, mais ils risquent à tout moment la sortie de route», analyse un spécialiste du secteur.

Au final, tant In&Phone que Tele2 pourraient bien se casser les dents.

swissinfo, Luigino Canal

la Commission de la communication (ComCom) a octroyé deux concessions GSM à In&Phone et à l’antenne suisse du groupe suédois Tele2.
Pour l’instant, Swisscom (63% de part de marché), Sunrise (20%) et Orange (17%) se partagent quelque 6 millions de clients.

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