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Le patron de la Mabetex Behgjet Pacolli lâche la Suisse pour le Kosovo

En quelques mois, Behgjet Pacolli est devenu le numéro un de la construction au Kosovo. Keystone

Inculpé pour blanchiment d´argent en juin dernier à Genève, Behgjet Pacolli, un Suisse d´origine kosovare, patron de la Mabetex au Tessin, réduit considérablement ses activités dans la Confédération. En revanche, il est devenu l´homme fort du Kosovo.

Le nom de Behgjet Pacolli a fait la Une des médias en janvier 1999, lorsque la justice suisse, en perquisitionnant dans les locaux de la Mabetex, sa société, à Paradiso, la banlieue chic de Lugano, découvre des extraits de comptes de trois cartes de crédit au nom de Boris Eltsine et de ses deux filles, Elena et Tatiana.

Plus récemment, cet entrepreneur d’origine kosovare, arrivé en Suisse en 1987, a été inculpé de blanchiment d’argent par le juge Daniel Devaud à Genève. Il est soupçonné d’avoir versé au moins quatre millions de dollars à Pavel Borodine et à ses proches afin de décrocher de juteux contrats.

La Mabetex, créée seulement en 1990, a participé à la reconstruction du Parlement russe, à la réfection de la Douma, la résidence de Boris Eltsine à Moscou. Avec un chiffre d’affaires d’1,6 milliard de francs, cette entreprise tessinoise était classée en 1998 au 76e rang suisse.

Depuis plus rien, plus aucun contrat. Behgjet Pacolli sent dorénavant le soufre. «Notre réputation est ruinée. Pour survivre, je suis contraint de licencier du personnel, nous ne sommes plus qu’une soixantaine de personnes à Lugano contre près de deux cents autrefois», affirme-t-il.

Va-t-il quitter la Suisse? Incontestablement l’homme se redéploie dans son pays natal. Le nom de Mabetex s’affiche sur les bords de route autour de Pristina, la capitale. «Il ne cesse de se porter candidat pour tout. Il a reconstruit le cinéma. Il a obtenu une concession pour vendre des assurances. Il se propose d’édifier un grand centre commercial», constate Tefik Mehmeti, de la Chambre de commerce et d’industrie du Kosovo.

En quelques mois, Behgjet Pacolli est devenu le numéro un de la construction dans un pays où il faut justement tout rebâtir. «Ses ambitions ne s’arrêtent pas à des briques et à du goudron. Il est candidat pour lancer la première chaîne de télévision privée du Kosovo», raconte Veli Bytuqi, responsable des informations à Rilindja, le plus ancien quotidien du pays.

À Hajvali, dans un petit village au sud de Pristina où réside toute sa famille, Behgjet Pacolli joue carrément les pères Noël. «C’est lui qui a aménagé l’école, la mosquée, le dispensaire. Et sa cimenterie donne du travail à une cinquantaine de personnes», raconte l’épicier.

Présenté déjà comme «le plus grand businessman du monde albanais», le patron de la Mabetex a-t-il un avenir politique au Kosovo? Jakup Krasniçi, secrétaire général du PDK, le parti qui a succédé à l’UCK, se méfie de ce Kovorar venu du Tessin. «Pacolli a fait beaucoup de publicité autour de la FORK, sa Fondation pour la reconstruction du Kosovo. Or, celle-ci n’a toujours rien fait pour le pays», lance-t-il.

Ian Hamel, Pristina

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