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Le projet de bourse du transit alpin freiné

«La politique de transfert est un processus long et difficile», a déclaré le ministre socialiste des transports Moritz Leuenberger. Keystone

L'idée du gouvernement suisse de créer une bourse du transit alpin pour stimuler le transfert du trafic routier sur le rail ne convainc pas la Chambre des cantons.

L’objectif de réduire le trafic passant à travers les Alpes à 650’000 camions par an ne pourra par ailleurs pas être atteint avant 2019.

Le projet de bourse du transit alpin n’a pas séduit les sénateurs. Adoptant la loi sur le transfert de la route au rail par 30 voix sans opposition, ils ont refusé mercredi d’approuver ce nouvel instrument tel qu’il était proposé par le Conseil fédéral (gouvernement) pour favoriser le transfert du trafic transalpin sur le rail.

Mais ils se sont également refusés à enterrer définitivement l’idée, octroyant tout de même au Conseil fédéral un mandat de négociations avec l’étranger.

Seul bémol: si un projet de bourse devait tout de même voir le jour, il encourrait une double menace référendaire car le traité puis la loi d’application pourraient être attaqués.

«D’une manière générale, il n’y a pas de solution miracle pour faire baisser le trafic lourd transalpin. La bourse ne permettra pas de résoudre tous les problèmes et sa mise en œuvre n’est pas assurée», a argumenté Thomas Pfisterer (PRD, droite) au nom de la commission préparatoire.

Objectif reporté de dix ans

Dans la foulée, le Conseil des Etats a biffé l’option d’une redevance de transit alpin, qui aurait frappé le passage du Gothard, du San Bernardino, du Grand Saint-Bernard ou du Simplon.

Les sénateurs ont par ailleurs estimé, s’alignant en cela sur le Conseil fédéral, que le but de diminuer à 650’000 le nombre de courses par an ne pourra pas être atteint comme prévu en 2009, compte tenu du fait que le trafic lourd transalpin atteignait encore 1,2 million de courses en 2006.

Ils ont donc fixé la date butoir à deux ans après la mise en service du tunnel de base du Gothard, soit en 2019, refusant de fixer l’échéance à 2012, comme le proposait la gauche.

L’Initiative des Alpes oubliée

Les orateurs socialistes n’ont pas manqué de critiquer le manque d’entrain à prendre des mesures. «N’y a-t-il jamais eu de 20 février 1994?», a par exemple lancé Ernst Leuenberger en référence à l’acceptation par le peuple de l’initiative des Alpes qui demandait d’inscrire dans la Constitution le principe d’une réduction du transit routier alpin.

«La politique de transfert est un processus long et difficile», s’est défendu le ministre socialiste des transports Moritz Leuenberger au nom du gouvernement. Sans les mesures prises jusqu’ici, 400’000 poids lourds supplémentaires franchiraient les Alpes chaque année, selon lui.

Fonds débloqués pour le rail

Décidée à encourager le transfert sur le rail à sa façon, la majorité des sénateurs a choisi de privilégier l’option du trafic combiné non-accompagné sur de longues distances. Alliant la route et le rail sans présence d’un conducteur, celui-ci devrait être de plus en plus rentable.

L’élargissement de l’offre de chaussée roulante, grâce à laquelle les chauffeurs de camion peuvent être transportés par le rail avec leurs camions complets, n’est en revanche pas prioritaire à ses yeux.

Côté finances, la Chambre des cantons a accepté de libérer une enveloppe de 1,6 milliard de francs destinée au transit alpin pour les années 2011 à 2018.

Elle a également fait un geste en faveur du trafic interne en débloquant 130 millions pour les années 2011 à 2015. Sur cette somme, 100 millions sont destinés au transport combiné de marchandises ne traversant pas les Alpes et 30 millions à la promotion du transport de marchandises sur des chemins de fer à voie étroite.

Interdit de rouler la nuit

Enfin, les sénateurs ont décidé que tout assouplissement de l’interdiction de circuler le dimanche et la nuit ou toute hausse du poids maximum autorisé étaient exclus. Le Conseil fédéral devrait néanmoins prévoir des exceptions dans l’intérêt du transport lourd intérieur entre les régions alpines.

La nouvelle législation en cours d’élaboration est destinée à remplacer l’actuelle loi sur le transfert du trafic, qui échoit à fin 2010. C’est désormais à la Chambre du peuple de donner son avis.

swissinfo et les agences

En 1981, 312’000 véhicules lourds ont traversé les Alpes.
En 1990, leur nombre a augmenté à 731’000.
En 2000, un pic a été atteint, avec 1,4 million de camions.
En 2006, leur nombre a baissé à 1,18 million.

La bourse du transit alpin est un instrument fondé sur les mécanismes du marché dont l’objectif est de contribuer au transfert du trafic des marchandises de la route au rail.

Ce projet prévoit de fixer un nombre maximal annuel de camions transitant par les Alpes. Des droits de transit alpin commercialisables seraient alors mis aux enchères.

Ces droits seraient valables dans toutes les vallées alpines du pays. Les transporteurs resteraient libres de choisir leur parcours.

Pour éviter le détournement du trafic dans les pays limitrophes, la bourse du transit alpin prévoit la mise au point d’une procédure de coordination sur l’ensemble du territoire alpin.

Dans une interview publiée mercredi par le journal alémanique «Tages Anzeiger», le président du conseil d’administration de la société de transport Hupac Hans-Jörg Bertschi s’est dit convaincu qu’avec l’ouverture du tunnel de base du Gothard, prévue en 2017, le trafic marchandises international sur le rail deviendra rentable.

Pour cette raison, l’entreprise leader dans le domaine du transport combiné n’aura selon lui bientôt plus besoin de subventions.

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